du 1er mars 2007 |
SPAS |
Devenu une tendance de consommation de fond dans notre société, le marché du bien-être connaît, ces dernières années, une envolée spectaculaire. Un phénomène qui modifie sensiblement la donne des offres jusqu'alors proposées dans le secteur avec la montée en puissance du spa.
Olivier Petit, associé Deloitte, Amélie Lapy, consultante Deloitte
Spas, thalasso, thermes
La nouvelle "vague" du bien-être
La personnalisation du soin est une tendance lourde. |
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De
profonds changements bouleversent la donne du marché du bien-être ces
dernières années avec notamment le développement intensif des 'day
spas' ou spas d'hôtel. L'évolution de l'offre dans le secteur fait suite
à des mutations importantes apparues au fil du temps. Dans une première
phase, l'eau était l'élément dominant par le biais du thermalisme.
Les thermes fleurissant un peu partout à travers l'Europe et perdurant au
long des siècles.
Plus
tard, la thalassothérapie est venue capter la clientèle haut de gamme
et celle recherchant, non plus une approche curative des soins, mais une approche
préventive et à long terme. Quant au spa, qui se positionne exclusivement
sur la dimension bien-être, il se taille aujourd'hui la part du lion.
Ce dernier a en effet connu un réel essor
au cours de la dernière décennie. Sa croissance se matérialise notamment
par l'intégration au sein même des hôtels de ce type de service.
Rares sont en effet désormais les hôtels 4 étoiles qui ouvrent leurs
portes sans disposer d'un spa. Le phénomène s'étend même aux
unités 3 étoiles ou bien encore aux résidences hôtelières.
Une démarche qui permet aux professionnels de rester compétitifs face
à une concurrence exacerbée. Le tout en surfant sur la tendance de fond
de la prise de conscience du moi et de l'ère du tout cocooning.
Le spa, une nouvelle composante
Les équipements et
soins prodigués au sein des spas demeurent encore bien différents d'un
établissement à l'autre. D'ordinaire, l'offre spa est constituée
de quelques cabines de soins, d'un sauna et/ou d'un hammam et d'une salle de fitness.
La gamme de services varie toutefois sensiblement selon la catégorie de l'établissement.
Plusieurs grandes tendances régissent en fait le marché du spa :
• Le retour aux valeurs traditionnelles
qui se traduit par une utilisation grandissante des produits du terroir. Ainsi
Les Sources de
Caudalie qui ont créé la vinothérapie (soins utilisant les propriétés
thérapeutiques du raisin). Le Coq Gadby à Rennes pratique de son côté
des soins à base de pépins de pomme. On note également l'apparition
de produits bio (label Ecocert ou Cosmébio, notamment).
L'orientalisation des soins qui
s'exprime tout d'abord dans la mise en scène, le décor visuel et olfactif,
puis par une dimension spirituelle plus importante en prenant dans son ensemble
le corps et l'esprit. Le tout sous-entend également davantage de massages.
Les soins du monde qui
se multiplient à travers la présence de plus en plus fréquente
de massages thaïs, ayurvédiques, shiatsu sur les cartes de spa. À
noter néanmoins que ces offres sont adaptées à la clientèle
européenne.
La personnalisation et l'exclusivité
des soins qui se généralisent. Cette tendance est en particulier présente
en Asie où le spa s'invite en chambre. Après le chef et le maître
d'hôtel, c'est la masseuse qui s'immisce dans la chambre du client.
Impact positif sur le chiffre
d'affaires hébergement
Autant de nouvelles tendances
qui pourraient conduire les professionnels à oublier l'aspect rentabilité
de cet équipement. Dans les faits pourtant, les hôteliers ne perdent
pas de vue le côté retour sur investissement. Loin s'en faut. D'ailleurs,
un spa - à condition qu'il soit intégré dès la conception
de l'hôtel et géré de manière professionnelle - peut devenir
aujourd'hui un service profitable. Les avantages de cet équipement
se répercutent en effet sur 2 niveaux. En diversifiant son offre de services
par l'intégration d'une prestation supplémentaire haut de gamme, l'hôtelier
augmente ses tarifs et améliore ainsi sa recette moyenne chambre (RMC). Néanmoins,
de plus en plus d'hôteliers se sont équipés, et l'augmentation tarifaire
sur les chambres est moins importante que les années passées. A contrario,
les exploitants sont de plus en plus nombreux à percevoir un impact positif
sur l'occupation. L'engouement pour ce produit courts séjours - professionnellement
markété - trouve effectivement écho auprès du grand public.
À ce titre, les exploitants estiment que le spa a un impact positif sur la
fréquentation ainsi que sur la RMC (respectivement 67 % et 50 %, selon l'étude
menée par le cabinet Deloitte). En outre, certains spas d'hôtel accueillent
la clientèle extérieure constituant, de cette manière, une source
de profits supplémentaires. Un spa représente aujourd'hui près de
2,5 % du chiffre d'affaires total d'un hôtel haut ou milieu de gamme.
Par ailleurs, grâce à la hausse conjuguée
du prix moyen chambre et de la fréquentation, et donc du RevPAR (revenu par
chambre disponible, soit le chiffre d'affaires hébergement), le résultat
brut d'exploitation (RBE) atteint 20 à 25 % du chiffre d'affaires en année
de croisière.
Le spa va-t-il remplacer les
stations thermales et centres de thalassothérapie ?
