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Stéphane D'Arcangelo, garçon de café aux Deux Magots

Emploi - jeudi 4 août 2011 17:56
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75 - Paris Depuis deux ans, Stéphane D'Arcangelo s'épanouit comme garçon de café aux Deux Magots, véritable institution parisienne du quartier de Saint-Germain-des-Prés (VIe). Reportage sur ce serveur qui nous livre Paris sur un plateau.



10h45 : Pantalon et gilet noirs, chemise blanche, noeud papillon, plateau rond. Vous l'avez reconnu : c'est la tenue type du garçon de café français. Aux Deux Magots, l'institution parisienne de Saint-Germain-des-Prés, Stéphane D'Archangelo, 37 ans, exerce la fonction avec brio. Ses qualités ? Une mémoire d'éléphant, un sens de l'équilibre hors norme et des mollets d'acier. Car Stéphane court toute la journée. Enfin, il marche vite, très vite. Toujours pressé et à l'affût des nouveaux clients qui s'attablent à son rang. Il ne s'arrête pour ainsi dire jamais.

11h : Après avoir salué ses collègues, puis vérifié la mise en place de sa console, il prend les premières commandes. Les boissons chaudes sont annoncées à l'officier, qui se charge de les préparer. "Les plats cuisinés sont aussi préparés par l'office. En revanche, si un client commande du froid, un soda par exemple, je me sers moi-même dans les 'mitraillettes'." Ensuite, Stéphane centralise tout sur plateau, puis part en trombe faire son service.

11h20 : Deux minutes : c'est la durée maximale pour un garçon de café, avant d'aller prendre une commande. Les jours d'affluence, comme le week-end, mieux vaut être organisé. "Savoir garder son sang-froid est très important dans ces moments-là, confie Stéphane. Évidemment, je ne saurais trop conseiller de rester concentré pour bien garder en mémoire les commandes qui se chevauchent."

12h : Exercice qui appartient aux armoiries de la profession, Stéphane sait décapsuler d'une main en rendant la monnaie de l'autre. Axe central de son uniforme impeccablement lustré, sa poche de gilet constitue ainsi sa grotte secrète. C'est là qu'il amasse les additions des clients. "À l'aveugle, je peux reconnaître la différence entre une pièce de 20 centimes et de 1 euro ! ». Intriguant et fascinant, le garçon de café a d'ailleurs inspiré bien des films. Que ce soit Chaplin, dans Charlot garçon de café en 1914, ou bien Montand, dans Garçon en 1983.

13h25 : Une fois le repas terminé, un couple de clients demande des conseils à Stéphane sur les endroits où se balader. "Ce quartier est très touristique. Les demandes de ce genre sont monnaie courante", confie-t-il. Courtois, avenant et bien évidemment bilingue, Stéphane se métamorphose donc en concierge d'hôtel. Il connaît tout : les bons restaurants, les bars à la mode, les boutiques 'hype', les musées et les monuments à ne rater sous aucun prétexte… À le voir, on se dit qu'il tord à lui tout seul la légende qui voudrait que les garçons de café sont, par principe, désagréables. "C'est archi-faux, s'emporte-t-il. Le garçon de café n'est pas arrogant, il est fier. Fier de ce métier, où la règle d'or est la politesse et la rapidité d'exécution.". Petit boulot souvent adopté par les jeunes pour financer leurs études, le métier se professionnalise pourtant de plus en plus. Reste que seuls les meilleurs et les plus expérimentés atterrissent dans une grande maison comme les Deux Magots. 

14h40 : Stéphane n'arrête pas. Tel un automate, il place les clients, prend les commandes, fait le service et apporte les additions. Le rituel est bien rôdé. Après chaque client, il débarrasse les tables, puis les dressent à nouveau, rapidement. " Sets de tables, couverts, condiments… Je prépare une table propre en un temps record. Mon rang se doit d'être impeccable." 

15h55 : Les moments d'accalmie sont l'occasion pour Stéphane de se pencher sur les approvisionnements nécessaires au service des boissons. À la hâte, entre deux clients, il griffonne sur un calepin ce qu'il pense devoir commander. Alternant périodes creuses et coups de feu, "le rythme de travail d'un garçon de café varie beaucoup au cours de la journée". Aux Deux Magots, il bénéficie de jours de repos consécutifs... Mais c'est loin d'être la règle partout ! Côté rémunération, Stéphane est payé au portefeuille. En clair, il est rémunéré au pourcentage du chiffre d'affaires réalisé. Plutôtְ'bien payé', les pourboires s'ajoutent également à la rémunération de base. Il faut dire que ce café est fréquenté par du beau monde. Parmi les habitués, les acteurs américains Bruce Willis et Denzel Washington, Belmondo, Gad Elmaleh, Elie Semoun, ou encore les journalistes Laurence Ferrari et Ruth Elkrief

17h20 : Responsable de sa caisse, Stéphane vérifie régulièrement ses additions. "En fin de journée, je jette un oeil au total des consommations du jour. Il doit correspondre à ce que j'ai enregistré dans ma caisse." Très professionnel, les erreurs sont extrêmement rares.

19h : Avant son départ, Stéphane relate la journée à son collègue qui prend la relève. En un clin d'oeil, il s'assure de la propreté de son rang. "La journée aura été particulièrement intense", confesse-t-il le sourire aux lèvres. Avant de rentrer chez lui retrouver sa famille, il ne manque pas de décompresser une heure dans les rues de Paris. "C'est un métier difficile certes, mais pour rien au monde je n'en changerai", conclut-il. Une belle manière de rendre hommage à une profession qui recrute à tour de bras.

Mylène Sacksick

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