Faire face à l'absence, devenue problématique, d'un salarié malade

Gérer une absence pour maladie peut s'avérer délicat et semé d'embûches.

Publié le 06 septembre 2013 à 14:11

Subir l'absence pour maladie d'un collaborateur n'est jamais agréable pour l'hôtelier ou le restaurateur, même s'il sait que cela fait partie intrinsèque de la gestion d'entreprise. Au mieux, cette absence perturbe momentanément l'organisation du travail et a un coût (salaire du remplaçant). Au pire, elle conduit au conflit prud'homal. Il n'y a pas de solution générale en la matière, car il n'y a pas deux situations exactement identiques. Voici tout de même quelques pistes d'actions à partir de cas concrets.

Le salarié ne justifie pas tout de suite de sa maladie

Les salariés ne sont pas obligés de vous informer de leur état de santé, mais si celui-ci les empêche de venir travailler, ils doivent vous prévenir le plus rapidement possible puis vous adresser, dans les 48 heures, un arrêt de travail émanant du médecin traitant (art. L.1226-1 du code du travail). Le salarié qui laisse son employeur dans l'ignorance de l'arrêt de travail et le laisse dans l'incertitude quant à la poursuite de la relation de travail peut être sanctionné par un licenciement. Selon les circonstances, la Cour de cassation a jugé qu'il s'agissait d'une cause réelle et sérieuse (le salarié n'avait pas timbré sa lettre de sorte que l'arrêt de travail n'est jamais arrivé à l'employeur - Cass. Soc. 25 janvier 1990) ou d'une faute grave (le salarié a attendu 6 jours pour informer son employeur de son arrêt de travail – Cass. Soc. 21 avril 2010). En revanche, quand le salarié tarde à envoyer le certificat médical après avoir pris la peine de téléphoner pour prévenir, ou informer oralement d'une prolongation après avoir fourni un arrêt de travail initial, il n'est pas fautif au point d'être sanctionné par un licenciement (Cass. Soc. 19 novembre 1997 - Cass. Soc. 11 janvier 2006). Dans un tel cas de figure, prenez toutefois la peine d'écrire une lettre à l'employé, courtoise mais claire, pour lui rappeler ses obligations en matière de justification d'absence afin de régulariser son dossier.

Un salarié fournit un arrêt de travail, mais vous pensez qu'il n'est pas vraiment malade

Si votre salarié a un an d'ancienneté, vous devez lui verser des indemnités journalières de maladie à partir du 8e jour d'absence. En contrepartie de cette obligation, la loi vous autorise, en cas de doute sur la réalité de son indisponibilité, à demander une contre-visite médicale. Vous trouverez de nombreuses sociétés spécialisées dans les contre-visites médicales sur internet. Le médecin mandaté effectuera alors la visite de contrôle. Dès lors, plusieurs cas de figure peuvent se présenter :

- le médecin contrôleur conclut que l'arrêt de travail est médicalement justifié : vous devez continuer à verser les indemnités et vous organiser comme vous le pouvez en attendant son retour ;

- le salarié refuse la contre-visite médicale ou bien il était absent lors de la visite de contrôle (qui a pourtant eu lieu en dehors des heures de sortie autorisées) : vous pouvez cesser de verser les indemnités journalières à la date du contrôle. La caisse d'assurance maladie sera également prévenue par le médecin contrôleur qui lui enverra une copie de son rapport. La caisse d'assurance maladie pourra elle aussi suspendre le versement des indemnités de Sécurité sociale. Mais vous ne pouvez ni le sanctionner ni le licencier car le fait pour le salarié de ne pas s'en tenir aux prescriptions de son médecin traitant n'a pas un caractère fautif et ne peut donc pas être sanctionné (Cass. Soc.10 oct. 1995) ;

- le médecin contrôleur conclut que l'arrêt de travail n'est plus médicalement justifié et il signifie une reprise anticipée. Vous pouvez cesser de verser les indemnités journalières à la date de la reprise anticipée. Si le salarié ne reprend pas son travail à cette date, vous pouvez alors le mettre en demeure de reprendre son travail ou de justifier son absence. Mais, là encore, vous ne pouvez pas utiliser la contre-visite médicale pour licencier le salarié. Seule la suspension du versement des indemnités maladie est possible. En outre, si le salarié produit un arrêt de travail de son médecin traitant qui prolonge l'arrêt à partir de la date de reprise anticipée indiquée par le médecin contrôleur, son absence est à nouveau justifiée et vous devrez alors continuer à lui verser le complément de salaire lié à la maladie.

Vous avez la certitude que le salarié profite d'un arrêt de travail de complaisance pour travailler chez un autre employeur

Le fait de travailler chez un autre employeur pendant un arrêt maladie est contraire à l'obligation de loyauté à laquelle est tenu tout salarié, et  il justifie réellement et sérieusement un licenciement, pour autant que vous pouvez prouver ce fait (ex : salarié pris sur le fait par constat d'huissier, témoignages....). Selon les circonstances exactes, il peut s'agir d'une faute simple ou d'une faute grave justifiant un licenciement sans préavis. À titre d'exemple, dans une affaire où un salarié avait travaillé chez un autre employeur, la Cour de cassation a validé un licenciement pour cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 12 janvier 2005). Dans un autre cas où le salarié profitait de son arrêt maladie pour faire des travaux chez lui en employant des ouvriers, la faute grave a été admise (Cass. Soc. 21 juillet 1994). En revanche, dans une affaire où une employée aidait "occasionnellement son mari dans un fonds de commerce qui était exploité par lui seul à la même adresse que leur domicile conjugal et à des heures où le service de restauration en salle était terminé", la cause réelle et sérieuse n'a pas été retenue et le licenciement fut qualifié d'injustifié (Cass. Soc., 28 novembre 2006).


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Publié par Tiphaine BEAUSSERON



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