du 3 mai 2007 |
ÉDITO |
Bons points
Au
temps jadis, les enfants des écoles gagnaient des bons points lorsqu'ils faisaient
preuve d'application et de bonne volonté. Certains, les plus méritants
sans doute, ramenaient même triomphalement à la maison des tickets
pour un tour en bateau-mouche ou une entrée au musée. C'était du
temps de l'enfance. Prendrait-on les restaurateurs pour des écoliers attardés
? Pas une semaine, ici et ailleurs, sans qu'une publication, un guide, un institut
de sondage ou d'enquête ne publie un classement, ne décerne des récompenses,
awards et autres distinctions plus ou moins justifiées.
L'occasion est évidemment trop belle d'occuper la scène
médiatique en déclarant tel hôtel le plus "sexy" du monde
(mais si, Condé Nast Traveller vient de le faire), en désignant
le spa le plus luxueux ou le 'resort' le mieux équipé pour le golf, le
tennis ou la belote.
Mais là où les examinateurs de tout poil se déchaînent,
c'est bien évidemment vis-à-vis des restaurants dont on peut multiplier
à l'infini les catégories dignes d'une récompense décernée
par un jury hautement qualifié dont il serait du plus mauvais goût de
s'interroger sur l'objectivité et la compétence. Un Français, même
peu chauvin (ça doit exister), ne peut s'empêcher de sourire à
l'évocation des 'Meilleurs 50 restaurants du monde' - pas moins - classés
par des Britanniques, dont la culture culinaire est bien connue. Même si un
titre aussi éminent que représentatif de la tradition française,
Le Figaro, a donné un coup de main à nos amis anglais pour ce
tour de force.
D'autant que l'opération se présente comme un véritable dépoussiérage de la
hiérarchie culinaire, le critique appointé du Figaro, fidèle à
d'immuables convictions, y voit une réponse pertinente à qui vous savez. Libre à lui, bien sûr, d'écrire
que "personne ne saurait trouver incongrue cette hiérarchie", celle
de notre confrère britannique Restaurants : ça tombe bien, sur
les 10 premiers 'Meilleurs restaurants du monde', 8 ont… 3 étoiles Michelin
! À se demander si le public de connaisseurs habitués des établissements
gastronomiques, et en principe dûment averti, a besoin d'une énième
confirmation de ce que le guide rouge a décelé depuis belle lurette
: à ce qu'on sache, Ferran Adrià, Heston Blumenthal, Pierre Gagnaire,
Thomas Keller, Michel Bras, Alain Ducasse ou Juan Maria Arzak, font depuis longtemps
partie de la galaxie de l'avenue de Breteuil.
Cette anecdote, Dieu merci, ne bouleversera pas le monde de la
gastronomie, mais elle est révélatrice d'un état d'esprit de plus
en plus répandu qui considère que les restaurants peuvent être soumis
à l'humeur bonne ou moins bonne d'éditeurs et de leurs lecteurs dont
le caprice fait le plus souvent office de jugement.
Heureusement, que vous soyez au top Ten d'un journal anglais
ou la bête noire d'un bulletin moldo-valaque, seul le client reste votre juge
suprême.
L. H. zzz8
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L'Hôtellerie Restauration n° 3027 Hebdo 3 mai 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE