du 6 avril 2006 |
JURIDIQUE |
LE CONTRAT ET LES CONDITIONS DE TRAVAIL
TRAVAILLEUR SAISONNIER : UN STATUT PARTICULIER
Les travailleurs saisonniers sont des salariés employés sous contrat à durée déterminée. S'ils bénéficient d'une majorité des règles applicables aux CDD, il n'en reste pas moins qu'en raison de la nature de leur emploi, ils obéissent à des règles bien particulières. Tour d'horizon.
Par Pascale Carbillet
Qu'est-ce
qu'un travailleur saisonnier ?
Le travailleur saisonnier est un salarié
employé dans les établissements saisonniers ou permanents pour effectuer
des tâches appelées à se répéter chaque année à
des dates à peu près fixes dans le cadre d'une saison touristique.
Autrement dit, le travailleur saisonnier
peut être embauché soit :
dans un établissement saisonnier,
c'est-à-dire dont l'ouverture ne dépasse pas 9 mois par an ;
soit dans un établissement
permanent, mais dont l'activité est plus importante du fait de la saison. Dans
ce cas, la durée du contrat saisonnier ne doit pas être supérieure
à 9 mois.
n
Le contrat de travail
Un contrat à durée
déterminée
Un saisonnier doit être
obligatoirement embauché en contrat à durée déterminée
(art. L.122.1.1 du Code du travail).
Il en découle plusieurs conséquences,
dont l'obligation de conclure un contrat par écrit. Contrat qui doit être
remis au plus tard dans les 2 jours qui suivent l'embauche.
Attention ! Faute d'un contrat écrit
signé de votre salarié, le contrat peut être requalifié en
contrat à durée indéterminée.
Un contrat écrit
L'employeur doit obligatoirement délivrer
au saisonnier un contrat de travail écrit. Sur le contrat doivent figurer obligatoirement
les mentions suivantes :
Le motif du contrat ;
La désignation de l'emploi
qui va être occupé ;
La date à laquelle le
contrat prend fin s'il s'agit d'un contrat de date à date ;
La durée minimale du contrat
si le contrat est sans terme précis ;
La durée de la période
d'essai ;
Le montant du salaire ;
Le nom et l'adresse de la caisse
de retraite complémentaire et de l'organisme de prévoyance ;
La convention collective applicable.
La durée du contrat
Il est possible d'embaucher un saisonnier
soit avec un contrat de date à date, soit sans terme précis.
Contrat sans terme précis
Le contrat est prévu pour toute
la durée de la saison. Cela correspond aux dates d'ouverture et de fermeture
de l'établissement. Il doit être prévu une durée minimale,
sans oublier de préciser la possibilité de prolonger le contrat si la
saison se poursuit.
Contrat de date à date
Le contrat est conclu pour une durée déterminée,
à l'intérieur de la saison (par exemple, 1 ou 2 mois simplement). Il
est possible de renouveler une fois ce contrat pour une durée déterminée.
Mais dans tous les cas, la durée
du contrat saisonnier ne peut être ni inférieure à 1 mois ni supérieure
à 9 mois.
Attention ! Un contrat saisonnier d'une
durée supérieure à 9 mois peut être requalifié en contrat
à durée indéterminée.
La période d'essai
Le contrat saisonnier peut prévoir
une période d'essai, mais n'est pas obligatoire. À l'inverse, pour que
le salarié soit en période d'essai, celle-ci doit être obligatoirement
prévue sur le contrat. Pendant l'essai, l'employeur et le salarié ont
la possibilité de rompre le contrat sans préavis ni motif ni indemnité.
La durée de la période d'essai
se calcule en fonction de la durée minimale prévue dans le contrat, mais
dans tous les cas, elle ne peut être supérieure à :
Un jour par semaine dans une
limite de 2 semaines si le contrat ne dépasse pas 6 mois.
Un mois pour un contrat de plus
de 6 mois.
Décompter la période d'essai
?
Si la période d'essai est fixée
en jours, elle se décompte en jours calendaires et non en jours travaillés
(Cass. soc. du 29 juin 2005).
Une période d'essai en semaines
se décompte en semaines civiles, et ce, quel que soit le nombre de jours travaillés
par le salarié. On ne peut pas déduire les jours de repos ni les jours
fériés.
En mois, elle se décompte en mois
calendaires. Un mois d'essai qui commence le 3 mai se terminera le 2 juin au soir.
Possibilité d'une clause de reconduction
La convention collective des CHR du 30 avril 1997
prévoit que le contrat saisonnier peut comporter une clause de reconduction.
Cette dernière prévoit la possibilité de réembaucher le salarié
pour la saison suivante. Toutefois, il faut que l'employeur ou le salarié confirment,
l'année suivante, leur volonté de renouveler le contrat au moins 2 mois
à l'avance par lettre recommandée. Sans cette confirmation dans les
délais, la clause de reconduction devient caduque.
