Licenciement disciplinaire en cas d'arrêt de travail falsifié
La falsification d'un arrêt maladie destiné à tromper l'employeur et les organismes sociaux a déjà été considérée comme une faute grave par la jurisprudence (Cass. Soc. 12.02.1985 n°82-42983). Toute la difficulté est alors d'être en mesure de prouver la falsification de l'arrêt de travail. Ne vous précipitez pas dans une procédure de licenciement. Préférez la réflexion et la prudence pour constituer votre dossier. Exemple : votre salarié absent pour maladie vous a justifié son premier arrêt. Mais pour justifier une prolongation il vous fourni l'arrêt initial raturé. Pour pouvoir le sanctionner, vous devez prouver la faute. Ici, la faute consiste à avoir falsifié son arrêt de travail pour maladie pour tenter de justifier une absence qui en réalité ne l'est pas.
Que faire ? Vous pourriez contacter le médecin traitant à l'origine de l'arrêt pour lui demander confirmation des dates d'arrêt. Si celles-ci ne correspondent pas à celles indiquées par votre salarié et vous confortent dans l'idée qu'il y a bien falsification, vous pouvez demander au salarié de vous fournir un arrêt plus lisible en précisant que vous ne pouvez accepter un document raturé ou biaisé et que sans réponse de sa part passé un délai raisonnable (une dizaine de jours), vous pourriez être contraint de prendre les mesures qui s'imposent (c'est-à-dire convocation à entretien et éventuellement rupture).
Parallèlement, si vous versez un complément de salaire au titre de la maladie, vous pouvez demander une visite de contrôle (contre-visite médicale) et en tirer les conséquences en fonction des conclusions du médecin contrôleur.
Licenciement pour cause réelle et sérieuse en cas d'absence prolongée ou répétée
Il est interdit de licencier un salarié en raison de son état de santé (Art. L.1132-1 du code du travail). Cela serait discriminatoire. En revanche, des absences répétées ou une absence prolongée qui causent un vrai préjudice à l'entreprise (= réelle désorganisation) peuvent constituer un motif réel et sérieux de licenciement.
Bien sûr, cela s'apprécie au cas par cas, en fonction de la répétition des absences, de leur durée, mais aussi de l'emploi et de la qualification du salarié ainsi que de la taille et de l'activité de l'entreprise. Il n'y pas deux situations similaires, mais il est clair que l'absence réitérée plusieurs jours par mois pendant plusieurs semaines aura un impact négatif plus fort sur l'organisation du travail s'il s'agit du chef de cuisine dans une structure de 2 ou 3 personnes, alors qu'il sera moindre s'il s'agit d'un chef de partie au sein d'une brigade de 8-10 cuisiniers. Plus généralement, et selon la jurisprudence, plus l'entreprise est petite, plus la qualification du salarié est élevée ou spécifique, et, plus l'absence est longue, plus elle est de nature à désorganiser l'entreprise. A l'inverse, plus l'entreprise est grande, plus l'absence doit être importante (nombre de répétitions/longueur) pour être considérée préjudiciable à l'entreprise.
L'organisation s'impose
Dans les faits, tout est affaire d'appréciation et de juste mesure. Il est sûr qu'envisager le licenciement d'un salarié absent plusieurs fois ne peut pas être sérieusement envisagé de prime abord. Il vous faudra réorganiser temporairement le travail de l'équipe ou recourir à l'intérim ou encore au CDD. A ce stade, le licenciement est alors impossible car ces replacements temporaires ne suffisent pas à le justifier valablement selon la jurisprudence (Cass. Soc 13-3-2001 Herbaut c/ SA Adressonord ; Cass. Soc. 13 mars 2001, n° 99-40110 ; Cass. Soc. 18 octobre 2007 ; Cass. Soc. 22 octobre 1996 - Cass. Soc. 2 mars 2005, n° 03-42800).
Il faut en effet que ces absences répétées vous contraignent à remplacer l'absent de manière définitive via un CDI et que la durée de travail de ce dernier ait un volume horaire équivalent à celui du salarié licencié.
Enfin, cette embauche doit se faire dans un délai 'raisonnable', c'est-à-dire proche du licenciement (avant ou après). La jurisprudence ne précise pas ce qu'elle entend par 'raisonnable' ou 'proche', mais on peut considérer qu'il s'agit de quelques semaines.
Si vous embauchez pour pallier les absences répétées, il vous faudra encore agir avec des pincettes pour vous séparer du salarié malade tout en évitant de voir la situation dégénérer en conflit prud'homal. En effet, ce n'est pas la maladie elle-même qui doit motiver le licenciement mais les conséquences qu'elle engendre sur le bon fonctionnement de l'entreprise. La lettre de licenciement doit faire ressortir cela. Elle doit donc énoncer les éléments précis démontrant que les absences répétées du salarié perturbent réellement et sérieusement le fonctionnement de l'entreprise et que l'employeur est contraint de remplacer définitivement le salarié absent.
Publié par Tiphaine BEAUSSERON