du 2 février 2006 |
L'ÉVÉNEMENT |
LA BAISSE DE TVA RESTE LE BUT À ATTEINDRE
EN ATTENDANT, LA PROFESSION NÉGOCIE DES COMPENSATIONS
Dans le cadre des réunions proposées par Dominique de Villepin, Renaud Dutreil a reçu individuellement les principaux représentants de la profession afin qu'ils proposent des mesures en attendant la baisse de TVA.
Par Pascale Carbillet
La restauration a été
sacrifiée sans état d'âme sur l'autel de la négociation
européenne, afin de pouvoir maintenir le taux réduit de TVA notamment
pour les travaux de rénovation dans le bâtiment et services à
domicile. En effet, les 25 ministres des Finances européens devaient régler
le sort des secteurs d'activité qui bénéficiaient à titre
expérimental d'un taux réduit de TVA, et ce, jusqu'au 31 décembre
2005. Face au refus de certains États membres, dont le plus catégorique
est l'Allemagne, de rajouter aucun autre secteur d'activité dans cette liste,
telle que la restauration, il a été proposé de prolonger pendant
5 ans - soit jusqu'en 2010 - l'annexe K qui a permis à un certain nombre
de services à haute densité de main-d'oeuvre de réduire son taux
de TVA. Thierry Breton a demandé que la Commission européenne effectue
une étude sur les bienfaits d'une adaptation du taux réduit de la TVA
dans les secteurs à haute densité de main-d'oeuvre comme la restauration.
Étude qui doit être rendue vers le mois de juin 2007, pour, a-t-il
déclaré, permettre une prise de décision à la fin de la même
année. Malgré ces concessions, 3 pays parmi les nouveaux États
membres s'opposent à cette proposition : Chypre, la République tchèque
et la Pologne. Si les deux premiers acceptent quelques jours plus tard de donner
leur accord, la Pologne maintient sa position, bloquant du coup ce dossier qui doit
être adopté à l'unanimité.
Avant même toute confirmation officielle
du refus d'intégrer la restauration dans cette expérience, Dominique de
Villepin recevait, dès le mardi 24 janvier au soir, les principaux représentants
syndicaux de la profession afin de réfléchir aux autres dossiers de la
profession avec la participation de deux ministres, Renaud Dutreil, ministre des
PME, et Léon Bertrand, ministre délégué au Tourisme.
Dès la fin de la semaine, Renaud
Dutreil a reçu individuellement les présidents des syndicats de la profession.
L'Umih demande à bénéficier
réellement de l'enveloppe de 1,5 MdE
"Je dis bravo et merci
de la part de tous les restaurateurs, hôteliers et cafetiers que l'on a menés
en bateau depuis 3 ans. Alors après cette promenade en bateau qui a duré
3 ans, on leur promet maintenant une promenade en bateau d'un an de plus, déclare
André Daguin. Ce gouvernement nous a aidés plus que d'autres en effet.
Mais il nous a promis quelque chose et il n'a pas tenu sa promesse. Promesse qui
a été réitérée à plusieurs reprises par différents
ministres."
Mais ce n'est pas parce qu'il
n'a pas obtenu gain de cause que le président de l'Umih veut en réponse
pratiquer la politique de la chaise vide face au gouvernement. "Nous avons la
responsabilité de beaucoup de professionnels. En conséquence, nous ne
sommes pas là pour faire des crises de nerfs, mais pour trouver des solutions.
Nous étions vendredi après-midi chez Monsieur Dutreil et nous avons proposé
des solutions transitoires, car il ne faut pas oublier que le but, c'est la baisse
de TVA pour la restauration."
Lors de son rendez-vous avec Renaud
Dutreil, André Daguin a tenu à rétablir quelques contrevérités.
En effet, chacun se souvient de l'annonce faite par Jean-Pierre Raffarin à
l'Assemblée nationale d'accorder une enveloppe de 1,5 milliard d'euros à
la profession des CHR en attendant la baisse de TVA. Cette information a été
largement reprise et diffusée par la presse, faisant passer les restaurateurs
pour des nantis. Mais dans la réalité, les faits sont tout
autres. En effet, dans la loi de Finances pour
2005, le montant des crédits inscrits à ce titre n'a été que
de 550 millions d'euros, et de 370 millions pour la loi de Finances pour 2006, soit
une somme totale de 920 millions. "Où est le milliard et demi ?, s'interroge
André Daguin. En outre, je rappelle que ces sommes étaient uniquement
destinées à supprimer le Smic hôtelier. Mission accomplie, le
Smic hôtelier est supprimé. C'est-à-dire que chez nous, on gagne
entre 150 et 250 euros de plus que n'importe où ailleurs et souvent on est
nourri en plus." Et d'ajouter : "Mais on s'aperçoit que chaque fois
qu'on nous donne des aides, cela finit par nous être reproché par ceux-là
même qui nous les donnent. Je suis un peu fatigué d'entendre des ministres
qui disent que nous avons eu 1,5 milliard d'euros et qu'on a rien fait."
Le président de l'Umih tient à rappeler
que le secteur de l'hôtellerie-restauration est celui qui, après le bâtiment,
a le plus créé d'emplois depuis 2 ans et a le plus augmenté les salaires.
À l'appui de ses déclarations, il reprend les derniers chiffres publiés
dans la lettre de l'encadrement de l'ANPE, n° 148 d'avril 2005, qui font apparaître
une création de 10 000 emplois au cours du second semestre 2004. Quant à
la Dares (Direction de l'animation et de la recherche des études et des statistiques)
qui dépend du ministère de l'Emploi, elle a conclu dans un rapport que
le secteur de l'hôtellerie-restauration est celui qui a le plus augmenté
ses salaires pour la période 2004-2005 avec une augmentation de 16 %.
S'insurgeant aussi contre les propos
tenus par certains ministres, il tient à préciser que "nous n'allons
pas rester en dialogue si très vite ceux qui ont dit des contrevérités
ne les rectifient pas". Mais face à la principale contrevérité
de l'enveloppe d'un milliard d'euros, il propose que le gouvernement donne réellement
aux professionnels la valeur de cette enveloppe. "Le milliard et demi, puisque
le gouvernement en parle, il faut qu'il le donne. Il faut doubler la prime pour
les restaurateurs, et prévoir pour les hôteliers qu'elle aille au-delà
du Smic pour supprimer la trappe des salaires au niveau du Smic. Et là, on
bénéficiera effectivement de cette enveloppe." En attendant, mardi
7 février aura lieu le conseil d'administration extraordinaire de l'Umih qui
va décider de la mise en place des prochaines actions à tenir.
Le Synhorcat souhaite un plan
d'urgence social
Lundi après-midi, ce fut au tour
de Didier Chenet, président du Synhorcat, d'être reçu et entendu par le ministre
des PME. Lors de cette entrevue, le Synhorcat a exprimé à nouveau son inquiétude face à la non-obtention de cette réduction
de TVA, mettant en avant les répercussions économiques qui vont être
aggravées par l'application de l'accord du 13 juillet 2004. Accord qui accorde,
entre autres, 6 jours de congés payés supplémentaires, les jours
fériés, la mise en place d'un régime de prévoyance, et qui avait
été signé en prévision et en contrepartie d'une baisse de la
TVA non obtenue. Le Synhorcat a non seulement refusé de signer cet accord,
mais surtout il a introduit un recours devant le Conseil d'État afin d'en
demander son annulation. Le Synhorcat souhaite que soit mis en place un plan d'urgence
social qui prendrait en compte toutes les entreprises du secteur et notamment tout
le tissu des TPE qui a cruellement besoin d'un soutien économique pour
pouvoir rester en activité.
La CPIH propose plusieurs
pistes d'actions
"Il ne s'agit pas de
mesures de compensations au fait que nous n'ayons pas obtenu la TVA, car rien ne
peut remplacer la baisse de TVA en restauration, insiste Jean-François
Girault de la CPIH. Nous avons fait plusieurs propositions lors de notre entretien
avec Renaud Dutreil, et notamment au niveau des charges sociales et plus précisément
de l'enveloppe de 1,5 milliard qui est loin d'être consommée. Alors qu'on
nous la donne réellement, en répartissant la valeur réelle de cette
enveloppe." Autre sujet de préoccupation de la CPIH, les apprentis de plus de 18 ans qui sont un
coût pour l'entreprise : le salaire correspond à 700 E par mois pour
un apprenti en BEP, alors que la présence du jeune dans l'entreprise ne correspond
qu'à un mi-temps. Cette organisation patronale constate que de moins en moins
de chefs d'entreprise acceptent d'embaucher des apprentis, considérant qu'il
n'y a pas de retour sur investissement par rapport au temps passé à
former le jeune. Jean-François Girault a aussi évoqué le problème
des allégements de charges qui a des effets pervers dans la mesure où
ces allégements pénalisent le chef d'entreprise qui souhaite augmenter
ses salariés. Autre sujet largement abordé au ministère : le recours
aux extras et aux saisonniers qui ne permet pas aux entreprises de bénéficier
d'aide ni des nouveaux contrats. Il s'agit de pistes qui ont été évoquées
avec le ministre des PME, mais la CPIH doit tenir lundi 6 février une réunion
de tous ses présidents afin de mettre en place des propositions concrètes
qui puissent simplifier le quotidien des professionnels.
La Fagiht défend l'hôtellerie
indépendante et saisonnière
Jacques Jond, président
de la Fagiht, a été reçu dans l'après-midi du mardi 31 janvier
au ministère des PME. Même s'il a toujours été solidaire des
restaurateurs sur le dossier TVA, il a voulu surtout défendre la cause de l'hôtellerie
indépendante et saisonnière. Il tient à insister sur le fait que
l'hôtellerie saisonnière a toujours tendance à passer à
la trappe des différents dispositifs dont bénéficient les autres
entreprises. "Nous ne pouvons pas employer de contrat d'apprentissage, ni bénéficier
des avantages du contrat nouvelles embauches, car nous en sommes expressément
exclus. Tout comme nous serons exclus du prochain contrat première embauche
(CPE)." Il demande la suppression de l'aide forfaitaire à l'emploi dans
les CHR (dite prime Sarkozy) pour l'année 2007 afin qu'elle soit remplacée
par un abattement de charges au moins équivalent mais qui serait plus simple
d'application et plus généralisé pour les entreprises.
Le président de la Fagiht
va aussi défendre sa grille de salaires qui a été ratifiée par
les 5 syndicats de salariés, mais qui est fortement décriée par toutes
les autres organisations patronales, et demander qu'elle soit étendue afin
d'être appliquée par toutes les entreprises du secteur. Autres propositions
avancées par Jacques Jond : "Porter les prêts sur investissement dans
l'hôtellerie de 20 à 25 ans contre 15 ans actuellement, et bénéficier
de taux bonifiés à 2 % comme ils se pratiquent déjà en Autriche
et en Suisse, qui sont nos principaux concurrents. Nous voulons aussi une véritable
législation qui réglemente les tables et chambres d'hôte qui devraient
être soumises à une véritable imposition commerciale."
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L'Hôtellerie Restauration n° 2962 Hebdo 2 février 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE