du 21 décembre 2006 |
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Circulaire n° 6 DRT du 18 avril 2002
La circulaire n° 6 DRT du 18 avril 2002 prise
pour l’application du décret n° 2001-1016 portant création d’un document relatif
à l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, prévue
par l’article L. 230-2 du Code du travail et modifiant le Code du travail.
• Mesdames et messieurs les préfets de région,
• Madame et messieurs les directeurs régionaux du travail, de l’emploi et de la
formation professionnelle,
• Mesdames et messieurs les préfets de département,
• Mesdames et messieurs les directeurs départementaux du travail, de l’emploi et
de la formation professionnelle,
• Mesdames et messieurs les inspecteurs et contrôleurs du travail,
l’évaluation a priori des risques constitue un des principaux leviers de progrès
de la démarche de prévention des risques professionnels au sein de l’entreprise.
Elle constitue un moyen essentiel de préserver la santé et la sécurité des
travailleurs, sous la forme d’un diagnostic en amont - systématique et exhaustif
- des facteurs de risques auxquels ils peuvent être exposés. L’apport des
connaissances scientifiques et l’évolution des conditions de travail ont mis en
évidence de nouveaux risques professionnels (amiante, risques à effet différé
liés aux substances dangereuses, troubles-musculo-squelettiques, risques
psychosociaux…), qui soulignent la nécessité de renforcer l’analyse préventive
des risques.
Dans cette perspective, en reposant sur une approche globale et
pluridisciplinaire - à la fois technique, médicale et organisationnelle -, la
démarche d’évaluation doit permettre de comprendre et de traiter l’ensemble des
risques professionnels. Introduite pour la première fois en droit français du
travail, en 1991, l’évaluation des risques connaît une nouvelle avancée, avec la
parution du décret du 5 novembre 2001 portant création d’un document relatif à
l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs. Ainsi,
les acteurs de la prévention disposent désormais d’une base tangible pour la
définition de stratégies d’action dans chaque entreprise.
La présente circulaire vise à fournir à l’ensemble des services des éléments de
droit et de méthode utiles pour promouvoir cet outil et en faciliter la
compréhension par les acteurs externes. Ce dispositif crée, en effet, un
instrument juridique contraignant dont la mise en œuvre demeure néanmoins
souple, puisque les modalités techniques de l’évaluation des risques ne sont pas
précisées par le décret. Elle s’appuie sur les enseignements tirés des
expériences en entreprise impulsées par les services déconcentrés du ministère,
depuis 1995, afin de permettre à l’inspection du travail de remplir ses missions
d’information, de sensibilisation et de contrôle.
L’obligation de transcrire dans un document les résultats de l’évaluation des
risques n’est pas qu’une obligation matérielle. Elle représente la première
étape de la démarche générale de prévention qui incombe à l’employeur. Mais
cette formalisation doit aussi contribuer au dialogue social au sein de
l’entreprise, sur l’évaluation elle même, et au-delà sur la conception et la
réalisation des mesures de prévention qui devront, en tant que de besoin, faire
suite à l’évaluation des risques.
1. Points de repère : la directive - cadre
et sa transposition en droit français
1.1. La directive
La directive n°89/391/CEE du Conseil des Communautés Européennes du 12 juin
1989, dite directive - cadre, définit les principes fondamentaux de la
protection des travailleurs. Elle a placé l’évaluation des risques
professionnels au sommet de la hiérarchie des principes généraux de prévention,
dès lors que les risques n’ont pas pu être évités à la source. Alors que la
plupart des dispositions de la directive - cadre préexistaient en droit
français, la démarche d’évaluation a priori des risques, qui doit contribuer
fortement à l’amélioration globale de la santé et de la sécurité et des
conditions de travail, constitue la principale novation de ce texte
communautaire, au regard de l’approche française classique. L’évaluation en
amont des risques vise à connaître, de manière exhaustive et précise, les
risques à traiter auxquels les travailleurs peuvent être exposés. Elle s’attache
à tenir compte de l’évolution des techniques, avec le souci d’assurer la mise en
œuvre du principe fondamental d’une adaptation du travail à l’homme.
1.2. La loi du 31 décembre 1991
Dès 1991, la loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991 a permis de transposer, pour
l’essentiel, les dispositions que la directive cadre ajoutait au droit français.
S’agissant de l’évaluation des risques, c’est l’article L. 230-2 du Code du
travail qui traduit le droit communautaire (article 6 de la directive - cadre),
au regard de 3 exigences d’ordre général :
• Obligation pour l’employeur d’assurer la santé et la sécurité des travailleurs
(I de l’article L. 230-2) ;
• Mise en œuvre des principes généraux de prévention des risques professionnels
(II de l’article L. 230-2) ;
• Obligation de procéder à l’évaluation des risques (III de l’article L 230-2).
À ce titre, il convient de noter les arrêts de la Cour de cassation du 28
février 2002 relatifs à l’amiante, qui imposent à l’employeur une obligation de
résultat devant le conduire à une grande vigilance. Ainsi, l’évaluation des
risques constitue une obligation à la charge de l’employeur, s’inscrivant dans
le cadre des principes généraux de prévention, afin d’engager des actions de
prévention des risques professionnels. Cette obligation générale a été déclinée
par des prescriptions législatives et réglementaires spécifiques prises, depuis
1989, en matière d’évaluation des risques (voir annexe 1). Elles correspondent,
soit à un type de danger, d’agents ou produits dangereux (amiante, bruit, risque
biologique, chimique, cancérogène…), soit à un type d’activité (manutention des
charges, bâtiment - travaux publics, coactivité…).
Le présent décret vient, quant à lui, concrétiser le dispositif général mis en
place en 1991, en complétant la transposition de la directive-cadre sous un
angle juridique. D’une part, conformément à l’article 9 paragraphe 1 alinéa a)
de la directive susvisée, il répond à l’obligation pour l’employeur de conserver
les résultats de l’évaluation des risques qu’il a effectuée, en liaison avec les
acteurs internes et externes à l’entreprise. D’autre part, il définit les
modalités de mise à disposition du document transcrivant les résultats de
l’évaluation des risques, aux acteurs externes et internes à l’entreprise, parmi
lesquels figurent les instances représentatives du personnel (article 10
paragraphe 3 alinéa a) de la directive.
Éléments juridiques du décret
Ce décret introduit 2 dispositions réglementaires dans le Code du travail.
La première - article R. 230-1 - précise le contenu de l’obligation pour
l’employeur de créer et conserver un document transcrivant les résultats de
l’évaluation des risques à laquelle il a procédé. À cette occasion, un chapitre
préliminaire, intitulé Principes de prévention, est inséré dans la partie
réglementaire du titre III du livre II du Code du travail.
La seconde disposition réglementaire est de grande portée puisqu’elle introduit
un nouvel article R. 263-1-1, qui porte sur le dispositif de sanctions pénales
prévu en cas de non-respect par l’employeur des différentes obligations, auquel
celui-ci est dorénavant soumis en matière d’évaluation des risques.
2.1. Forme et contenu du document unique
(article R. 230-1, 1er alinéa)
Dans son 1er alinéa, l’article R. 230-1 du Code du travail définit les modalités
de la transcription des résultats de l’évaluation des risques, tant sur sa forme
que sur son contenu.
2.1.1. La forme du document unique
Les résultats de l’évaluation des risques devront être transcrits sur un
document unique, cela dans le souci de répondre à 3 exigences :
• De cohérence, en regroupant, sur un seul support, les données issues de
l’analyse des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs;
• De commodité, afin de réunir sur un même document les résultats des
différentes analyses des risques réalisées sous la responsabilité de
l’employeur, facilitant ainsi le suivi de la démarche de prévention des risques
en entreprise ;
• De traçabilité, la notion de transcription signifiant qu’un report
systématique des résultats de l’évaluation des risques doit être effectué, afin
que l’ensemble des éléments analysés figure sur un support. Celui-ci pourra être
écrit ou numérique, laissant à l’employeur le soin de choisir le moyen le plus
pratique de matérialiser les résultats de l’évaluation des risques. Dans tous
les cas, l’existence de ce support traduit un souci de transparence et de
fiabilité, de nature à garantir l’authenticité de l’évaluation. Pour tout
support comportant des informations nominatives, l’employeur devra, conformément
à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et
aux libertés, procéder à une déclaration auprès de la Commission nationale de
l’informatique et des libertés.
2.1.2. Le contenu du document unique
En application des dispositions législatives du Code du travail (a) du III
de l’article L.
230-2), l’employeur doit :
“Évaluer les risques pour la sécurité et la santé des travailleurs, y
compris dans le choix des procédés de fabrication, des équipements de travail,
des substances ou préparations chimiques, dans l’aménagement ou le réaménagement
des lieux de travail ou des installations et dans la définition des postes de
travail.”
Le 1er alinéa de l’article R. 230-1 indique que cette opération consiste pour
l’employeur à transcrire les résultats de l’évaluation des risques sur un
document unique qui comporte un inventaire des risques dans chaque unité de
travail de l’entreprise ou de l’établissement. Il convient d’y apporter 2
précisions. Premièrement, la notion d’inventaire conduit à définir l’évaluation
des risques en 2 étapes :
1. Identifier les dangers : le danger est la propriété ou capacité
intrinsèque d’un équipement, d’une substance, d’une méthode de travail, de
causer un dommage pour la santé des travailleurs ;
2. Analyser les risques : c’est le résultat de l’étude des conditions
d’exposition des travailleurs à ces dangers. Il convient de préciser que la
combinaison de facteurs liés à l’organisation du travail dans l’entreprise est
susceptible de porter atteinte à la santé et à la sécurité des travailleurs,
bien qu’ils ne puissent être nécessairement identifiés comme étant des dangers.
À titre d’exemple, l’association du rythme et de la durée du travail peut
constituer un risque psychosocial - comme notamment le stress - pour le
travailleur.
Ainsi, l’évaluation des risques se définit comme le fait d’appréhender les
risques créés pour la santé et la sécurité des travailleurs, dans tous les
aspects liés au travail.
Par conséquent, elle ne se réduit pas à un relevé brut de données mais constitue
un véritable travail d’analyse des modalités d’exposition des salariés à des
dangers ou à des facteurs des risques
Deuxièmement, la notion d’unité de travail doit être comprise au sens large,
afin de recouvrir les situations très diverses d’organisation du travail. Son
champ peut s’étendre d’un poste de travail, à plusieurs types de postes occupés
par les travailleurs ou à des situations de travail, présentant les mêmes
caractéristiques. De même, d’un point de vue géographique, l’unité de travail ne
se limite pas forcément à une activité fixe, mais peut aussi bien couvrir des
lieux différents (manutention, chantiers, transports, etc.). Le travail
d’évaluation mené par l’employeur est facilité, en ce que les regroupements
opérés permettent de circonscrire son évaluation des risques professionnels.
Néanmoins, ces regroupements ne doivent pas occulter les particularités de
certaines expositions individuelles.
Ainsi, les documents établis par le médecin du travail - la fiche d’entreprise
-, par le CHSCT - l’analyse des risques -, par les fabricants de produits - les
fiches de données de sécurité -, par exemple, ne constituent pas en tant que
tels l’évaluation des risques. Ils sont néanmoins des sources d’informations
utiles à l’analyse des risques réalisée par l’employeur (voir annexe 2).
2.2. Mise à jour du document
Conformément à la nécessité d’inscrire l’évaluation des risques dans une
démarche dynamique et donc, évolutive, le décret prévoit (article R. 230-1,
second alinéa) 3 modalités d’actualisation du document unique, prenant en compte
les éventuelles modifications de la situation du travail dans l’entreprise.
• Le décret assure une garantie de suivi du document, dans la mesure où ce
dernier doit faire l’objet d’une mise à jour au moins annuelle.
• Le document doit être actualisé lorsque toute décision d’aménagement important
modifiant les conditions d’hygiène et de sécurité ou les conditions de travail
est prise, au sens du 7e alinéa de l’article L. 236-2. Ce dernier prévoit la
consultation préalable du CHSCT lorsqu’une telle décision est prise, désignant
notamment “toute transformation importante des postes de travail découlant de la
modification de l’outillage, d’un changement de produit ou de l’organisation du
travail (et) toute modification des cadences et des normes de productivité liées
ou non à la rémunération du travail.”
?• Le décret prévoit la mise à jour du document unique, “lorsqu’une
information supplémentaire concernant l’évaluation d’un risque dans une unité de
travail est recueillie”. Cette disposition, sur laquelle il convient d’insister,
permet de tenir compte de l’apparition de risques dont l’existence peut,
notamment, être établie par les connaissances scientifiques et techniques (ex. :
troubles musculo-squelettiques, risques biologiques, risques chimiques, etc.),
par la survenue d’accidents du travail, de maladies à caractère professionnel,
ou par l’évolution des règles relatives à la santé, à la sécurité et aux
conditions de travail (risques psychosociaux).
2.3. Accessibilité du document
Aux 4e et 5e alinéas de l’article R. 230-1, le décret indique que le
document ainsi créé et mis à jour par l’employeur doit être tenu à la
disposition d’une série d’acteurs qu’il convient de classer en 2 catégories.
2.3.1. Les acteurs internes à l’entreprise
Conformément au 4e alinéa de l’article R.230-1, le document unique relatif à
l’évaluation des risques est mis à la disposition :
• Des instances représentatives du personnel ;
• Des personnes soumises à un risque pour leur sécurité ou leur santé (à défaut
d’instances représentatives du personnel) ;
• ?Du médecin du travail.
Cela signifie que l’employeur doit veiller à ce que ces personnes puissent
accéder directement aux résultats de l’évaluation des risques, après les avoir,
le cas échéant, informées des moyens de le faire. Ainsi, l’employeur pourra
aussi bien assurer la consultation de ce document par voie numérique que sous la
forme d’un support papier.
• ?Parmi ces acteurs, figurent, en premier lieu, les instances représentatives
du personnel (CHSCT, ou instances qui en tiennent lieu, tels que les instances
représentatives du personnel des établissements publics, et délégués du
personnel). Le document unique constitue une des sources d’information
permettant à ces instances d’exercer leurs prérogatives. Il est ainsi rappelé
que le CHSCT - et les délégués du personnel - procèdent à l’analyse des risques
professionnels, comme le prévoit l’article L. 236-2. Ainsi, la mise à
disposition du document d’évaluation des risques s’inscrit bien dans l’exercice
par les instances représentatives du personnel de leur droit d’obtenir de
l’employeur les informations nécessaires pour l’exercice de leurs missions, en
application de l’article L. 236-3, alinéa 1.
• ?Le décret prévoit aussi, en ce qui concerne les établissements dépourvus
d’instances représentatives du personnel, de rendre le document unique
accessible pour les “personnes soumises à un risque pour leur sécurité ou leur
santé”. En venant pallier l’absence de représentants du personnel, cette
disposition participe tant d’une démarche d’information des travailleurs, que
d’une volonté d’associer ces derniers à l’appréciation des résultats de
l’évaluation des risques.
• Enfin, le médecin du travail est habilité à prendre connaissance des résultats
de l’évaluation des risques pratiquée par l’employeur, puisqu’il participe à la
démarche de prévention, dans l’exercice de ses missions et en qualité de
conseiller des salariés et de l’employeur.
2.3.2. Les acteurs externes à l’entreprise
Le décret (article R. 230-1, 5e alinéa) désigne l’inspection du travail, les
agents des services de prévention des organismes de Sécurité sociale et les
organismes mentionnés au 4° de l’article L. 231-2. Ces agents peuvent accéder au
document unique, dès lors qu’ils en ont fait la demande auprès de l’employeur.
Les agents de l’inspection du travail
Ils exercent là leur droit de consultation, tel qu’il résulte respectivement
des articles L. 611-9 et L. 611-12 du Code du travail. En effet, il est prévu
que les agents de l’inspection du travail peuvent se faire présenter, au cours
de leurs visites, l’ensemble des livres, registres et documents rendus
obligatoires par le code du travail. Cela correspond à la mission précisée à
l’inspection du travail en matière d’évaluation des risques, par la circulaire
n° 02 DRT du 23 février 2000 relative au programme d’actions coordonnées 2000
pour la prévention des risques professionnels. Cette mission couvre 3 moments
distincts :
- La sensibilisation en amont des acteurs internes à l’entreprise.
Il s’agit :
• De l’employeur, en tant que responsable de l’évaluation des risques ;
• Des instances représentatives du personnel, qui analysent les risques et
participent à la démarche de prévention ;
• Des travailleurs qui apportent leurs connaissances de leur situation de
travail ;
• Du médecin du travail, conseiller de l’entreprise, sensibilisé notamment par
l’action des médecins inspecteurs régionaux du travail et de la main d’oeuvre.
Cette mission de sensibilisation peut suivre plusieurs modalités. Elle peut
consister à rappeler à l’employeur les obligations qu’il doit respecter,
conformément au présent décret, à savoir :
• Transcrire les résultats de l’évaluation des risques dans un document unique ;
• Mettre à jour cette évaluation ;
• Tenir ce document à disposition des acteurs internes et externes à
l’entreprise ;
• Utiliser les résultats de l’évaluation des risques pour la mise en œuvre d’une
démarche de prévention.
Cette démarche vise à présenter l’intérêt de l’évaluation des risques, par
rapport à la démarche générale de prévention. Il s’agit de situer les enjeux
d’une approche en amont des risques, dont l’efficacité dépend des actions de
prévention que l’employeur mettra en œuvre, suite à son évaluation des risques.
Les points de repères méthodologiques exposés dans cette circulaire (voir point
3) peuvent aussi être rappelés, le cas échéant, en orientant l’employeur vers
les organismes para-publics de prévention, voire les organismes techniques, les
cabinets privés, susceptibles de fournir un appui à la réalisation de
l’évaluation des risques. Enfin, le Fonds d’amélioration des conditions de
travail (FACT) peut être utilisé, dans
le cadre d’appui aux projets des branches professionnelles ou des entreprises.
- L’accompagnement de la démarche de prévention.
Sans pour autant aller jusqu’à une association complète à cette démarche,
l’inspection du travail peut tirer parti de sa présence en entreprise (prévue à
l’article L. 236-7), notamment lors des réunions du comité d’hygiène, de
sécurité et des conditions de travail, en apportant ses connaissances sur les
modalités de la mise en œuvre du processus de prévention.
- Le contrôle de l’évaluation des risques.
Le décret fixe tout d’abord des obligations incombant à l’employeur qui sont
susceptibles de faire l’objet de sanctions pénales (contraventions de 5e
classe). Les agents de l’inspection du travail peuvent dresser procès-verbal à
l’encontre de l’employeur qui n’aura pas :
• Transcrit les résultats de l’évaluation des risques sur un document unique ;
• Mis à jour ces résultats, selon les modalités définies au second alinéa de
l’article R. 230-1 (voir point 2.5.1).
En outre, ils peuvent relever, par procès-verbal, les autres cas d’infractions
déjà prévus par le Code du travail. Il s’agit, en premier lieu, de l’absence de
mise à disposition du document unique aux instances représentatives du personnel
et aux agents de l’inspection du travail (voir point 2.5.2). En second lieu,
l’inspection du travail peut constater, par procès-verbal, la violation par
l’employeur des prescriptions spécifiques en matière d’évaluation des risques
(voir annexe 1).
L’agent de contrôle peut aussi adresser des observations, relatives à l’absence
de mise à disposition du document unique, aux :
• Personnes soumises à un risque pour leur sécurité ou leur santé, dans les
établissements dépourvus d’instances représentatives du personnel ;
• Médecin du travail ;
• Organismes mentionnés au 4° de l’article L. 231-2.
Naturellement, les agents de l’inspection du travail peuvent toujours constater
l’absence d’utilisation des résultats de l’évaluation des risques pour
l’établissement des documents - bilan annuel de la santé et de la sécurité au
travail et programme annuel de prévention - soumis par l’employeur aux instances
représentatives du personnel.
Les agents des services de prévention des
organismes de Sécurité sociale
Ils bénéficient aussi du droit d’accès au document unique, dans la mesure où ils
jouent un rôle important en matière de prévention, en engageant des moyens, tant
d’incitation en matière de prévention que d’injonction à l’égard des employeurs.
En ce qui concerne leur mission d’incitation, les ingénieurs-conseils et
contrôleurs de sécurité des caisses régionales d’assurances maladie (Cram)
peuvent exploiter les résultats des études (article L. 422-2 du Code de la
Sécurité sociale) et enquêtes (article L. 422-3 dudit code), pour sensibiliser
les
employeurs à l’évaluation des risques et à l’intégration de la prévention dans
leur gestion et l’organisation des lieux de travail. En outre, les agents des
Cram peuvent par voie d’observations et, le cas échéant, d’injonctions, amener
l’employeur à réaliser des mesures d’amélioration (article L. 422-4).
Ce droit d’accès au document unique s’applique aussi aux agents des caisses de
mutualité sociale agricole (les médecins du travail et les conseillers de
prévention), en ce qui concerne les établissements soumis au régime agricole de
Sécurité sociale. Cette disposition permettra aux agents de la mutualité sociale
agricole de conforter leurs missions de conseil auprès des entreprises.
Conformément au décret n °73-892 du 11 septembre 1973 relatif à l’organisation
et au financement de la prévention des accidents du travail et des maladies
professionnelles des salariés agricoles, les caisses de mutualité sociale
agricole peuvent inviter tout employeur à prendre toutes mesures justifiées de
prévention.
L’OPPBTP
L’Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP)
est le seul à entrer dans la catégorie des “organismes mentionnés au 4° de
l’article L. 231-2”. Il exerce une mission de conseil dans les domaines de la
sécurité, de la protection de la santé et de l’amélioration des conditions de
travail dans les entreprises du bâtiment et de travaux publics, conformément au
décret n° 85-682 du 4 juillet 1985 modifié.
Il poursuit 4 axes d’actions (diagnostic sécurité entreprise, information,
formation et assistance technique), qui permettent aux délégués de l’OPPBTP de
recueillir et diffuser les informations nécessaires à l’évaluation des risques
et à l’élaboration des différents plans de prévention.
Les médecins inspecteurs du travail et de la
main-d’œuvre
Le document unique doit être aussi tenu à disposition des médecins
inspecteurs du travail et de la main-d’œuvre, en application de l’article L.
612-2 du Code du travail. Celui-ci leur reconnaît en effet un droit de
consultation identique à celui des agents de l’inspection du travail. Ce droit
de consultation permet aux médecins inspecteurs du travail et de la main
d’oeuvre d’exercer leur action permanente, en vue de la protection de la santé
des travailleurs sur leur lieu de travail.
2.4. Mise en œuvre d’actions de prévention
L’évaluation des risques ne constitue pas une fin en soi. Elle trouve sa
raison d’être dans les actions de prévention qu’elle va susciter. Sa finalité
n’est donc nullement de justifier l’existence d’un risque, quel qu’il soit,
mais, bien au contraire, de mettre en œuvre des mesures effectives, visant à
l’élimination des risques, conformément aux principes généraux de prévention.
Dans cet esprit, le décret prévoit d’utiliser la transcription des résultats de
l’évaluation des risques pour l’établissement des documents qui doivent faire
l’objet, par l’employeur et sous sa responsabilité, d’une consultation du CHSCT
(article R. 230-1, 3e alinéa).
Cela désigne 2 types d’instruments :
• Le document unique doit d’abord contribuer à la présentation du rapport
écrit traçant le bilan de la situation générale dans l’entreprise en matière
d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail et concernant les actions
prises en ce domaine durant l’année écoulée ;
• Mais le document unique doit davantage contribuer à l’élaboration du programme
annuel de prévention des risques professionnels. Ce programme est essentiel dans
la mise en œuvre des actions de prévention qui font suite à l’évaluation des
risques. Conformément à l’article L. 236-4, alinéa 4, l’employeur doit fixer,
dans le programme, la liste détaillée des mesures devant être prises au cours de
l’année à venir afin de satisfaire notamment aux prescriptions figurant dans les
principes généraux de prévention. En application de l’article L. 236-4, le CHSCT
est associé à la préparation du programme annuel de prévention par
l’utilisation, d’une part, de l’analyse des risques à laquelle il a procédé et,
d’autre part, par l’avis rendu à l’employeur sur le programme que ce dernier lui
soumet.
Quant aux délégués du personnel, ils disposent
des mêmes prérogatives que les CHSCT, en l’absence de ces derniers dans les
établissements de plus de 50 salariés, conformément à la loi n° 82-1097 du 23
décembre 1982 modifiée par la loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991, au décret n°
93-449 du 23 mars 1993 et à la circulaire n° 93-15 du 25 mars 1993.
Par conséquent, l’employeur dispose de 2 sources - l’une issue de sa propre
évaluation des risques et l’autre résultant de l’analyse des risques effectuée
par le CHSCT - lui permettant de concevoir des actions de prévention, dans le
cadre du dialogue social entretenu avec les instances représentatives du
personnel (voir infra, point 3.1.1.).
Dans les entreprises dépourvues d’instances représentatives du personnel,
l’employeur doit tenir compte de son obligation, prévue à l’article L. 230-2.III
a), de réaliser des actions de prévention, à la suite de l’évaluation des
risques et en tant que de besoin.
2.5. Les sanctions pénales
2.5.1. Le dispositif fixé par le décret
Afin de renforcer l’effectivité de l’obligation pour l’employeur de
transcrire les résultats de l’évaluation des risques, le décret prévoit un
dispositif de sanctions pénales de nature contraventionnelle. Ce dispositif,
inscrit à l’article R. 263-1-1 du Code du travail, prévoit des peines de
contravention de 5e classe, conformément aux articles 131-12 et suivants du Code
pénal. Les peines peuvent être prononcées à l’encontre de l’employeur, selon
deux motifs possibles. Il s’agit, en premier lieu, de la violation par
l’employeur de son obligation de transcrire et de mettre à jour les résultats de
son évaluation des risques. Cela concerne, par conséquent, le non-respect par
l’employeur des obligations liées à la forme du document - existence d’un
document unique - et au fond - transcription des résultats de l’évaluation par
un inventaire des risques dans chaque unité de travail de l’établissement
(article R. 230-1, premier alinéa). En second lieu, s’agissant de la mise à jour
des résultats de l’évaluation des risques, l’employeur devra aussi veiller au
respect des modalités d’actualisation du document unique, mentionnées à
l’article R. 230-1, second alinéa. Il convient d’ajouter que le juge judiciaire
a la possibilité de doubler la peine de contravention en cas de récidive
intervenue dans le délai d’un an, à compter de l’expiration ou de la
prescription de la précédente peine, ce, conformément à l’article 131 13 du Code
pénal.
Enfin, le décret indique que ces sanctions ne seront applicables que dans le
délai d’un an, à l’issue de sa parution. Cette disposition octroie un délai
suffisant permettant aux entreprises de concevoir et de mettre en place le
dispositif d’évaluation des risques. De ce fait, le présent décret ayant été
publié le 7 novembre 2001, l’article R. 263-1-1 du Code du travail entrera en
vigueur le 8 novembre 2002. Dans chaque situation concrète, il convient de
trouver un juste équilibre entre l’obligation qui pèse désormais sur
l’entreprise et les délais indispensables qui lui seront nécessaires pour que
l’évaluation des risques, ainsi matérialisée, s’inscrive dans une réelle
dynamique de prévention. En effet, il ne serait nullement conforme à l’esprit
même de cette importante réforme que les entreprises ne voient dans ce
dispositif qu’une obligation purement formelle qu’elles pourraient satisfaire en
remplissant des grilles, voire des formulaires pré-établis, sans que cela soit
mené dans le cadre d’une démarche effective de prévention propre à l’entreprise.
2.5.2. Les autres cas d’infractions déjà
prévus par le Code du travail
Le décret ne mentionne pas la violation de l’obligation de mise du document
à disposition des instances représentatives du personnel et de l’inspection du
travail. Ces deux infractions sont déjà prévues par le Code du travail. Une
telle violation présente, en ce qui concerne les représentants du personnel, un
caractère délictuel prévu par l’article L. 263-2-2 du Code du travail, qui porte
sur le délit d’entrave, en ce qui concerne les CHSCT (article L. 482-1 pour les
délégués du personnel). Un tel manquement porte en effet atteinte au
fonctionnement régulier des instances représentatives du personnel. Conformément
à l’article L. 236-3, il entre notamment dans les droits du CHSCT (article L.
236-1 pour les délégués du personnel) de recevoir de l’employeur les
informations nécessaires à l’exercice de leurs missions. Parmi celles-ci, figure
l’analyse des risques, énoncée plus haut (article L. 236-2). L’employeur peut
ainsi se rendre coupable de délit d’entrave. S’agissant de l’inspection du
travail, l’article L. 611-9 fonde les conditions de l’infraction par l’employeur
à l’encontre de son obligation de tenir le document d’évaluation des risques à
sa disposition. L’article R. 631-1 indique, à cet égard, que toute infraction à
cette obligation sera passible de l’amende prévue pour les contraventions de 3e
classe. Dans le cas où l’élément intentionnel est retenu, cette infraction
constitue un délit d’obstacle à
l’accomplissement des devoirs d’un inspecteur ou d’un contrôleur du travail.
Points de repères de méthode
L’objectif est, ici, d’inscrire l’évaluation a priori des risques dans la
démarche de prévention des risques professionnels. Dans cette perspective,
l’évaluation a priori des risques constitue un préalable à la définition des
actions de prévention fondée sur la connaissance en amont des risques auxquels
sont exposés les travailleurs. Elle vise à accroître la protection de la santé
et de la sécurité des salariés, ainsi qu’à améliorer les conditions de travail
au sein de l’entreprise. De ce fait, la démarche de prévention contribue aussi à
l’amélioration de la performance générale de l’entreprise, du double point de
vue social et économique. Cette approche de la prévention de la santé et de la
sécurité au travail doit être menée en liaison avec les instances
représentatives du personnel, de façon à favoriser le dialogue social, en
constituant un facteur permanent de progrès au sein de l’entreprise.
L’évaluation des risques introduit des principes méthodologiques qu’il convient
de maîtriser afin de mieux appréhender les enjeux de la prévention de la santé
et de la sécurité au travail.
La démarche de prévention est un processus
dynamique
La démarche de prévention des risques professionnels s’inscrit dans un
processus dynamique. Les entreprises ajustent sans cesse leurs outils de
production, afin de faire face aux évolutions socioéconomiques. La plupart du
temps, ces mutations s’accompagnent de changements organisationnels et
techniques qui ont un impact sur les conditions de travail. En conséquence, la
prévention des risques professionnels ne peut pas être envisagée de manière
statique et définitive. Bien au contraire, elle doit être appréciée et
construite dans le cadre d’un processus itératif tenant compte de l’évolution
dans l’entreprise des facteurs humains, techniques et organisationnels. Il peut
aussi bien s’agir de l’embauche de nouveaux salariés, de la modification des
installations, de l’acquisition d’équipements ou de l’adoption de nouvelles
méthodes de travail. Ainsi, la démarche de prévention peut se dérouler en 5
grandes étapes, qui consistent successivement à :
3.1. La préparation de la démarche
Il est nécessaire que l’employeur prenne, au préalable, connaissance des
principes généraux de prévention, auxquels il doit se conformer, avant d’engager
la démarche de prévention. Il est également important de définir les objectifs,
la méthode, le rôle des différents acteurs interne et externes à l’entreprise et
les moyens de sa mise en œuvre.
a) Les enjeux des principes généraux de
prévention
Ainsi que l’indique le I de l’article L. 230-2, l’employeur “prend les
mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des
travailleurs de l’établissement, y compris les travailleurs temporaires.” À
cette fin, l’employeur agit selon 3 modalités d’action :
• Des actions de prévention des risques professionnels ;
• Des actions d’information ;
• Des actions de formation.
Ainsi, il doit veiller à la mise en en place d’une organisation et de moyens
adaptés. L’évaluation des risques se place au centre du dispositif de
prévention. D’une part, elle découle de l’obligation première, pour l’employeur,
d’éviter les risques. Ainsi, le b) du II de
1. Préparer la démarche
2. Evaluer les risques
3. Elaborer un programme d’actions
4. Mettre en œuvre les actions
5. Reévaluer les risques, suite aux actions réalisées
L’article L. 230-2 indique bien, à la suite de l’obligation d’éviter les risques, que l’employeur doit “évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités”. Cela suppose donc qu’une analyse globale des risques doit être réalisée. D’autre part, cette évaluation doit conduire à la mise en œuvre d’actions de prévention. Le a) du III de l’article L. 230-2 prévoit, à cet égard, qu’“à la suite de cette évaluation et en tant que de besoin, les actions de prévention ainsi que les méthodes de travail et de production mises en oeuvre par l’employeur doivent garantir un meilleur niveau de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs et être intégrées dans l’ensemble des activités de l’établissement et à tous les niveaux de l’encadrement”.
b) L’intérêt d’une approche
pluridisciplinaire
Dans la mesure où ces actions de prévention doivent être planifiées “en y
intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail,
les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs
ambiants” (article L. 230-2, II, g), la démarche de prévention se fonde sur des
connaissances complémentaires d’ordre médical, technique et organisationnel,
tant au stade de l’évaluation des risques que de celui de l’élaboration d’une
stratégie de prévention.
c) L’association des acteurs internes à
l’entreprise
Les acteurs internes à l’entreprise contribuent à la démarche de prévention.
En s’appuyant sur ces apports internes, l’employeur peut assurer la qualité de
l’évaluation des risques et développer une culture de la prévention dans son
entreprise.
• Les instances représentatives du personnel (CHSCT et délégués du personnel)
sont associées au processus de mise en œuvre de la démarche de prévention, tant
au regard de l’évaluation des risques que de la préparation des actions de
prévention. Il est rappelé que ces instances procèdent elles-mêmes à une analyse
de risques qui contribue à la réalisation par l’employeur du programme annuel de
prévention, pour lequel les représentants du personnel sont consultés (voir
supra, point 2.3.1.).
• Le médecin du travail, en qualité de conseiller de l’entreprise (salariés et
employeur), apporte sa compétence médicale (voir supra, point 2.3.1.). Il
contribue plus particulièrement à la démarche de prévention, en exploitant les
données recueillies pour l’établissement de la fiche d’entreprise ou lors de la
surveillance médicale particulière des travailleurs (voir annexe 2).
• L’employeur peut aussi recourir aux compétences internes à l’entreprise,
d’ordre technique et organisationnel, lesquelles peuvent se trouver dans les
services de sécurité, des méthodes, des ressources humaines…
• Enfin, les travailleurs eux-mêmes apportent une contribution indispensable,
sachant qu’ils disposent des connaissances et de l’expérience de leur propre
situation de travail et des risques qu’elle engendre. Conformément à l’article
L. 230-2, I, les travailleurs entrant dans le champ de l’évaluation des risques
sont :
- tous les travailleurs de l’établissement, y compris les travailleurs
temporaires ;
- les travailleurs de plusieurs entreprises présents dans un même lieu de
travail ; cela désigne aussi bien l’intervention d’entreprises extérieures que
les opérations de bâtiment et de génie civil réunissant sur un même chantier
plusieurs entreprises (voir les modalités définies à l’annexe 1).
Ainsi, compte tenu de l’évolution croissante des activités de sous-traitance - maintenance, installation d’équipements, manutention…-, les salariés des entreprises extérieures intervenant sur le site d’une entreprise utilisatrice sont également mis à contribution pour la réalisation de l’évaluation des risques. De ce fait, l’association des acteurs internes à l’entreprise présente un intérêt double, tenant d’une part, à la mise en œuvre des compétences pouvant contribuer à la réalisation de l’évaluation des risques et, d’autre part, au dialogue social.
d) La définition des moyens de mise en œuvre de la démarche
Outre les ressources internes, l’employeur peut solliciter et mobiliser des
ressources externes tout au long du processus de prévention, en tenant compte
des moyens financiers dont il dispose. Il peut faire appel à des organismes
publics de prévention dotés des compétences techniques ou organisationnelles
(Caisses régionales d’assurance maladies, Caisses de mutualité sociale agricole,
Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics, Agence
nationale pour l’amélioration des conditions de travail et son réseau
territorial). Il peut également s’adresser à des experts techniques et des
cabinets-conseil privés, susceptibles de fournir une assistance dans les
domaines de la prévention.
3.2. L’évaluation des risques
Il convient d’apporter quelques précisions au contenu du document unique
développé au point 2.1.2, au regard du domaine de l’évaluation des risques et de
la nécessité d’analyser le travail réel.
a) Le domaine de l’évaluation des risques
L’évaluation des risques doit s’entendre de manière globale et exhaustive.
Les textes relatifs à l’évaluation des risques viennent préciser le champ et les
modalités de sa mise en œuvre.
Ces dispositions relèvent de la loi qui précise que l’évaluation des risques
doit aussi être réalisée lors du choix :
• Des procédés de fabrication ;
• Des équipements de travail ;
• Ds substances et préparations chimiques ;
• Lors de l’aménagement des lieux de travail et de la définition des postes de
travail (article L. 230-2, III, a).
En déterminant les modalités de la mise à jour du document unique, le présent
décret précise, par renvoi au 7e alinéa de l’article L. 236-2, que lors de toute
transformation importante des postes de travail découlant de la modification de
l’outillage, d’un changement de produit ou de l’organisation du travail (et)
toute modification des cadences et des normes de productivité (liées ou non à la
rémunération du travail), une évaluation des risques doit être réalisée.
Plusieurs prescriptions spécifiques déterminent
les matières et conditions dans lesquelles une évaluation des risques doit être
effectuée (voir annexe 1). Cette réglementation propre à certaines activités ou
risques - notamment physiques, chimiques et biologiques - peut conduire à la
réalisation de diagnostics fondés sur le respect d’indicateurs permettant
d’estimer les conditions d’exposition.
b) L’analyse du travail réel
La pertinence de l’évaluation des risques repose en grande partie sur la
prise en compte des situations concrètes de travail - dit travail réel -- qui se
différencie des procédures prescrites par l’entreprise. Ainsi, l’activité
exercée par le travailleur, pour réaliser les objectifs qui lui sont assignés,
génère des prises de risques pour gérer les aléas ou les
dysfonctionnements, qui surviennent pendant le travail. De ce fait, l’analyse
des risques a pour objet d’étudier les contraintes subies par les travailleurs
et les marges de manoeuvre dont ceux-ci disposent, dans l’exercice de leur
activité. L’association des travailleurs et l’apport de leur connaissance des
risques ainsi que de leur expérience s’avèrent à cet égard indispensable. Pour
ces raisons, il est souhaitable que dans le document unique, ne figurent pas
uniquement les résultats de l’évaluation des risques, mais aussi une indication
des méthodes utilisées pour y parvenir. Cela doit permettre d’apprécier la
portée de l’évaluation des risques, au regard des situations de travail.
3.3. L’élaboration du programme d’actions
L’articulation entre les résultats de l’évaluation des risques et
l’élaboration du programme d’actions ne s’opère pas mécaniquement. La mise au
point du programme d’actions consiste à rechercher des solutions et à effectuer
des choix. Les décisions devront être prises dans le respect des principes
généraux de prévention figurant suivants (article L.230-2, II) :
• “Combattre les risques à la source” ;
• “Adapter le travail à l’homme en particulier lors de la conception des postes
de travail, du choix des équipements de travail, des méthodes de travail et de
production afin de limiter le travail monotone et cadencé au regard de leurs
effets sur la santé” ;
• “Tenir compte de l’état d’évolution de la technique” ;
• “Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui
est moins dangereux” ;
• “Prendre les mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur
les mesures de protection individuelle” ;
• “Donner les instructions appropriées aux travailleurs”.
Sachant que la planification de la prévention consiste à intégrer dans “un
ensemble cohérent” des éléments d’ordre technique, organisationnel et humain, il
s’agira de tenir compte de l’interaction de ces éléments, au regard des
situations de travail. C’est sur ces bases que le programme annuel de prévention
des risques professionnels (cf. point 2.4) est établi, en associant les
instances représentatives du personnel. Ce programme constitue, pour les acteurs
internes et externes à l’entreprise, un outil opérationnel de suivi des actions
mises en oeuvre.
3.4. La mise en œuvre des actions de
prévention
Suite à l’adoption du programme annuel de prévention, il est très souvent
fait appel à des études complémentaires nécessaires à son exécution. Dans ce
sens, le programme annuel peut servir d’outil de suivi permettant aux instances
représentatives du personnel d’accompagner la mise en oeuvre des actions. Ces
actions, qui peuvent consister aussi bien à assurer des formations, à élaborer
des consignes de travail ou encore à engager des travaux importants liés aux
équipements de travail ou à l’aménagement des locaux, requièrent des exigences
techniques qui leurs sont propres.
3.5. La réévaluation des risques
Dans la mesure où ces actions peuvent conduire à des changements techniques et
organisationnels dans les situations de travail susceptibles de générer de
nouveaux risques, il convient, en premier lieu, d’effectuer une nouvelle
évaluation des risques, selon les modalités fixées par le décret (voir point
2.2.).
À l’issue de ces actions, il s’agit d’enclencher de nouveau le processus de la
démarche de prévention.
Ce dispositif place l’évaluation des risques au cœur de la démarche de
prévention des risques professionnels. Sa mise en application effective doit
contribuer à accroître, à la fois, le niveau de protection de la santé et de la
sécurité des travailleurs et le développement des performances de l’entreprise.
Dans cette perspective, elle s’inscrit bien dans la démarche visant à assurer
des emplois de qualité soutenus par une dynamique de progrès de l’entreprise.
Vous voudrez bien me tenir informé des expériences menées, des questions
soulevées et des éventuelles difficultés que vous rencontrerez dans la mise en
œuvre de la présente circulaire. Ces contributions permettront d’enrichir les
travaux du comité national - constitué de l’ensemble des représentants des
organismes de prévention - qui a en charge l’élaboration d’un guide
méthodologique destiné aux entreprises.
Le directeur des relations du travail, Jean-Denis Combrexelle
Prescriptions spécifiques à la charge de
l’employeur en matière d’évaluation des risques
Annexe 1
1. Risques liés aux situations de coactivité
Il s’agit d’articuler le document unique avec les instruments prévus par :
- le décret n° 92-158 du 20 février 1992 relatif aux prescriptions particulières
d’hygiène et de sécurité applicables aux travaux effectués dans un établissement
par une entreprise extérieure ;
- le décret n° 94-1159 du 26 décembre 1994 relatif aux dispositions
particulières relatives à la coordination pour certaines opérations de bâtiment
ou de génie civil.
a) Le cas d’une entreprise intervenante dans une entreprise utilisatrice (décret
du 20 février 1992, art. R. 237-1 et suivants) :
• L’analyse commune des risques interférents
Lors d’une intervention, l’entreprise intervenante (EI) et l’entreprise
utilisatrice (EU) doivent procéder à une analyse commune des risques pouvant
résulter de l’interférence entre les activités, les installations et matériel ;
• Le plan de prévention
Les résultats de cette analyse des risques servent à la réalisation du plan de
prévention, où figurent les mesures qui doivent être prises par chaque
entreprise, en vue de prévenir ces risques ;
• Le retour d’expériences
Les enseignements tirés de ces analyses - retours d ‘expériences - peuvent
venir, le cas échéant, enrichir le document unique de l’entreprise intervenante,
voire de l’entreprise utilisatrice. En ce qui concerne le secteur du bâtiment et
les travaux publics, le document unique contient les résultats de l’évaluation
des risques liés aux métiers (peintre, maçon, couvreur, grutier...) et aux
activités de l’entreprise (pavillons, infrastructures de bâtiments, ponts ou
routes...). Le plan de prévention, qui est fondé sur les résultats de l’analyse
en commun des risques interférents, définit les mesures de protection à prendre.
Le document unique doit contenir les résultats de l’évaluation des risques liés
aux métiers et aux activités de l’entreprise intervenante. Le document unique
doit contenir les résultats de l’évaluation des risques de l’entreprise
utilisatrice.
EI EU Risques interférents
b) Le cas d’une ou plusieurs entreprises intervenantes sur un chantier -
opérations de bâtiment ou de génie civil - (décret du 26 décembre 1994).
Dans le secteur du bâtiment et les travaux publics, le document unique contient
les résultats de l’évaluation des risques liés aux métiers (peintre, maçon,
couvreur, grutier...) et aux activités de l’entreprise (pavillons,
infrastructures de bâtiments, ponts ou routes...).
• Le plan général de coordination en matière de sécurité et de protection de la
santé (PGC) Le PGC définit l’ensemble des mesures propres à prévenir les risques
découlant de l’interférence des activités des différents intervenants sur le
chantier, ou de la succession de leurs activités… (art. R. 238-21).
• Le plan de sécurité et de protection de la santé (PPSPS)
Le PPSPS doit définir les mesures de prévention liées aux risques du chantier
(arts. R. 238-31 III et R. 238-32). Les mesures de prévention à prendre sur le
fondement du document unique (modes opératoires standards) contribuent à la
réalisation du PPSPS.
• Le retour d ‘expériences
Les enseignements tirés de la mise en oeuvre du PPSPS peuvent enrichir le
document unique réalisé par chaque entreprise impliquée dans l’opération de
bâtiment ou de génie civil ; en outre, ces enseignements peuvent être pris en
compte lors de la conception du PGC, à l’occasion de chantiers ultérieurs. Le
programme d’action comprend les mesures de prévention à prendre sur le fondement
du document unique Le document unique contient les résultats de l’évaluation des
risques.
Le PPSPS prend en compte à la fois les mesures préconisées par le PGC et les
mesures propres à l’activité de l’entreprise.
Le PGC définit l’ensemble des mesures propres au chantier
Retour d’expériences
2. Risque physique
TYPE DE RISQUE OU D’ACTIVITE
PRESCRIPTIONS SPECIFIQUES COMPLEMENT PAR RAPPORT AU DECRET EVALUATION DES
RISQUES
Manutention de charges Article R. 231-68 : en application des principes généraux
de prévention définis à l’article L. 230-2, l’employeur évalue, si possible
préalablement, les risques que font encourir les opérations de manutention pour
la sécurité et la santé des travailleurs ; un arrêté du 29 janvier 1993 établit
une liste non exhaustive des éléments de référence et des autres facteurs de
risque à prendre en compte pour l’évaluation préalable des risques et
l’organisation des postes de travail. Les résultats de l’analyse de ces risques
sont intégrés dans le document unique.
Bruit Article R. 232-8-1 : l’employeur procède à une estimation et, si besoin
est, à un mesurage du bruit subi pendant le travail. En ce qui concerne le
bruit, le travail d’identification et de mesurage réalisé par l’employeur
constitue un élément de référence pour l’évaluation de ce risque, qui contribue
à l’obligation générale d’évaluer les risques prévue par le décret du 5 novembre
2001.
Rayonnements ionisants Décret n° 86-1103 du 2 octobre 1986 (protection des
travailleurs contre les rayonnements ionisants), article 4 : afin que les
matériels, procédés et l’organisation du travail soient conçus de telle sorte
que les expositions professionnelles individuelles et collectives soient
maintenues aussi bas que possible en dessous des limites prescrites par le
décret, les postes de travail exposés font l’objet d’une analyse dont la
périodicité est fonction du niveau d’exposition ; voir aussi les articles 24
(évaluation individuelle de l’exposition des travailleurs opérant en zone
contrôlée), ainsi que les différents contrôles, prévus par le décret ; en outre,
l’employeur établit une notice pour chaque poste de travail exposant les
travailleurs à ce risque. Les résultats de l’analyse de ces risques sont
intégrés dans le document unique. Ecrans de visualisation Décret n° 91-451 du 14
mai 1991 (prévention des risques liés au travail sur des équipements comportant
des écrans de visualisation), article 3 : l’employeur analyse les risques
professionnels et les conditions de travail pour tous les postes comportant un
écran de visualisation. Les résultats de l’analyse de ces risques sont intégrés
dans le document unique.
