Le développement des locations de courte durée continue de vous inquiéter...
Roger Bellier : A l'occasion de notre assemblée générale, nous avons effectivement fait le point. Il y avait 2200 annonces de locations de courte durée dans le département dont 312 sur Bagnoles de l’Orne fin mars. Sachant qu’il y a 42 hôtels de tourisme dans l’Orne. Nous sommes dans une concurrence biaisée. Quand un internaute veut réserver à Alençon, les plateformes peuvent le rediriger vers une autre ville. Tout ça ne va pas, car tout le monde est lésé, les professionnels comme les consommateurs. Mais il y a d'autres sujets préoccupants. On doit faire prendre conscience aux maires qu’il ne faut pas accorder des buvettes temporaires à tort et à travers, qui nuisent à l’activité des petits cafés et restaurants qui paient des charges et des taxes. Le Brexit est aussi un très gros souci car nous avons toujours été très liés avec la clientèle anglaise. Autre inquiétude : le ticket moyen en restauration qui continue de baisser, avec une démultiplication des points de restauration rapide qui ne s’inscrivent pas dans la durée (ça ferme, ça rouvre) et créent un déséquilibre commercial important. La restauration traditionnelle n’a pas la possibilité de jouer sur les marges.
Comment ressentez-vous l'activité ?
Même si 2018 a été une année record en matière de tourisme pour la France, il faut relativiser. Il y a de grands écarts d’un territoire à l’autre. Dans l’Orne, l’an dernier, les 5 premiers mois n’ont pas été bons. Il y a eu une reprise sur la saison estivale grâce à la météo et l’après-saison s’est maintenu, mais toujours avec des disparités. Tout dépend de la situation géographique. On nous a annoncé chez nous une progression de 8% dans l’hôtellerie mais nous partions de très bas. Le week-end de Pâques est tombé un peu plus tard dans le calendrier, ce qui est généralement favorable à l’activité. Juin a été un peu meilleur que l’an dernier sur les 15 premiers jours grâce aux fêtes du 75ème anniversaire du Débarquement qui ont attiré du monde, malgré la météo. Nous sommes en légère progression à l’arrivée de l’été mais il est très difficile de prévoir.
L'emploi et le recrutement sont-ils toujours un frein à l'activité ?
Bien sûr et c'est le grand paradoxe : nous avons entre 250 et 300 non pourvus dans notre secteur dans l’Orne. Cette année, la réforme de la formation professionnelle avec la création des OPCO, complique les choses. Nous avons souhaité que le Fafih, ex-OPCA, fasse le point durant notre assemblée. Ils vont accompagner les entreprises dans les ressources humaines dont ont besoin les TPE, ce qui est une bonne chose. Quant aux financements, nous avons compris qu’ils seraient dirigés vers les demandeurs d’emploi et les apprentis. Mais faut-il encore que la réforme prenne en compte la qualité du travail effectué par les CFA existants ? Nous avons un CFA dans notre département qui a toujours bien fait son travail et dont nous connaissons l’efficacité. Ce serait dramatique de lui retirer les moyens de continuer d’avancer au profit d’organisme qui n’ont pas les compétences.
Que faut-il mettre en oeuvre pour favoriser l'attractivité du territoire ?
Les animations sont essentielles. L’an dernier, par exemple, Sées a obtenu le label Petite citée de caractère (4 700 habitants). Nous avons 13 monuments classés et l’ancienne Halle aux grains a été transformé en pôle multiservices (culture, loisir, affaires) et intergénérationnel, tout en travaillant sur son potentiel historique (charpente, matériaux, utilisation des espaces). En été, la cathédrale accueille désormais un son et lumière de très grande qualité. Ce sont des points positifs, qui donnent envie de venir. L’Orne a besoin d’autres événements comme celui-là pour donner envie aux voyageurs de s’arrêter. Le département doit davantage travailler sur ses atouts et je pense que les Office de tourisme doivent se rapprocher physiquement des hôtels, il faut qu'ils tiennent les hôteliers informer, qu'ils les fasse participer. Les petits hôteliers n’ont pas le temps de se déplacer ou de passer des heures au téléphone. C’est aux offices de tourisme de créer un vrai maillage, qui ne peut être que profitable à tous.
#orne# Roger Bellier ruralité
Publié par Sylvie SOUBES