"Mes clients se font insulter et même gifler" : le calvaire du Bistrot Urbain

Paris (75) Depuis qu'il a ouvert son adresse rue du Faubourg Saint-Denis en octobre 2012, Samuel Urbain a vu sa vie tourner, en quelques mois, du conte de fée au cauchemar en raison de l'explosion de la délinquance et des incivilités.

Publié le 18 novembre 2014 à 18:49

Alors qu'il n'avait pas encore 30 ans, Samuel Urbain, diplômé de l'école Le Cordon bleu qui a managé un temps des pubs agités de la rue Princesse (Paris, Ve), a ouvert en plein coeur de Paris sa première affaire : le Bistrot Urbain, au 103 de la rue du Faubourg Saint-Denis (Paris Xe). "Très vite, nous avons été classés dans les vingt meilleurs bistrots de Paris dans le Figaroscope 2013. Je suis passé trois fois dans le JDD en un an. Le site LaFourchette nous a noté 9 sur 10 et Tripadvisor 4,1 sur 5. Nous étions rentables après trois mois d'activité", se souvient-il. Ce Parisien de naissance revendique son attirance pour les quartiers populaires : "J'ai toujours été sensible à la diversité. Ma mère est d'origine tunisienne." Assis sur la petite terrasse de son bistrot, les yeux clairs du restaurateur se durcissent subitement au passage d'une jeune fille qui balaye d'un regard circulaire les tables : "Elle cherche ce qu'elle pourrait voler."

Seringues et tâches de sang

L'ambiance du quartier, qui a toujours été animée, a en effet changé du jour au lendemain, selon Samuel Urbain, lorsqu'une communauté de Roms a chassé les sans-domicile fixe qui occupaient les bancs du square Alban Satragne, quelques mètres en amont de son établissement. "Ils viennent par grappes le matin. Les vieux restent dans le square pendant que les jeunes, de 7 à 18 ans, font des allers et venues pour ramasser tout ce qu'ils trouvent. La police s'est déplacée au début, mais aujourd'hui nous sommes abandonnés. Ce n'est pas l'unique problème : la proximité d'une association qui délivre des produits de substitution aux toxicomanes sédentarise ces populations, en particulier dans les sous-sols du parking voisin. Sans parler d'un nombre croissant de personnes alcoolisées en déshérence. Dans ces conditions, il est exclu que j'utilise ma terrasse le soir alors que je paye une redevance, s'époumone Samuel Urbain. Dans le parking où je raccompagne mes clientes, il m'arrive de devoir enjamber les corps. On trouve des seringues, des tâches de sang, des compresses souillées sur le sol... La semaine dernière, j'avais une réservation de six personnes. Arrivées au parking, elles ont fait demi-tour estimant le quartier trop dangereux."

Le square jouxtant le Bistrot Urbain est en effet occupé par des gens du voyage avachis sur des fauteuils de bistrot à la provenance incertaine. La pelouse a triste mine avec ses matelas abandonnés et ses bouteilles d'alcool vide. Le propriétaire de l'un des bars voisins est victime de nombreuses nuisances : "Pour protéger sa terrasse, explique Samuel Urbain, il a tenté de la délimiter avec des grosses jardinières mais, en pleine journée, certains s'en servent d'urinoir. Même en présence de clients attablés ! Le matin, il trouve des excréments dans ses fleurs. Nous sommes livrés à nous-mêmes. La police ne se déplace plus. Alors, à l'initiative de l'hôtel de Bordeaux, adhérent de l'Umih 75, nous avons saisi en désespoir de cause le syndicat".

"Sentiment d'impunité"

Le patron liste les troubles subis : "Le pain est volé dans les corbeilles, je ne peux pas laisser une table dressée en terrasse sans convives car les couverts seront dérobés. Mes clients se font insulter par les mendiants surtout quand ils ne donnent rien, l'un d'eux s'est même fait gifler. Deux fois par semaine au minimum, je dois remplacer des plats car les voltigeurs du square Satragne se servent à l'arrachée dans les assiettes. Parfois, ils se saisissent de bouteilles pour boire au goulot. Un de mes clients s'est fait cracher dessus en récupérant une bouteille. Ces jeunes deviennent violents car ils ont un sentiment d'impunité. Tout cela va mal finir." Entre colère et lassitude, Samuel Urbain reconnaît n'avoir jamais craint pour son intégrité physique et reste optimiste grâce à l'implication de l'Umih : "Ce qu'il y a de plus incroyable, c'est que j'ai ouvert il y a six mois une deuxième affaire au 12 de la rue du Paradis, à 80 mètres de la première, et il n'y a aucun problème là-bas !"

 

 


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Publié par Francois PONT



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