Auparavant, les hôteliers
se dotaient d'un spa pour offrir un service supplémentaire aux clients. À
l'heure actuelle, ils optent pour
cet équipement parce que c'est une source potentielle de profit. Beaucoup plus
profitable encore, l'essor actuel du marché du spa impacte favorablement sa
profitabilité. Les centres de thalassothérapie et les stations thermales
viennent, eux, compléter le marché du bien-être. Ces 2 composantes
ont une dimension historique en France comparées au spa. À ce sujet,
on peut donc logiquement se poser la question suivante : le spa ne s'est-il pas
inspiré des thalassothérapies et des stations thermales ? Le spa est en
effet une version plus moderne de la thalassothérapie et du thermalisme. Il
a su s'imprégner de ces concepts et services tout en les adaptant aux besoins
de la clientèle d'aujourd'hui. Le développement de cette 'nouvelle' offre
bien-être de proximité - sans contrainte médicale réelle (visite
chez le médecin, certificat de non-contre-indication)
- proposée dans un environnement largement scénographié a certainement
remis en cause les fondements de la thalassothérapie et du thermalisme. Les
centres de thalassothérapie et les stations thermales existent de fait depuis
longtemps et sont même ancrés dans la culture française. Cependant,
ils sont désormais confrontés à de multiples problématiques.
Le nombre de curistes de ces marchés régresse régulièrement
: - 22 % entre 1991 et 2005 (lire graphique Évolution du nombre de curistes
dans les stations thermales).
Autre difficulté, la clientèle
des établissements de thalasso ou thermaux est exclusivement française.
D'après le SNT, les thalassothérapies sont fréquentées à
hauteur de 94 % par une clientèle de nationalité française, et
97 % des clients sont francophones.
La durée moyenne des séjours
diminue également. Dans les centres de thalasso, elle a presque été
divisée par 2 en 9 ans. En 1996, le séjour était d'environ 6 jours
tandis qu'en 2005 il ne s'élevait plus qu'à 3 jours (lire graphique
Évolution de la durée moyenne de séjour en thalasso). Un raccourcissement qui relève d'une tendance nationale aux courts
séjours. Le responsable : en partie les 35 heures et les fameuses
Spa | Thalasso | Thermes | Thermes & Offre bien-être | |
Investissement par m2 | 2 000 E | 2 000 à 6 000 E | NS | 2 200 E |
Chiffre d'affaires par m2 | 1 110 à 1 600 E | 1 220 E | NS | NS |
Dépense moyenne par client ou curiste | 81 E |
260 E en 3* 300 E en 4* |
500 E | 605 E |
Coûts des ventes | 20 à 25 % | 10 à 20 % | NS | NS |
Autres dépenses opérationnelles | 20 à 25 % | 10 à 20 % | 20 à 35 % | 20 à 25 % |
Frais de personnel | 40 à 50 % | 40 à 50 % | 45 à 50 % | 35 à 45 % |
RBE | 20 à 25 % | 20 à 30 % | 10 à 15 % | 25 à 35 % |
Spa, thalasso, thermes, quel est le plus
rentable ?
Deloitte a procédé
à une enquête auprès d'établissements thermaux, de centres
de thalassothérapie et de spas d'hôtel. Les résultats mettent en
avant la différence entre une station thermale traditionnelle, avec, comme
activité principale, les cures de thermalisme médical et une station ayant
développé une offre bien-être. En proposant une offre bien-être
(massage, institut de beauté, hammam, etc.), les stations parviennent à
accroître la recette moyenne par curiste de près de 20 %.
Les
produits thalassothérapie et thermalisme sont arrivés à maturité,
voire en phase de déclin pour ce dernier dans sa version traditionnelle. Cette
remise en cause leur impose de se poser les bonnes questions et de remettre au
goût
du jour leur concept en fonction des nouvelles attentes des clients. Pour faire
face à ces problématiques, la
mono-activité des stations thermales ou centres de thalassothérapie doit
être délaissée au profit de la diversification. Certains de ces
établissements développent leur offre en se positionnant sur un marché
bien-être version spa ou centres thermoludiques.
Cet élargissement de la gamme de soins/services
est vital pour les stations thermales, déremboursement ou non ! Outre les recettes
supplémentaires générées par les clients bien-être, dont
les ressources sont souvent supérieures à celles d'un curiste Sécurité
sociale, ceci permet également de redonner vie à la station. Le renouvellement
de la clientèle est assuré, un rajeunissement également, et ceci
permet de drainer de nouvelles animations et ainsi de revitaliser une station ou
une région.
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Enfin, la rentabilité du produit
bien-être étant supérieure à celle du thermalisme traditionnel,
la santé financière des stations pourrait être dopée. Un détail
et non des moindres, l'investissement : comment investir dans un contexte récessif
récurrent ? La localisation des stations thermales en ZRR et l'ouverture à
des subventions de toutes sortes permettent, lorsque l'on est inventif, de réduire
le risque d'investissement et de maîtriser son développement.
Concernant la thalassothérapie,
là encore, un repositionnement s'avère nécessaire. La création
d'Accor Thalassa & Spas témoigne de cette tendance lourde. Les spas s'invitent
dans les centres de thalassothérapie et permettent de répondre à
une nouvelle forme de demande sans pour autant remettre en question les valeurs
essentielles de la thalasso.
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La dimension loisir doit constituer
une voie de diversification, et à l'occasion, s'appuyer sur un savoir-faire
reconnu sans trop céder à l'exotisme. Lorsque la station de Brides-les-Bains
(orientation appareil digestif) ouvre des produits 'remise en forme', elle le fait
à destination des personnes souffrant d'un surpoids. Ceci constitue un bel
exemple de diversification cohérente et la station dispose de toute la légitimité
nécessaire pour y réussir !
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L'Hôtellerie Restauration n° 3018 Magazine 1er mars 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE