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du 16 juin 2005
L'ÉVÉNEMENT

COLÈRE DANS LES RANGS PATRONAUX APRÈS LES PROPOS DU MINISTRE DÉLÉGUÉ AU TRAVAIL

ANDRÉ DAGUIN PARLE D'UNE "FAUTE LOURDE AU MINISTÈRE"

Vives réactions de la part des syndicats patronaux après les propos tenus par Gérard Larcher la semaine dernière, à la sortie d'une réunion de la sous-commission salaires de la Commission nationale de la négociation collective. Celui-ci s'est attaqué ouvertement au secteur de l'hôtellerie et de la restauration. D'après le ministre délégué au Travail, la profession n'a pas fait d'efforts d'embauche malgré les aides reçues…
Propos recueillis par Sylvie Soubes

Didier Chenet, Synhorcat : "Stupeur et inquiétude"
"Je suis stupéfait par ces paroles et je pense que ce n'est certainement pas en prenant une fois de plus les CHR comme bouc émissaire qu'on va résoudre les problèmes du secteur. Il n'y a jamais eu 1 milliard et demi de versé. Le coût des allégements dits Sarkozy sera au maximum de 950 millions d'euros. D'autre part, cet allégement, et contrairement à ce qui a été dit par Monsieur Larcher, venait en contrepartie de la suppression du Smic hôtelier. Je vous rappelle que ces allégements ne couvrent pas la totalité du coût que la mesure représente.
Nous sommes étonnés que le ministre délégué au Travail vienne demander la négociation d'une grille de salaires… Sachant que nous, Synhorcat, l'avons réclamée à maintes reprises, dans le cadre d'un autre type d'accord que celui du 13 juillet 2004. Comme nous l'avons dit à l'époque, il eut été plus intelligent de négocier une grille de salaires plutôt que d'accorder une 6e semaine de congés payés dont on ne sait toujours pas comment nous allons en assurer le financement. Ce n'est certainement pas en brandissant des menaces qu'on obtiendra de la profession qu'elle embauche. Il est clair que si le 1er janvier 2006 la profession n'obtient pas la baisse ou un allégement de charges, nos entreprises seront dans une situation dramatique. Nous avons toujours dit que l'accord du 13 juillet était un mauvais accord car il rendait les choses définitives face à des promesses. Cet accord repose sur un pari que nous n'avons jamais accepté, nous Synhorcat. Quand j'entends Gérard Larcher parler de compensation, je m'inquiète vraiment. Le jour où nous aurons la baisse de la TVA, si nous l'obtenons, que va-t-on nous demander ? On est au pied du mur, et on nous demande de faire de nouveaux efforts. On est dans le collimateur pour ça, pour le travail illégal, pour l'alcool… Or, le tourisme dont font
partie les CHR représente au minimum 600 000 emplois. En plus, on a tendance à faire croire aux consommateurs qu'on a touché une enveloppe et qu'on roule sur l'or, ce qui n'est pas vrai du tout.
"

André Daguin, Umih : "Faute lourde au ministère"
"Il est inadmissible qu'un ministre tienne de pareils propos. Ils jettent l'opprobre sur des professionnels et altèrent l'image du secteur. Ils sont indignes d'un ministre chargé de créer les conditions de modernisation de nos métiers. Les aides à l'emploi ont été consacrées à la suppression du Smic dans le secteur qui est supérieur de 5 % au Smic de droit commun. Un accord de branche a été signé en juillet 2004 qui modernise les conditions de travail et de rémunération. Une renégociation de la grille dans ce secteur commencera dès que la TVA sera à 5,5 %, ce qui ne tardera pas étant donné la conviction et les engagements du gouvernement et du président de la République sur ce sujet depuis des années. Le secteur est un gisement d'emplois considérable. Ce qui est une opportunité pour la France qui est mobilisée pour l'emploi."
Dès lundi, le président de l'Umih a pris la plume et adressé un courrier à tous ses présidents départementaux ainsi qu'à Monsieur Larcher. Il a exprimé son indignation. "Nous n'en resterons pas là, a-t-il précisé à ses troupes. Je demande audience au Premier ministre. Les parlementaires, l'UMP et son président, M. Nicolas Sarkozy, recevront un courrier de protestation marquant notre colère." Il ajoute : "Stigmatiser un secteur sur qui l'on compte pour créer des emplois, ce qui est vital pour nos métiers, mais aussi pour le pays, et également pour le gouvernement, est une véritable faute ministérielle lourde. Ces déclarations montrent à quel point le gouvernement est condamné à réussir en s'appuyant sur notre secteur. Les rapports de force ne sont pas en notre défaveur. LA TVA à 5,5 % devient de plus en plus le symbole de l'obligation qu'a le gouvernement d'obtenir des résultats économiques, sociaux et politiques." Dans le courrier adressé rue Saint-Dominique, André Daguin note qu'une "telle déclaration témoigne soit d'une totale méconnaissance du contexte social de la branche, soit d'une volonté délibérée de nuire à ce secteur". Il s'insurge contre le "discrédit" porté à la profession, et rappelle que "notre priorité est de créer des emplois en revalorisant les conditions de travail et l'attractivité de nos métiers".

Jean-François Girault, CPIH : "On a fait en moins d'une année plus d'efforts qu'en 30 ans"
"Ça me scandalise. Un ministre qui prend ses fonctions et qui se permet de faire cette annonce, c'est qu'il ne s'est pas vraiment penché sur les dossiers de l'hôtellerie. Je trouve scandaleux que l'on puisse se permettre des propos aussi peu reluisants pour la profession. Surtout qu'elle a fait en moins d'une année plus d'efforts qu'en 30 ans. Nous avons donné une 6e semaine, 2 jours fériés supplémentaires et l'abandon du Smic hôtelier pour 40 % de la profession. Je pense que nous avons suffisamment été pressurisés, pour ne pas pouvoir se permettre aucun écart de conduite concernant la grille des salaires. Sachant que cette grille est mise au goût du jour. Le Smic, pour nous, a augmenté de 11 % au 1er juillet 2004 et cette augmentation a été effectuée légalement. Les calculs ne sont plus en francs comme il a été dit, même si la grille reste en francs parce que sa traduction en euros doit obligatoirement faire l'objet d'une négociation. La signature du Smic a représenté une bouffée d'oxygène pour les salariés de l'ordre de 63 euros. Ce qui n'est pas négligeable. C'est vrai que les autres, ceux qui étaient au-dessus du Smic, n'ont pas eu forcément de rattrapage. À l'heure actuelle, l'aide accordée aux professionnels tourne autour de 800 millions d'euros, elle est loin d'atteindre le milliard et demi prévu et dont le montant est repris dans les médias grand public. Cette mesure a bien été prise dans l'attente de la TVA et non en compensation de la TVA.
On est sûr que les 114 euros accordés ont été redistribués dans le cadre de la signature à l'avenant de la convention collective. Dans cette opération, l'aide de l'État a été une opération blanche pour les patrons. Cette aide ayant été redistribuée en majorité aux gens qui étaient au Smic hôtelier. Ma colère est très forte. Ces propos montrent une méconnaissance totale du dossier. C'est vraiment la TVA et seulement la TVA qui permettra de revaloriser les salaires et relancer l'emploi dans la profession.
"

Jacques Jond, Fagiht : "Halte au dénigrement"
"Par ses récentes déclarations, le ministre délégué au Travail vient de condamner les chefs d'entreprise de l'industrie hôtelière qui, selon lui, n'auraient pas répercuté en création d'emplois et en augmentation de salaire les aides perçues de la part de l'État. Ces déclarations sont inadmissibles, provocatrices et constituent une désinformation de la population française. La réalité est tout autre. La restauration n'a pas à ce jour bénéficié de la réduction légitime du taux de TVA de 19,6 à 5,5 %. La promesse a pourtant été faite et renouvelée à tous les niveaux du gouvernement et de l'État depuis 3 ans. En attendant, des allégements provisoires ont été attribués, représentant pour la restauration environ le tiers de ce qu'aurait entraîné la réduction du taux de TVA.
Par ailleurs, les hôtels sans restaurant et les cafés sans restaurant ont été pratiquement exclus du système d'aides. Or, toutes les branches de notre secteur subissent depuis une année une augmentation du Smic, donc une augmentation des bas salaires, et ont offert une 6e semaine de congés payés et 2 jours fériés supplémentaires par an. Les chefs d'entreprise ne sauraient être disposés à poursuivre des efforts parfois financièrement insupportables pour leur exploitation en étant transformés en bouc émissaire face à des crises économiques et professionnelles qui ont d'autres causes. Ces accusations sont insupportables. Au fil des mois, nous n'avons jamais fait de pression ni de chantage dans le cadre d'élections quelles qu'elles soient. Nous ne mélangeons pas les genres. Nous sommes révoltés de la façon dont on induit l'opinion publique en erreur, qui croit même que nous avons déjà obtenu gain de cause. Cette désinformation au plus haut niveau est inadmissible. Alcoolisme, incendie, hygiène, tabagisme… À chaque fois, on se retourne contre l'industrie hôtelière qui reçoit du public. Personnellement, j'ai simplement envie de dire à ces Messieurs du gouvernement : que les engagements pris soient tenus et vous pourrez compter sur nous pour faire le maximum d'efforts et malgré les contraintes.
"
zzz76v

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L'Hôtellerie Restauration n° 2929 Hebdo 16 juin 2005 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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