Transformation du CDD en CDI après 3 saisons
La CCN des CHR prévoit que les
contrats saisonniers conclus pendant 3 années
consécutives, et qui couvrent toute la période d'ouverture de l'établissement,
pourront êtres considérés comme établissant une relation de
travail à durée indéterminée sur la base des périodes
effectives de travail.
Un salarié qui a travaillé en 2003,
2004, 2005, du 1er avril au 31 octobre, bénéficiera dès
cette année d'une relation à durée indéterminée pendant
les périodes d'ouverture de l'établissement. Ce qui lui permet de cumuler
des droits d'ancienneté, alors qu'avec des CDD successifs, le compteur est
remis à zéro chaque fois. Ce qui signifie également que l'employeur
ne peut plus se séparer de son salarié sans respecter la procédure
de licenciement, et par conséquent, sans justifier ce licenciement.
Impossibilité de rompre un contrat saisonnier
Comme tout contrat à durée déterminée,
le contrat saisonnier ne peut être rompu sauf pendant la période d'essai
(à condition qu'elle soit prévue au contrat). Ce qui implique aussi
que l'employeur ait remis en temps et en heure le contrat au salarié.
Une fois l'essai écoulé,
la loi n'autorise l'employeur ou le salarié à mettre fin au CDD que
dans des cas bien précis :
Accord entre l'employeur et
son salarié ;
Faute grave du salarié
;
Force majeure (incendie, cataclysme
naturel) ;
Salarié qui justifie d'une
embauche en CDI.
En dehors de ces hypothèses, la
rupture du contrat entraîne des sanctions pécuniaires.
Quelles sont-elles ?
Si c'est l'employeur qui met
fin au CDD, il peut être condamné à verser au salarié des
dommages-intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations
qu'il aurait perçues s'il avait travaillé jusqu'à la fin de son
contrat.
Si c'est le salarié qui
s'en va avant la fin de son contrat, il peut être, lui aussi, condamné
à verser à l'employeur des dommages-intérêts correspondant
au préjudice subi. Ce sont les juges qui évaluent le montant des dommages-intérêts. L'employeur ne peut faire
justice lui-même en ne payant pas à son salarié l'indemnité
de congés payés, par exemple.
n Les
conditions de travail
Les horaires de travail
Depuis le 1er janvier
2004, toutes les entreprises des CHR ont dû réduire leur temps de travail
à 39 heures par semaine, soit 169 heures par mois.
Sachez en outre que la durée du
temps de travail ne doit pas être supérieure aux durées maximales
suivantes, heures supplémentaires comprises :
Durée quotidienne maximale
Cuisiniers : 11 heures
Autres salariés : 11 h 30
Veilleurs de nuit : 12 heures
Personnel de réception : 12 heures
Durées maximales hebdomadaires absolues
52 heures pour tous, c'est-à-dire pour toutes les catégories de salariés.
Durées maximales hebdomadaires moyennes
sur 12 semaines
48 heures pour tous, c'est-à-dire pour
toutes les catégories de salariés.
Contingent d'heures supplémentaires
Le contingent d'heures supplémentaires applicable
est celui prévu par l'article 5 de l'avenant n° 1 du 13 juillet 2004,
fixé à 45 heures par trimestre civil pour les établissements saisonniers.
Ce contingent concerne le seuil de
déclenchement de l'autorisation de l'inspecteur du travail ainsi que le déclenchement
du repos compensateur obligatoire.
Le repos hebdomadaire
Les salariés saisonniers ont droit
à 2 jours de repos hebdomadaire. Mais ces 2 jours ne sont pas accordés
de façon forcément consécutive : ils peuvent être d'une journée
et de 2 demi-journées sachant que la convention collective permet de suspendre
tout ou partie de ce repos.
Possibilité de reporter le repos
hebdomadaire
En effet, l'article 23.2 de la convention collective
donne la possibilité à l'employeur de reporter les jours de repos de
ses travailleurs saisonniers. Il doit cependant respecter les règles suivantes
:
- Donner une journée de repos
par semaine, qui peut être suspendue 2 fois par mois au maximum, et dans la
limite de 3 fois pendant la saison ;
- Quant aux 2 demi-journées de
repos hebdomadaire, elles peuvent être différées et reportées
dans la limite de 4 jours par mois, par journée entière ou demi-journée.
Ce qui, dans un mois comportant 4 semaines, permet de reporter toutes les demi-journées
de repos. Tous les jours de repos suspendus devront être compensés par
journée entière au plus tard à la fin de la saison, et si cela
n'est pas possible, ils seront payés en fin de saison.
Donc, si l'on applique l'ensemble de
ces dispositions, l'employeur peut demander à son saisonnier de travailler
pendant 3 semaines d'affilée sans aucun repos hebdomadaire. En effet, si l'on
diffère dans 1 mois les 2 journées de repos plus les demi-journées,
cela fait 3 semaines consécutives de travail. Mais cela n'est possible qu'une
seule fois pendant la saison !
Attention ! En plus de cette compensation
en temps ou en argent, il peut y avoir paiement d'heures supplémentaires lorsque
le repos hebdomadaire n'est pas pris. En effet, quand le repos est différé,
le saisonnier effectue souvent des heures supplémentaires pendant sa semaine
de travail. Ces heures doivent être payées au salarié avec une majoration
de 15 % pour les 4 premières heures supplémentaires, 25 % pour les 4 suivantes
puis 50 % pour les autres. Mais il est possible de remplacer la rémunération
des heures supplémentaires par un repos compensateur équivalent.
10 heures de repos minimum entre
2 jours de travail
Pour l'ensemble du personnel, le temps
de repos entre 2 jours de travail doit être au minimum de 11 heures consécutives.
Cependant, ce temps peut être
réduit à 10 heures pour les saisonniers qui sont logés par leur
employeur, ou ceux dont le temps de trajet aller et retour entre leur résidence
et leur lieu de travail n'est pas supérieur à une demi-heure, c'est-à-dire
ceux qui habitent à 15 mn maximum de leur lieu de travail. En contrepartie
de cette réduction du temps de repos entre 2 jours de travail, le saisonnier
a droit à 20 mn de repos compensateur. Ce dernier peut être cumulé
pendant 1 mois, à l'issue duquel l'employeur devra lui rendre en temps ou
le payer.
Si l'employeur a utilisé cette
réduction au moins 3 fois dans la semaine, il ne pourra pas en plus utiliser
la possibilité de suspendre la totalité du repos hebdomadaire du salarié.
Les jours fériés
Le 1er mai est férié pour tous
les saisonniers.
Ceux qui chôment le 1er mai sont
quand même payés comme pour une journée de travail normale. Par
contre, ceux qui travaillent le 1er mai ont droit à une double
rémunération.
Un autre jour férié, en plus
du 1er mai, est accordé par la convention collective à certains
saisonniers et dans certaines conditions :
- Il faut que le saisonnier ait effectué
2 saisons consécutives, c'est-à-dire 2 saisons qui se suivent, chez
le même employeur. Par exemple, il doit avoir travaillé pour le même
établissement pendant la saison 2002 et la saison 2003. Dans ce cas, le jour
férié supplémentaire est donné selon les modalités suivantes
:
- Si la période d'ouverture de
l'établissement est inférieure à 4 mois (et pour le salarié
sous contrat saisonnier inférieur à 4 mois dans un établissement
permanent) : 1 jour férié en plus du 1er mai.
- Si la période d'ouverture est
comprise entre 4 et 9 mois (et pour le salarié sous contrat saisonnier de 4
à 9 mois dans un établissement permanent) : 2 jours fériés
supplémentaires.
Lorsque cet autre jour férié
n'est pas travaillé, le saisonnier doit être payé comme pour une
journée de travail normale.
Par contre, lorsque le saisonnier travaille
ce jour-là, il a droit à une journée de compensation.
n
Les
indemnités de fin de contrat
Les travailleurs saisonniers
ont droit, à la fin de leur contrat, à une indemnité compensatrice
de congés payés.
/font>
Depuis l'entrée en vigueur
de l'avenant n° 1 du 13 juillet 2004, l'article 11 de ce texte prévoit
l'octroi de 6 jours de congés payés supplémentaires, à raison
de 0,5 jour par mois de travail effectif. Le montant de cette indemnité est
désormais fixé à 12 % de la rémunération totale brute
perçue par le salarié.
En effet, lorsque la durée du
congé est différente de la durée normale, l'indemnité est calculée
proportionnellement à la durée des congés qui est effectivement
due (article L.223-11, alinéa 2 du Code du travail), y compris pour les salariés
dont le droit à congé est incomplet, c'est-à-dire les salariés
en contrat à durée déterminée.
Donc, pour un salarié des CHR
qui a droit à 36 jours ouvrables de congé (30 jours de congés payés
légaux plus 6 jours de congés conventionnels), l'indemnité est égale
au 1/10e de la rémunération totale multiplié par le rapport
36/30, ce qui donne 1/10e x 36/30 = 0,12, soit 12 %.
Par contre, ils ne perçoivent
pas l'indemnité de fin de contrat (10 % du salaire brut) comme les autres salariés
en contrat à durée déterminée.
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Modèle de contrat de travail saisonnier ENTRE : ET : IL A ÉTÉ CONVENU ET ARRÊTÉ CE QUI SUIT : Art.1 : La société ...... engage M. …… sous contrat à durée déterminée saisonnier.
Art.2 : Fonction Art.3 : Durée du contrat - Si le contrat est sans terme précis : Art.4 : Période d'essai Art.5 : Rémunérations Art.6 : Horaires de travail et jours de repos Art.7 : Heures supplémentaires Art.8 : Congés payés Art.9 : Caisse de retraite et prévoyance Art.10 : Règlement intérieur Art.11 : Convention collective Art.12 : Clause de reconduction (facultative) Fait en 2 exemplaires
(Signatures précédées de la mention manuscrite "Lu et approuvé") NB : Il s'agit d'un modèle de contrat type. Vous pouvez
toujours ajouter des clauses supplémentaires. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2971 Hebdo 6 avril 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE