du 11 mai 2006 |
JURIDIQUE |
ÊTES-VOUS BIEN ASSURÉ ENVERS VOS CLIENTS
La responsabilité des hôteliers et restaurateurs
Les hôteliers et les restaurateurs sont soumis à un régime spécifique de responsabilité envers leurs clientèles. Pour permettre aux professionnels de mieux apprécier leurs besoins en assurance, nous faisons le point sur le régime applicable à leur profession.
n
La
responsabilité du restaurateur
La responsabilité du
restaurateur peut être engagée sur la base des articles 1927 et 1928
du Code civil relatifs au dépôt volontaire. Elle repose sur l'idée
que toute personne qui se voit confier un bien doit apporter dans la garde de ce
bien les mêmes soins qu'elle apporte à la garde des choses qui lui
appartiennent. Cette obligation de diligence et de surveillance sera appréciée
plus sévèrement si le restaurateur a pris en charge les vêtements
ou autres effets.
1. Vestiaire gardé avec délivrance d'une
contremarque
La responsabilité du restaurateur est automatique
en cas de non-restitution des effets au client, si ce dernier est en mesure de produire
la contremarque qui lui a été délivrée en échange de la
remise de son vêtement. Elle est illimitée, c'est-à-dire que le
restaurateur (ou son assureur) doit indemniser la valeur réelle des effets
qu'il est incapable de restituer.
2. Vestiaire non gardé
Le client doit prouver la faute du
restaurateur, mais celle-ci est facilement retenue par les tribunaux dans les circonstances
suivantes :
- Lorsque le client ne peut apercevoir
de sa table le perroquet sur lequel ses affaires sont accrochées, ce qui l'empêche
de les surveiller.
- Lorsque le vestiaire est situé
trop près d'une sortie ou dans le local des toilettes, ce qui facilite le vol
des effets.
- Lorsque le restaurateur ou son personnel
a pris d'office les vêtements du client (mais en pratique, le client aura
beaucoup de mal à le prouver).
- Lorsque le restaurateur n'a pas affiché
de clause déniant toute responsabilité. Mais pour être valable,
une telle clause doit être affichée de façon très apparente
à proximité du vestiaire et doit être rappelée en caractères
gras sur les cartes et menus.
3. Véhicule du client garé sur le parking
du restaurant
Les tribunaux reconnaissent facilement la responsabilité
du restaurateur, si celui-ci n'a pas affiché à l'entrée du parking
une clause de non-responsabilité.
4. Véhicule confié au
voiturier
Le client doit prouver la faute du
voiturier. Par exemple, si le voiturier s'est fait dérober les clés du
véhicule, n'a pas branché l'alarme ou ne l'a pas fermé à clé
(ce qui ne pourra être établi qu'une fois le véhicule retrouvé
!).
n
La responsabilité présumée de l'hôtelier
À l'origine, les
rédacteurs de cet article du Code civil ont certainement voulu protéger
le voyageur en lui évitant de décharger l'ensemble de ses bagages pour
un séjour bref. C'est la raison pour laquelle les articles 1953 et 1954 du
Code civil mettent en effet à la charge des hôteliers une présomption
de responsabilité en cas de vols ou de dommages causés aux effets de la
clientèle.
À la différence
du droit commun, le client n'a pas à démontrer la faute de l'hôtelier
pour être indemnisé :
À concurrence de cent
fois le prix de la chambre pour les vols survenus à l'intérieur de celle-ci.
À concurrence de cinquante
fois le prix de la chambre pour les vols commis dans le parking de l'établissement.
Sans limitation pour les vols affectant
les effets remis à la réception.
Ce régime de responsabilité assez rigoureux
ne peut faire l'objet de dérogations, et l'hôtelier ne peut s'en exonérer
en affichant un panneau déniant par avance toute responsabilité. Dérogatoire
au régime général de la responsabilité, cette présomption
de responsabilité ne s'applique qu'aux établissements hôteliers
proprement dits (le Code civil parle des hôteliers et aubergistes).
1. Vol des objets de la clientèle
dans la chambre
(ou toute partie de l'hôtel en
dehors de la réception ou du parking)
a. La responsabilité de l'hôtelier
est retenue à concurrence de cent fois le prix de la chambre :
Il suffit que le client se fasse voler
ses affaires pour que l'hôtelier voit sa responsabilité engagée.
Cette responsabilité est automatique même en l'absence de toute faute
de l'hôtelier. C'est pour cette raison qu'elle est limitée.
b. La responsabilité de l'hôtelier
est illimitée :
Si le client peut démontrer la
faute de l'établissement (par exemple, la clé a été volée
à la réception ou la femme de ménage a laissé la chambre ouverte
sans surveillance…).
c. L'hôtelier n'est pas responsable
:
En cas de faute du client :
L'hôtelier peut s'exonérer
de toute responsabilité s'il démontre la faute du client (par exemple,
le client qui oublie de fermer sa porte ou sa fenêtre). Mais ne constitue
pas une faute du client le fait qu'il ait refusé d'utiliser le coffre de la
chambre ou de la réception.
En cas de force majeure :
Mais la force majeure est très
difficile à retenir : en effet, un vol commis avec agression ne constitue
pas un cas de force majeure.
2. Vol des objets des clients sur
les parkings
La responsabilité de l'hôtelier
peut être engagée pour tous les véhicules (et les affaires de ses
clients) qui sont stationnés sur un parking mis à la disposition de
la clientèle, peu importe que l'hôtelier en soit propriétaire ou
non.
a. La responsabilité est retenue
à concurrence de cinquante fois le prix de la chambre :
Le client n'a pas besoin de montrer
la faute de l'hôtelier, le vol est une condition suffisante pour faire jouer
cette responsabilité limitée.
b. La responsabilité de l'hôtelier
est illimitée :
Si le client démontre la faute
de l'hôtelier. Va constituer une faute, par exemple, l'oubli de fermer le
parking la nuit, alors que c'était prévu, ou en raison d'un vol commis
en l'absence du gardien alors que l'hôtelier annonce que son parking est gardé.
c. L'hôtelier n'est pas responsable
:
S'il prouve que son client a commis
une faute (par exemple, en ne fermant pas à clé son véhicule, ou
bien en y laissant les clés sur le tableau de bord). Mais attention ! Le fait
que le client laisse dans son véhicule fermé des objets tels qu'un appareil
photographique ou un ordinateur ne constitue pas une faute qui empêche l'indemnisation
du client s'il prouve qu'il y a eu un cas de force majeure. C'est le cas d'une inondation
résultant d'une catastrophe naturelle ; mais ce n'est pas le cas d'un acte
de vandalisme.
3. Vol des effets de la clientèle confiés
entre les mains de l'hôtelier ou de ses préposés
L'hôtelier est responsable de façon
illimitée dans tous les cas de figure et ce, même si l'hôtelier
:
A fait l'objet d'une agression
;
A refusé le dépôt
à partir du moment où son refus n'était pas légitime. L'absence
de coffre n'est pas un refus légitime. Ce refus ne peut être justifié
que si l'objet à déposer est un animal vivant, un objet trop encombrant
ou d'une valeur excessive par rapport au standing de l'établissement.
Le client doit porter plainte
Dans tous les cas de figure, le client
ne peut être indemnisé par l'hôtelier ou le restaurateur ou leur
assureur qu'à la condition de :
Déposer plainte auprès
des autorités de police.
Fournir les preuves de l'existence
et de la valeur des objets dérobés (facture, retrait bancaire récent…).
Ne pas avoir commis de faute.
Notre conseil
Vérifiez auprès de votre
assureur que votre garantie responsabilité civile inclut bien celle de dépositaire,
sans qu'elle soit limitée aux vestiaires avec contremarque pour les restaurateurs
ou aux objets mis au coffre pour les hôteliers.
Vérifiez que le montant est
suffisant, selon le standing de l'établissement. Prévenez aussi votre
assureur de l'existence des garages ou de mise à disposition de parking pour
votre clientèle.
Benoît
Florin (docteur en droit) zzz66a
Article
1952 du Code civil "Les aubergistes ou hôteliers répondent, comme dépositaires, des vêtements, bagages et objets divers apportés dans leur établissement par le voyageur qui loge chez eux ; le dépôt de ces sortes d'effets doit être regardé comme un dépôt nécessaire."
Article 1953 du Code civil Article 1954 |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2976 Hebdo 11 mai 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE