Petit, Ludovic Turac était passionné de cuisine mais n'imaginait pas que cela pouvait être une voie professionnelle sérieuse. "J'ai découvert en tombant sur un livre de Pierre Gagnaire que c'était un vrai métier, de ceux qui vous font lever le matin. Alors j'ai suivi la voie classique au lycée hôtelier de Bonneveine." Chef de partie à 21 ans, le jeune chef a fait un bon bout de chemin pour compléter sa formation.
Dans les grandes maisons parisiennes, au Bristol ou chez Guy Savoy, il apprend les grands classiques de la cuisine française, lièvre à la royale et poularde en vessie. Avec Christophe Bacquié au Castellet, il découvre le travail d'orfèvre avec pince à épiler et pied à coulisse. Ensuite, l'aventure Top Chef lui permet de se surpasser : "Quand on a une heure pour faire manger quatre personnes, observé par son idole (Jean-François Piège), on ne pense plus de la même façon. Aujourd'hui le challenge ne me fait plus peur."
"Faire tomber les barrières de la cuisine"
Aussi, lorsque Lionel Levy lui propose de reprendre la maison, Ludovic n'hésite pas longtemps : "C'est une sacrée pression, mais très positive. C'était la suite logique, c'est ici que j'ai rencontré Karine, ma femme, qui est ici directrice de salle. Si je ne souhaite pas révolutionner les choses, j'ai par contre réécrit la carte à ma sauce. On peut prendre un plat et un dessert à 22 €. Le menu en cinq étapes s'appelle menu pointu, comme les bateaux d'ici, mais aussi parce que j'y prête beaucoup d'attention : il change tous les jours, et s'adapte à chaque client. Lionel Levy m'a permis de faire tomber les barrières de la cuisine, à ne pas être figé. Quand face à un produit je tournais autour de deux ou trois pistes différentes, lui m'apprenait à en inventer de nouvelles, par exemple à ne pas hésiter à marier un loup avec un pied de cochon."
Et quand on lui demande ce qu'il cuisinerait à papa, l'ancien second réfléchit avec soin : "Je tenterais de le surprendre, ce qui est difficile… En entrée, j'essaierais de le convaincre avec un foie gras aux oursins, (parce qu'il n'en aime même pas l'idée, mais je suis sûr que cela lui plairait). Ensuite, je lui ferais une bouillabaisse à ma façon, pour lui montrer que son poulain est en bonne voie. Je lui cuisinerais aussi un plat à lui tout simple, un poisson avec un jus terre-mer, comme il me l'a appris. Et rien d'autre parce qu'il n'aime pas les desserts…"
Publié par Anne GARABEDIAN