3. Risque chimique
TYPE DE RISQUE PRESCRIPTIONS SPECIFIQUES
OBSERVATIONS AU REGARD DU DECRET EVALUATION DES RISQUES
Dispositions générales Article R. 231-54-1 : l’employeur procède, conformément
aux dispositions du III de l’article L. 230-2, à l’évaluation des risques
encourus pour la santé et la sécurité des travailleurs, pour toute activité
susceptible de présenter un risque d’exposition à des substances ou à des
préparations chimiques dangereuses. Cette évaluation porte sur les niveaux
d’exposition collectifs et individuelles et indique les méthodes envisagées pour
les réduire ; cette disposition prévoit en outre les conditions de
renouvellement de l’évaluation ; l’article R. 231-54.1 prévoit qu’une notice
informant le salarié des risques auxquels il est exposé sera établie pour chaque
poste de travail soumis à ce risque.
Les résultats de l’analyse des risques chimiques sont intégrés dans le document
unique.
Risque cancérogène Article R. 231-56-1 : l’employeur est tenu, pour toute
activité susceptible de présenter un risque d’exposition à des agents
cancérogènes, d’évaluer la nature, le degré et la durée de l’exposition des
travailleurs, afin de pouvoir apprécier tout risque concernant leur sécurité ou
leur santé.
Amiante Décret n° 96-98 du 7 février 1996
modifié (protection des travailleurs contre les risques liés à l’inhalation de
poussières d’amiante), article 2 : l’employeur évalue les risques, afin de
déterminer, notamment, la nature, la durée et le niveau de l’exposition des
travailleurs à l’inhalation de poussières provenant de l’amiante ou de matériaux
contenant de l’amiante. Cette évaluation doit porter sur la nature des fibres en
présence et sur les niveaux d’exposition collective et individuelle.
idem
Silice
Plomb
Chlorure de vinyle
monomère
Benzène
Voir les différents textes fixant des seuils d’exposition.
Les mesures et contrôles ainsi effectués constituent des éléments de référence
nécessaires à l’évaluation des risques.
4. Risque biologique
TYPE D’ACTIVITE PRESCRIPTIONS SPECIFIQUES
OBSERVATIONS AU REGARD DU DECRET EVALUATION DES RISQUES
Risque biologique Article R. 231-62, 1. : afin de procéder à l’évaluation des
risques, prévue conformément à l’article L. 230-2, l’employeur détermine la
nature, la durée et les conditions d’exposition des travailleurs pour toute
activité susceptible de présenter un risque d’exposition à des agents
biologiques ; voir les points 2, 3, 4 de l’article R. 231-62 relatifs aux
modalités de l’évaluation des risque, l’article R. 231-62-3 portant sur la
consigne de sécurité établie à l’intention des travailleurs et l’article R. 231-
63-1 sur les informations relatives à l’évaluation des risques tenues à
disposition d’acteurs internes et externes à l’entreprise. Les résultats de
l’analyse des risques chimiques sont intégrés dans le document unique.
DONNEES CONTRIBUANT A L’EVALUATION DES RISQUES
PROFESSIONNELS
- liste indicative -
ANNEXE 2
La réglementation du travail prévoit l’existence de plusieurs supports qui
contiennent des données relatives à l’évaluation des risques et qui peuvent, de
ce fait, contribuer à l’élaboration du document unique par l’employeur. Il
s’agit de :
- L’analyse des risques réalisée par les institutions représentatives du
personnel (article L. 236-2) : le Comité d’hygiène, de sécurité et des
conditions de travail (CHSCT) procède à l’analyse des risques professionnels
auxquels peuvent être exposés les salariés. Cela résulte du second alinéa de
l’article L. 236-2. Dans le même sens, les délégués du personnel, investis des
missions des CHSCT, peuvent procéder également à l’analyse des risques,
conformément aux alinéas deux et quatre de l’article L. 236-1 (voir point 2.4 de
la circulaire sur le lien établi entre le document unique établi par l’employeur
et l’analyse des risques effectuée par l’institution représentative du
personnel).
- La fiche d’entreprise établie par le médecin du travail (article R. 241-41) :
cela s’inscrit dans le cadre de sa mission de conseiller de l’employeur et des
travailleurs, de leurs représentants et des services sociaux, notamment en
matière de protection des salariés contre l’ensemble des nuisances, et contre
les risques d’accidents du travail, ou d’utilisation des produits dangereux.
Dans les entreprises de plus de 10 salariés, la fiche d’entreprise que le
médecin du travail est chargé d’établir et de mettre à jour, au regard de
l’article R. 241-41-3, peut contribuer à l’évaluation des risques pratiquée par
l’employeur, pour ce qui concerne sa dimension médicale. Comme le prévoit cette
disposition, la fiche d’entreprise, qui doit être transmise à l’employeur,
consigne notamment les risques professionnels et les effectifs de salariés
exposés à ces risques.
- La surveillance médicale particulière assurée par le médecin du travail
(article R. 241-50) : le médecin du travail a aussi pour mission d’exercer une
surveillance médicale particulière auprès des salariés affectés à certains
travaux comportant des exigences ou des risques spéciaux déterminés par arrêtés
ministériels.
- La déclaration à la caisse primaire d’assurance-maladie (article L. 461-4 du
code de la sécurité sociale) : elle doit être effectuée par l’employeur lorsque
ce dernier utilise des procédés de travail susceptibles de provoquer des
maladies professionnelles ;
- La liste des postes de travail présentant des risques particuliers (article L.
231-3-1 du code du travail) : elle concerne les risques portant sur la santé ou
la sécurité des salariés sous contrat de travail à durée déterminée et des
salariés sous contrat de travail temporaire qui doivent être relevés par
l’employeur, après avis du médecin du travail et du CHSCT ou à défaut des
délégués du personnel.
- Les fiches de données de sécurité concernant les produits chimiques (article
R. 231-53) : elles doivent être communiquées à l’employeur par les fabricants,
importateurs ou vendeurs de tels produits. Ces fiches sont ensuite transmises
par l’employeur au médecin du travail. - L’évaluation des risques lors de la
conception de machines neuves ou considérés comme neuves (article R. 233-84
(annexe I, 1.1.2, b) ) : le concepteur effectue une analyse des risques en vue
de rechercher tous ceux qui sont susceptibles de concerner la machine ou le
composant de sécurité. Lorsque des risques résiduels continuent à exister malgré
toutes les dispositions intégrées à la machine elle-même ou lorsqu’il s’agit de
risques potentiels non évidents, des avertissement doivent être prévus (annexe
I, 1.7.2).
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L'Hôtellerie Restauration n° 3008 Hebdo 21 décembre 2006 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE