Actualités

 
du 16 juin 2005
L'ÉVÉNEMENT

Sous-commission des salaires de la CNNC
Vendredi 10 juin 2005

Intervention de M. Gérard Larcher, Ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes

Mesdames et Messieurs les directeurs,
Mesdames et Messieurs,

Lors d’une précédente séance de la sous-commission des salaires de la Commission nationale de la négociation collective, le 18 mars dernier, je m’étais engagé à vous réunir de nouveau d’ici la première quinzaine de juin. C’est aujourd’hui chose faite.

Le 18 mars nous avions examiné, comme chaque année à pareille époque, l’évolution des salaires dans le secteur privé pour l’année écoulée. A cette occasion, et en réponse à vos interventions, j’avais indiqué combien il m’apparaissait indispensable que chacun – organisations professionnelles, syndicats, Etat- prenne ses responsabilités, dans les domaines qui sont les siens, pour faire vivre pleinement le dialogue social autour de sujets aussi essentiels pour l’équilibre des relations sociales dans les entreprises et pour la compétitivité de notre économie que sont les négociations sur les salaires et les classifications.

Dans cet esprit, sur la base des éléments de bilan que nous avons examinés ensemble, je vous avais alors proposé une méthode et des lignes d’action.

La méthode tout d’abord. J’avais demandé au directeur des relations du travail et à la directrice de la DARES de procéder, en lien avec la sous-commission, à une analyse approfondie pour connaître la situation des 70 principales branches en terme de salaires minima et de classifications.

Cette analyse a été effectuée. Monsieur le directeur des relations du travail va nous en rendre compte dans un instant. Et je tiens ici à remercier tout spécialement ses services pour l’importance du travail réalisé sur ce sujet dont je ne méconnais pas la complexité. Mes remerciements vont également à chacun d’entre vous pour votre implication qui, je le sais, a été forte, dans ce travail.

Je m’étais engagé à mettre en œuvre tous les moyens qui sont les miens pour que, là où c’était nécessaire, les négociations salariales puissent reprendre et aboutir. Car, je le rappelle, il est de la responsabilité du Gouvernement de veiller au bon déroulement des négociations, de jouer un rôle de facilitateur et de catalyseur et de veiller au respect du code du travail. D’ores et déjà, sur ce sujet, des premiers résultats significatifs ont été obtenus, même s’ils ne sont pas suffisants. J’y reviendrai.

Au-delà de la relance de la négociation sur les salaires et les classifications, j’avais pris l’engagement d’ouvrir parallèlement d’autres chantiers : celui de la relance de la participation, qui ne peut se confondre naturellement avec les salaires, et celui de la qualité des emplois au travers en particulier de la question du temps partiel subi, sujet sur lequel la directrice de la DARES pourra nous dresser un premier état des lieux, si vous le souhaitez.

A ce stade, je vais laisser le directeur des relations du travail vous rendre compte des travaux engagés depuis le 18 mars. Puis je reprendrai la parole pour vous indiquer quelles sont les premières conclusions que je tire du travail accompli depuis près de trois mois et tracer les perspectives dans lesquelles j’entends, avec Jean-Louis Borloo, poursuivre notre action sur ces chantiers, conformément aux orientations tracées par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale le 8 juin dernier.

*

* *

Du bilan que vient de nous présenter le directeur des relations du travail sur les 74 branches examinées depuis le 18 mars, je tire trois séries de conclusions.

1/ D’abord au regard des critères d’examen (existence d’accords récents ou de négociations régulières, conformité des minima au SMIC, actualisation ou refonte récente des grilles de classification), j’observe que la moitié des branches examinées (37 sur 74) sont dans une situation que je qualifierais de satisfaisante. Les minima et classifications sont conformes au code du travail. La négociation salariale y est effective et souvent productive, voire innovante. Et c’est pour le ministre en charge du travail que je suis un premier motif de satisfaction.

Dans ces branches, la vitalité du dialogue social en 2004 a été réelle. Ainsi, ce sont 399 avenants salariaux qui ont été conclus, soit le nombre le plus élevé depuis 1997, l’année 2001 mise à part. Cela confirme le diagnostic que j’avais formulé le 18 mars dernier : l’évolution des salaires dans le secteur marchand – et en miroir le nombre d’avenants salariaux- est largement lié à l’évolution de l’activité.

2/ Il existe malgré tout des situations de faiblesse ou de blocage des négociations. Les facteurs d’explication sont au nombre de 4 :

  • Dans certaines branches c’est la situation économique qui explique l’atonie de la négociation salariale. Je pense ici notamment au textile ou à l’habillement dont nous connaissons tous les difficultés.
  • D’autres branches se sont laissées rattraper par la hausse du SMIC ces deux dernières années, ce qui se traduit par un écrasement de la grille des salaires, mais ont malgré tout une vie conventionnelle active.
  • Dans certains cas, les blocages de la négociations tiennent davantage à la faiblesse de la structuration conventionnelle : le dialogue social, pour jouer à plein, exige des interlocuteurs disponibles et impliqués et des instances paritaires qui fonctionnent. Force est de reconnaître que ce n’est pas toujours le cas dans un paysage conventionnel marqué par un très fort éparpillement des branches.
  • Enfin, et c’est le plus préoccupant, les blocages s’expliquent aussi – et nous l’avons vu dans un certain nombre de branches- par l’incapacité ou l’insuffisante volonté des négociateurs, d’un côté ou de l’autre, à s’engager réellement dans la négociation et à trouver les voies d’un compromis au bénéfice de tous.

3/ A chaque fois qu’une situation de blocage a été identifiée, j’ai tenu à prendre mes responsabilités sans attendre. Sur les 28 branches concernées, j’ai soit mis en place des commissions mixtes paritaires, soit dans les branches déjà en CMP, donné aux présidents le mandat exprès de relancer les négociations et de convoquer rapidement des réunions de négociations. Dans tous ces branches, les salaires et les classifications ont donc été replacés au centre des négociations.

4/ Cette action volontaire a porté ses fruits : d’ores et déjà, 5 accords ont pu être conclus depuis le 18 avril et plusieurs autres devraient l’être dans les prochaines semaines ou, au plus tard, en septembre dans d’autres branches dans lesquelles la situation était pourtant bloquée depuis longtemps. C’est en particulier le cas – il faut le souligner- dans 2 des 5 branches dans lesquelles j’ai mis en place une CMP.

5/ Mais ces résultats positifs ne doivent pas masquer la persistance de réelles difficultés.

D’abord, la reprise du dialogue ne garantit pas forcément que celui-ci aboutisse, même si, sur ce point, la perspective de la conclusion d’accords dans des branches où les négociations n’avaient pas abouti depuis plusieurs années m’incite plutôt à l’optimisme.

Par ailleurs, dans quelques branches, le blocage perdure. Je pense notamment – et le directeur des relations du travail l’a déjà souligné- au secteur des hôtels-cafés-restaurants.

Ces éléments de constat m’amènent à insister une nouvelle fois sur l’importance que j’attache à une actualisation régulière des grilles de salaires et de classification.

De fait, une convention collective de branche ne peut jouer le rôle structurant qui doit être le sien que si elle jette les bases d’une politique de rémunération dynamique et encourage la revalorisation des métiers et des compétences au sein des entreprises. Cela passe par une actualisation régulière de la définition des métiers et des qualifications et un réexamen périodique des classifications.

Car, certains ont tendance à l’oublier, la politique de rémunération est pour chaque entreprise un instrument essentiel de mobilisation des salariés, donc un facteur de compétitivité et d’attractivité.

Il est de la responsabilité des branches de donner à toutes les entreprises du secteur, quelle que soit leur taille, des repères et un cadre pour leur politique de rémunération et de gestion des compétences. C’est la justification même de l’existence des branches.

Il n’est donc pas acceptable que soit laissée en jachère la négociation des minima et des classifications. Voilà pourquoi j’ai fait de la relance des négociations salariales une absolue priorité.

Mais, ne nous y trompons pas : la négociation salariale dans le secteur privé relève de la responsabilité des partenaires sociaux : ce n’est pas à l’Etat de décider du montant et de la structure des rémunérations dans les entreprises.

Ce qui relève de l’Etat, c’est la fixation du SMIC.

Sur ce point, le Gouvernement a pris toutes ses responsabilités : le SMIC a fortement augmenté ces deux dernières années, soutenant le pouvoir d’achat pour ces catégories de salariés, il augmentera encore, comme l’a indiqué mercredi le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, de plus de 5 % au 1er juillet afin d’achever la convergence des SMIC. C’est là le principal sujet que nous aurons à examiner lors de la prochaine réunion de la CNNC le 27 juin.

J’attends maintenant de l’ensemble des partenaires qu’ils fassent preuve du même esprit de responsabilité. Et je pense ici aux branches comme celle des hôtels-cafés-restaurants, dont les entreprises ont bénéficié d’une manière ou d’une autre d’un soutien exceptionnel de l’Etat pour conforter leur politique d’emploi ces derniers mois.

Il n’est pas acceptable que ces efforts soient préemptés par les entreprises sans contrepartie pour les salariés. Comment justifier que subsiste, dans les branches HCR, une grille libellée en francs ?

Pour ma part, je ne relâcherai pas la pression.

1/ Je demande à la DRT de poursuivre et d’achever le travail entrepris depuis le 18 mars : 74 branches ont été examinées, il en reste 200. Elle le seront d’ici la fin de l’année. Et je vous indique qu’en fonction des bilans ainsi établis, je continuerai à mettre en place des commissions mixtes à chaque fois que cela sera nécessaire pour renouer les fils de la négociation.

2/ De même, et cette fois-ci dans la durée, je vais pérenniser, au vu des premiers résultats obtenus, le dispositif d’alerte et de suivi mis en place après la réunion du 18 mars : chaque année, un groupe de travail ad hoc, en lien avec la sous-commission des salaires, examinera la situation des branches dans lesquelles les minima seraient inférieurs au SMIC ou dans lesquelles les négociations sur les salaires ou sur les classifications seraient durablement bloquées. Cet examen sera suivi des mêmes mesures que celles mises en place ces dernières semaines : suivi des négociations, convocation de réunions en commissions mixtes lorsqu’elles existent ou création de nouvelles commissions mixtes.

3/ S’agissant des négociations en cours, je tiens à souligner que le Premier ministre, dans son discours de politique générale, a très clairement indiqué le souhait du Gouvernement de voir les négociations sur les grilles salariales dans les branches aboutir avant la fin de l’année. Je tiens à réaffirmer ici la détermination du Gouvernement en la matière : je n’hésiterai pas à faire du respect des obligations de mise en conformité des grilles un critère d’examen des demandes d’extension, en particulier des accords salariaux.

4/ Enfin, je n’exclus pas de proposer au Premier ministre de conditionner à l’avenir les dispositifs d’aide publique au respect par les branches de leurs obligations.

*

* *

 

S’agissant enfin des deux autres chantiers ouverts le 18 mars dernier, je serai plus bref.

La réforme de la participation est d’ores et déjà engagée. Deux parlementaires ont été chargés par le Premier ministre de faire des propositions après avoir consulté l’ensemble des acteurs concernés. Leur rapport sera remis au mois de juillet. C’est au vu de ces propositions que le Gouvernement procédera à la nécessaire concertation et finalisera son projet d’ici l’automne.

 

Quant au temps partiel, la directrice de la DARES a dressé un premier état des lieux dans le dossier qui a été posé sur table. Il confirme la diversité des situations qu’il recouvre.

Le taux d’emploi à temps partiel reste, en moyenne, dans notre pays légèrement inférieur à la moyenne européenne. Il constitue souvent une organisation assumée et choisie. Il participe également à un parcours de transition vers l’emploi stable et à temps complet. Mais il reste aussi, dans 30 % des cas, un temps subi.

Conformément à mes engagements, j’ai engagé un dialogue avec les représentants des principaux secteurs concernés- et en premier chef la grande distribution et la propreté. Mon objectif est d’examiner comment améliorer la qualité des emplois proposés et leur rémunération, d’identifier les " bonnes pratiques " qui pourraient être mieux diffusées, de faire le point sur l’état du dialogue social en la matière.
D’ici la fin du mois, je réunirai les responsables des 5 ou 6 secteurs les plus concernés pour examiner avec eux les solutions envisageables.

*

* *

Voilà, Mesdames et Messieurs, les points que je souhaitais porter à votre connaissance cet après-midi

J’en appelle à l’esprit de responsabilité de chacun dans cette opération.
Les branches constituent depuis près d’un siècle l’ossature de notre système de négociation collective. Si elles veulent conserver ce rôle, il faut qu’elles assument pleinement leur devoir.


Vos questions et vos remarques : Rejoignez le Forum des Blogs des Experts

Rechercher un article

L'Hôtellerie Restauration n° 2929 Hebdo 16 juin 2005 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

L'Application du journal L'Hôtellerie Restauration
Articles les plus lus...
 1.
 2.
 3.
 4.
 5.
Le journal L'Hôtellerie Restauration

Le magazine L'Hôtellerie Restauration