Les temps changent, les projets professionnels aussi. Ils évoluent de plus en plus. Chiffres à l’appui : en janvier 2022, 21 % des actifs préparaient une reconversion et 26 % en envisageait une à terme, selon le Baromètre 2023 de la formation et de l’emploi (Centre Info/CSA). Parmi les secteurs qui attirent, cuisine et gastronomie ont le vent en poupe. De quoi nourrir un vivier de talents, à l’heure où l’Umih estime entre 200 000 et 300 000 le nombre d’emplois non pourvus dans les CHR. Fondée en 1999, l’École Ducasse vient de publier un livre blanc intitulé La gastronomie, territoire privilégié des reconversions professionnelles. Un engouement que l’établissement observe au quotidien, avec une croissance moyenne de 288% du nombre d’étudiants en reconversion entre 2020 et 2022. Des apprenants qui représentent désormais plus de 50 % des formations professionnalisantes de l’école. Un phénomène que le chef étoilé Alain Ducasse explique par “une envie de se reconnecter à une vie normale, où la table est à la fois universelle, lieu d’échanges, source de liens et de sociabilité”.
Pas moins de 64,5 % de femmes
Le livre blanc brosse un profil détaillé de ces personnes en quête d’une nouvelle vie et d’un nouveau cap. Ce sont des femmes à 64,5 %, des étudiants de tout âge – le plus jeune a 22 ans, le plus âgé flirte avec les 70 printemps – et plus l’apprenant est âgé, plus il opte pour une formation courte pour concrétiser son projet de reconversion. C’est le cas de Frédérique Triquet, ancienne DRH, formée à l’École Ducasse et aujourd’hui à la tête de deux restaurants à Asnières (Hauts-de-Seine). “La première question à se poser avant de sauter le pas, c’est : ce projet est-il compatible avec ma vie de famille ?” Dans son cas, elle n’avait plus de “charges lourdes”, pas de remboursement immobilier ou d’enfants encore à la maison. Et pour cause : elle a ouvert son premier restaurant à… 57 ans.
“Faites quelque chose qui vous ressemble”
La recette pour que le projet de reconversion fonctionne ? “Il faut regarder ce que fait le voisin et surtout ne pas faire comme lui. Il faut raconter une autre histoire, la sienne de préférence. Il faut de la création et aussi beaucoup de transpiration”, énumère Alain Ducasse. Enfin, selon le livre blanc, “les aspirants à la reconversion sont également en quête de sens”. Ce qui compte pour eux, selon le sociologue Antoine Dain, “c’est d’exercer un métier en accord avec leurs valeurs, leur style de vie et qui soit une expérience plaisante en elle-même. Les finalités matérielles sont relativement secondaires”. Dans le cas de Frédérique Triquet, sa reconversion a fait suite à un burn-out. Son principal souvenir de la formation qu’elle a suivie à l’École Ducasse : “Le conseil d’un chef, qui m’a dit : ‘Faites quelque chose qui vous ressemble’.”
reconversion attractivité Alain Ducasse
Publié par Anne EVEILLARD