Le combat pour obtenir d’Airbnb une concurrence loyale est de longue haleine. L’AhTop le mène sans relâche sa création en 2016 avec des avancées et parfois des revers, comme le verdict de la Cour de Justice de l’Union européenne qui vient de tomber. Deux questions étaient posées par le Tribunal de Grande instance de Paris à la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE), suite à une action menée l’AhTop contre les excès de la plateforme :
- Les prestations fournies en France par la société Airbnb Ireland UC via sa plateforme électronique hébergée en Irlande bénéficient-elles de la liberté de prestation de services prévue par la directive européenne sur le commerce électronique (juin 2000) ?
- Les règles restrictives à l’exercice de la profession d’agent immobilier en France, inscrites dans la loi Hoguet (janvier 1970), sont-elles opposables à la société Airbnb Ireland UC pour son activité réalisée dans notre pays ?
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Selon la CJUE, le service proposé par Airbnb Ireland UC est un service de la société de l’information car la plateforme ne ferait que mettre en relation à distance des locataires potentiels avec des loueurs proposant des prestations d’hébergement de courte durée. La Cour considère qu’il s’agit seulement d’un service d’intermédiation.
Analyse de l’AhTop : Une affirmation étonnante, tant l’influence d’Airbnb Ireland UC est en réalité décisive sur les conditions de la prestation fournie : indications sur la fixation du prix de la location, centralisation du paiement, collecte et versement des taxes de séjour, aide à la création des « expériences » et des « aventures » Airbnb, etc. Alors que la directive sur le commerce électronique date de juin 2000, une époque où le numérique restait balbutiant, Airbnb Ireland UC va donc continuer à profiter d’un statu quo déconnecté de la réalité. Une situation devenue intenable depuis trop longtemps, qui ne peut pas laisser l’État français impuissant. La décision de la Cour démontre l’urgence d’une refonte totale de cette directive. Incapable de répondre aux défis posés par les acteurs du numérique, elle fait peser un risque majeur sur les acteurs de l’économie réelle, seuls créateurs d’emplois, qui subissent de plein fouet la concurrence des plateforme.
La Cour de Justice de l’Union européenne indique par ailleurs que les dispositions de la loi Hoguet, qui règlementent la profession d’agent immobilier en France, ne peuvent en l’état pas s’appliquer à Airbnb Ireland UC car la France aurait dû notifier la Commission européenne au préalable – comme l’y oblige la directive sur le commerce électronique.
Analyse de l’AhTop : Un État peut mettre en place une réglementation « restrictive » sur une entreprise si celle-ci porte atteinte ou fait peser un « risque sérieux et grave d’atteinte » à l’ordre public, à la sécurité publique ou à la protection des consommateurs mais il est tenu d’en informer la Commission. Il s’agit donc d’une condition de pure forme qui ne remet pas en cause les fondements de la loi Hoguet. C’est au Gouvernement qu’il revient désormais de prendre toutes les dispositions nécessaires pour que la loi puisse s’appliquer rapidement. La décision du juge européen se limite uniquement à la loi Hoguet et n’a aucun impact sur les autres textes aujourd’hui en vigueur pour réguler l’activité d’Airbnb Ireland UC : la loi pour une République numérique (2016) et la récente loi Élan (2018) – deux avancées majeures – ne sont à l’heure actuelle pas remises en cause. Leurs mesures apparaissent plus que jamais proportionnées et justifiées par les conséquences actuelles de l’activité de la plateforme. Elles sont la preuve de la volonté de l’État d’instaurer des règles équitables et justes, au bénéfice de l’ensemble des Français et des entreprises.
La position de Serge Cachan, président de l’AhTop : « Nous prenons acte de cette décision. La directive sur le commerce électronique a montré ses limites, il faut la faire évoluer au plus vite pour qu’elle entre dans le XXIème siècle. Il est urgent que le Gouvernement fasse entendre sa voix dans les prochains mois pour transformer en profondeur les règles de la concurrence dans l’Union européenne. Preuve de la légitimité de notre combat, la loi Hoguet n’est en revanche pas remise en cause sur le fond. La Cour incite l’État français à se conformer aux règles européennes pour que ses mesures puissent être applicables à Airbnb Ireland UC. Aux côtés des pouvoirs publics et des nombreuses communes qui ont déjà pris à bras-le-corps le problème, nous allons continuer à nous mobiliser pour que le climat autour d’Airbnb Ireland UC change ».