du 21 septembre 2006 |
GÉRER SON ENTREPRISE |
ORDONNÉS PAR L'ADMINISTRATION ET VOTÉS PAR LA COPROPRIÉTÉ
QUI DOIT SUPPORTER DES TRAVAUX DE RAVALEMENT ?
Vous allez reprendre un fonds de commerce et le contrat de bail qui y est attaché, ou vous êtes propriétaire de murs, et vous vous apprêtez à louer votre immeuble ? Une analyse particulièrement attentive des clauses du contrat de bail à l'avance peut vous éviter des mauvaises surprises. Illustration à partir d'une affaire récemment jugée par le Tribunal de grande instance de Paris à propos de travaux de ravalement.
Par Tiphaine Beausseron
L'histoire
Une société exploite
un fonds de commerce d'un hôtel 2 étoiles sans restauration dans une
partie d'un immeuble parisien. Il loue les locaux à Monsieur X en vertu d'un
contrat de bail qui doit se terminer en 2012. L'immeuble comprend d'autres lots
qui appartiennent à plusieurs autres copropriétaires.
Un jour, la mairie ordonne (par
voie d'injonction) aux copropriétaires de procéder au ravalement de la
façade de la cour de l'immeuble. Peu de temps après, en application
de cette décision administrative, l'assemblée générale vote
les travaux de ravalement et fixe le montant des sommes dues pour chaque lot. Le
propriétaire des murs de l'hôtel informe alors son locataire de celle-ci
(plus de 130 000 E) et lui précise qu'il lui en réclamera le paiement
en 3 fois en plus du loyer habituel. L'hôtelier estimant que ce n'est pas
à lui de payer ces travaux, assigne son propriétaire devant le tribunal.
La
difficulté d'interprétation
Le tribunal rappelle qu'en
vertu de l'article 1719 du Code civil, les travaux ordonnés par l'administration
pour l'entretien de l'immeuble sont à la charge du propriétaire sauf
si le bail contient une clause expresse contraire concernant ces travaux.
Le tribunal examine donc le
bail, et dans l'article relatif aux travaux, il remarque deux clauses intéressantes
:
L'article 4a prévoit
que "le preneur supportera la charge de toutes réparations et de tous
travaux, ravalement, traitement, désamiantage, traitement du plomb, des termites,
etc., y compris ceux définis par l'article 606 du Code civil".
L'article 4d stipule que
"le preneur fera à ses frais, risques et périls, tous travaux qui
seraient exigés par l'autorité administrative pour l'exercice de son activité".
Au premier abord, on peut déduire
que ces deux clauses cumulées mettent effectivement à la charge de l'hôtelier
(le preneur) les travaux de ravalement ordonnés par l'administration. C'est
certainement l'interprétation qu'en a eu le propriétaire bailleur quand
il a envoyé à l'hôtelier la facture correspondante.
Notre conseil Que vous soyez propriétaire de murs sur le point de conclure un bail commercial, créateur ou repreneur d'un fonds de commerce de CHR, ne négligez pas les conseils de spécialistes en baux commerciaux ou en transmission d'entreprise (avocat, expert en évaluation de fonds de commerce de CHR…). Même si cela peut vous sembler coûteux et inutile au premier abord, il s'agit pourtant d'un investissement qui peut vous prémunir contre de bien mauvaises surprises. |
Le
dénouement
Et pourtant, ce n'est pas
ce qu'a retenu le tribunal dans un jugement du 1er décembre 2005*.
Selon lui, pour que les travaux de ravalement ordonnés par l'administration
soient à la charge
du locataire exploitant le fonds de commerce, il faut une clause qui précise
expressément que "les travaux de ravalement ordonnés par l'administration"
sont supportés par ce dernier (comme l'exige l'art.1719 du Code civil).
Or, l'article 4a du contrat de bail ne fait aucunement référence à
des travaux qui seraient ordonnés par l'administration. Le bailleur ne peut
donc pas s'appuyer sur cet article pour facturer le coût du ravalement à
l'hôtelier.
Tout en soulignant que ces deux clauses sont distinctes
l'une de l'autre, le tribunal examine alors l'article 4d. Il remarque alors que
les seuls travaux ordonnés par l'administration mis à la charge du locataire
sont ceux ordonnés par l'administration "pour l'exercice de son activité".
La mairie ayant ordonné les travaux de ravalement pour un autre motif que l'exercice
de l'activité commerciale d'hôtel, le tribunal conclut qu'ils ne peuvent
pas être à la charge du locataire exploitant le fonds.
Le bailleur a donc été condamné
à supporter le coût des travaux, et le locataire n'a pas été
tenu de les payer.
zzz61 zzz62 zzz66 FC0607
* Tribunal de grande instance de Paris du 1er décembre 2005, 18e chambre, 2e section.
L'avis
de l'avocat Trois questions à maître Marc Gaillard, avocat au barreau de Paris Auteur du sujet interactif 'Le bail commercial en CHR' consultable sur www.lhotellerie.fr Ce jugement est-il conforme à la jurisprudence en vigueur
? Quelles leçons doivent en tirer les propriétaires
de murs ? Dans cette affaire, la solution a été favorable au
locataire exploitant le fonds de commerce. Dans quel cas aurait-il pu se voir
condamné à supporter la charge de tels travaux ? |
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Marc Gaillard, avocat au barreau de Paris,
est l'auteur du sujet interactif 'Le bail commercial en CHR', consultable
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L'Hôtellerie Restauration n° 2995 Hebdo 21 septembre 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE