du 14 septembre 2006 |
HÉBERGEMENT |
APRÈS AVOIR PASSÉ EN REVUE SON PORTEFEUILLE DE MARQUES
GILLES PÉLISSON MET SES ENSEIGNES HÔTELIÈRES EN ORDRE DE BATAILLE
Désormais, le groupe se consacre à 2 métiers, l'hôtellerie et les services. Objectif visé : devenir le leader mondial sur le segment économique et milieu de gamme sur les 5 continents tout en accentuant le leadership sur le Ticket. Dans ce cadre, les cessions d'actifs non stratégiques vont se poursuivre et celles des murs d'hôtels aussi. Sur le plan marketing, Accor lance une nouvelle enseigne 2 étoiles, non normée, via la franchise en Europe. Quant à Sofitel, la chaîne est repositionnée en 3 segments.
"Notre nouvelle enseigne 2 étoiles non normée verra le jour dès 2007 en France." |
La
voix est forte, le ton appuyé, le regard déterminé. En poste depuis
le 9 janvier 2006, Gilles Pélisson, nouveau directeur général du
leader de l'hôtellerie européenne, sait où il veut aller. Aucun
doute possible là-dessus. Journalistes et analystes financiers ont eu l'occasion
de s'en rendre compte. Profitant de la présentation des comptes semestriels
- très encourageants, le patron opérationnel d'Accor a en effet dévoilé
une stratégie précise et ambitieuse à l'horizon 2010.
Dorénavant, Accor se concentre sur 2 métiers
majeurs, "en forte croissance" : l'hôtellerie et les services aux entreprises.
Autrement dit, la vente des participations non stratégiques de la compagnie
va se poursuivre au cours des prochains mois. Après être sorti de Compass,
du Club Med et de Carlson Wagonlit Travel se constituant une cagnotte de 660 ME,
le groupe a ainsi d'ores et déjà décidé de céder le spécialiste
des vols secs Go Voyages et la société de restauration collective italienne
Gemeaz Cusin. "Nous comptons récupérer plus de 500 ME supplémentaires
sur 2007-2008", a précisé Gilles Pélisson. Et de souligner toutefois
: "Nous avons le temps pour agir. Et puis, tout n'est pas à vendre."
À commencer par l'activité
casinos (34 % du capital du Groupe Barrière) qui "bénéficie d'un
bon Roce*". S'agissant de la Compagnie des Wagons-Lits (restauration ferroviaire),
rien ne semble encore définitivement arrêté. L'ancien dirigeant
de Bouygue Telecom a du reste pointé du doigt "les belles performances"
de cette filiale qui a remporté le contrat sur le TGV. Est, et concourt sur
l'appel d'offres pour l'Eurostar.
Red Roof sur la sellette
Par contre, le maintien
de la chaîne américaine Red Roof dans le giron d'Accor est à l'étude
tandis que Motel 6 (867 hôtels dans 49 États) va accélérer
son expansion par le biais de contrats de franchise. Avec 337 établissements,
Red Roof occupe seulement en effet la 6e place du marché aux États-Unis.
Sa taille est jugée "trop régionale". Gilles Pélisson se donne
donc "6 à 12 mois" avant de passer à l'action sur ce dossier.
Concernant Lenôtre,
pas question en revanche de mise sur le marché. Bien au contraire. Insistant
sur l'excellent travail effectué par Patrick Scicard, p.-d.g. de la célèbre
maison, le directeur général d'Accor veut capitaliser sur le savoir-faire
et l'image du traiteur. Le tout en
jouant la complémentarité avec le réseau Sofitel.
Loin de vouloir abandonner cette chaîne
4 étoiles - comme certains le laissent entendre -, Accor s'est fixé de
sérieux objectifs sur ce créneau. "Compte tenu de notre parc actuel,
nous ne visons pas la place de leader sur ce marché, mais nous voulons être
un acteur majeur sur les 5 continents", a indiqué Gilles Pélisson
en ajoutant : "Sofitel est un point d'accroche pour les investisseurs. Cela nous
permet de pénétrer les marchés émergents." Un acteur majeur
du haut de gamme qui nécessite néanmoins un profond repositionnement.
Marque 'flagship' de l'offre Accor
représentant le 'luxe à la française', Sofitel va de fait procéder
à une segmentation de son parc - environ 200 unités - en 3 niveaux :
une collection d'une dizaine d'hôtels de prestige, un coeur de réseaux
centré sur 120 établissements très haut de gamme et 50 unités
repositionnées en haut de gamme.
Concrètement, il y a du reclassement
dans l'air. Mais là n'est pas le problème ! D'autant que la société
a réalisé une
'revue
détaillée' de son portefeuille de marques hôtelières afin de
les mettre en ordre de bataille.
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Séduire les indépendants
en France et en Europe
La feuille de route est tracée. S'agissant
notamment de l'hôtellerie économique et milieu de gamme, Accor veut "être
le leader sur les 5 continents".
Pour y parvenir, le
numéro 1 de l'hôtellerie
européenne ne lésine pas sur les moyens, en particulier en termes d'innovation
et de marketing. Il a choisi ainsi d'étoffer sa panoplie d'enseignes en créant
une nouvelle marque non normée dans le 2 étoiles.
Si le nom n'est pas à ce jour encore connu
- Accor détient plusieurs marques dans sa musette telles Minimotte, Frantel,
All Seasons… -, le nouveau réseau est clairement destiné aux
indépendants. "Cette marque est vouée
à se développer en Europe via la franchise. Le lancement aura lieu en
France en 2007", a ainsi commenté Gilles Pélisson. "C'est le pendant
d'Ibis comme Mercure l'a été pour Novotel. D'ici à 5 ans, on peut
facilement réunir sous cette bannière environ 10 000 chambres. Contrairement
à ce que l'on pense, le marché du 2 étoiles est faiblement pénétré par les chaînes",
a confié convaincu Yann Caillère, ancien dirigeant de Louvre Hotels, aujourd'hui
directeur général Accor Hôtellerie Europe du Sud, Afrique, Moyen-Orient.
Un virage important dans la vie du groupe - rappelons-le
fondé par Gérard Pélisson et Paul Dubrule - qui ne sera sans doute
pas sans conséquence dans le paysage hôtelier
français. D'autant que parallèlement à cette nouveauté,
Accor relance ses réseaux économiques et très économiques, Formule
1 et Ibis. "Relooké par l'agence Saguez, Formule 1 est sur le point d'entamer
un vaste programme de rénovation", a confié Gilles Pélisson.
Quant à Ibis, la nouvelle chambre 'Coquelicot' va monter en puissance.
Des nouveautés qui bénéficieront
d'une communication d'envergure. Tout comme
la chaîne Novotel. En témoigne une campagne publicitaire renforcée
au 2e trimestre 2006 avec "25 ME d'investissements publicitaires
supplémentaires".
100 Ibis en Chine en 2010
Porté par la reprise
du secteur hôtelier (recettes en hausse de 7 % à fin juin) et le dynamisme
du pôle services (+ 25,6 % sur le 1er semestre 2006), Accor dispose
indiscutablement de moyens financiers conséquents pour booster ses marques
et asseoir son leadership dans ses 2 métiers de base. D'autant plus fortement
que l'état-major - qui siégera à la mi-2007 à proximité
de la Bibliothèque de France - a affiné sa politique immobilière.
Et il y a là un véritable 'trésor de guerre'. Les cessions de murs
d'hôtels vont du reste s'amplifier dans les mois à venir avec un programme
à réaliser d'ici à 2008 portant sur 535 établissements.
"Ces ventes auront un impact de 1,62 MdE en cash", a révélé
le d.g. Ajoutons à cette
somme, un potentiel de 550 autres unités pouvant être cédées
sur 2008-2009.
De quoi assurer la création de 200 000 chambres
d'ici à 2010. Rien que sur l'année en cours, Accor annonce 25 000 nouvelles
chambres dont plus de 7 000 sur le Vieux Continent. "Au-delà de 2006,
notre pipeline est déjà bien alimenté avec 50 000 chambres engagées",
a détaillé le patron d'Accor. Une croissance tournée logiquement
vers les pays émergents comme la Chine et l'Inde. "Nous prévoyons 100
Ibis en Chine et 5 000 chambres en Inde d'ici à 5ans", a révélé
confiant l'intéressé.
Une sacrée invitation au voyage
en perspective pour les actionnaires d'Accor auxquels Gilles Pélisson a promis
- sous réserve de la réalisation des cessions des actifs non stratégiques
- d'être généreux.
Claire
Cosson
zzz36t
*Roce (Return on Capital Equities) : mesuré par l'excédent d'exploitation des activités (Ebitda) rapporté à la valeur brute des immobilisations, augmenté du besoin en fonds de roulement.
Les grands travaux de Gilles Pélisson
Hôtellerie
- Créer une chaîne 2 étoiles,
non standardisée, en Europe dès 2007.
- Repositionner Sofitel avec une segmentation de la marque en
3 niveaux.
- Relancer Formule 1 et Ibis ainsi que Novotel par l'innovation,
le design et des campagnes publicitaires multimédias paneuropéennes.
- Refondre les programmes de fidélisation des enseignes hôtelières.
- Engager une revue stratégique sur Red Roof Inn aux États-Unis.
Services
- Positionner le 'Ticket' comme marque ombrelle des activités
services.
- Maintenir une croissance organique de 8 à 16 % par an
hors acquisition.
- Investir 500 ME sur 5 ans pour augmenter les parts de marché
ou acquérir de nouveaux savoir-faire.
Immobilier
- Céder 535 murs d'hôtels d'ici à 2008 pour
3,2 MdsE.
- Potentiel de cessions complémentaires pour 550 murs d'hôtels
supplémentaires sur 2008-2009.
Actifs non stratégiques
- Vendre les participations non stratégiques pour un montant
supérieur à 500 ME en 2007-2008 avec, pour commencer, les cessions de
Go Voyages et de la restauration collective en Italie de Gemeaz Cusin.
Gestion opérationnelle
- Rationaliser l'organisation mondiale autour de 8 plateformes
d'expertise : métier-formation-ressources humaines ; gestion-finances ; achats
; supports technologiques ; internet-réservations ; marketing-commercial ;
construction-maintenance ; développement-patrimoine immobilier.
Développement
- Ouvrir 200 000 chambres d'ici à
2010 dont une majorité sur le segment économique et milieu de gamme, en
contrats de gestion et franchise.
Isabelle Rochelandet,
vice-présidente
France-Belgique-Suisse Choice
Hotels
"Cela peut permettre d'assainir
le marché 2 étoiles" Bernard Lefebvre, président de l'Association des investisseurs et franchisés Envergure
"Nous appréhendons l'avenir avec inquiétude" Jean Dalaudière, président de l'Association des franchisés Accor hôtellerie (Afah)
"Nous souhaitons que les 1er
franchisés à porter la nouvelle marque 2 étoiles du groupe
soient des franchisés Accor" |
Une santé financière de fer
Le nouveau directeur général a de
quoi se frotter les mains. Accor a réalisé un excellent 1er
semestre 2006 en termes opérationnel. Au 30 juin, son chiffre d'affaires
a progressé de 8,4 % à 3,69 MdsE. Le résultat brut d'exploitation - revenus et charges d'exploitation avant loyers, amortissements et provisions,
résultat financier et impôts - a atteint 969 ME, en hausse de 12,1 %
par rapport à la même période de l'exercice précédent.
Quant à la marge brute d'exploitation, elle a grimpé de 0,8 point tandis
que le résultat avant impôts et éléments non récurrents
s'est élevé à 282 ME, en croissance de 36,7 %. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2994 Hebdo 14 septembre 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE