Jean-Pierre Chevènement en campagne
A moins d'un an des élections présidentielles, les candidats sortent leurs cartouches... Jean-Pierre Chevènement est le premier à étaler ses cartes. C'est sur le dossier de la baisse de la TVA sur la restauration qu'il vient d'inviter les responsables syndicaux à débattre sur la proposition de loi qu'il a déposée le 16 mai dernier.
Informelle et conviviale, la rencontre avait été organisée à Paris, au Café Divan, dans le cadre d'un dîner auquel avaient répondu présents Francis Attrazic pour l'Umih, Jean-François Girault pour la CPIH, Alain Frouard pour le SNRLH. Ont également participé Jean-Yves Autexier (sénateur) et Georges Sarre (député). C'est par le rappel de sa proposition de loi sur la baisse de la TVA, que Jean-Pierre Chevènement a ouvert les débats. Extraits.
Jean-François Girault :
Le problème de la TVA dans notre profession est simple : on achète de la marchandise à
5,5 %, et le fait de la transformer nous oblige à la revendre à 19,6 %.
Jean-Pierre Chevènement :
Qu'achetez-vous à 5,5 % ?
Jean-François Girault :
Tout sauf les boissons alcoolisées, et à partir du moment où nous transformons les
produits nous sommes taxé à 19,6 %.
Jean-Pierre Chevènement :
En fait, vous vous placez d'un point de vue de transparence et d'équité.
Francis Attrazic :
Tout à fait, on ne fait que réclamer l'équité fiscale.
Jean-Pierre Chevènement :
L'argument principal qui m'a motivé pour déposer cette proposition de loi, c'est le
dynamisme de ce secteur d'activité, image de marque de la France, mais c'est aussi un
secteur moteur qui entraîne l'agriculture, la viticulture et le tourisme. C'est un
secteur qui joue un rôle aussi important qu'Airbus pour le rayonnement de la France. Dans
l'esprit de ceux qui font les lois, on met beaucoup d'argent dans les secteurs de pointe
alors qu'ils emploient moins de main-d'uvre.
Jean-François Girault :
Les petites communes voient disparaître toute activité, on est indispensable dans notre
secteur, on est l'endroit de convivialité rêvé.
Francis Attrazic :
Il s'agit bien d'un problème d'équité. En fait la restauration souffre du problème de
la différence de traitement.
Jean-Pierre Chevènement :
Si je comprends bien, il s'agit d'une prime au McDo !
Francis Attrazic :
Effectivement, il s'agit d'une prime à la restauration qui emploie le moins de personnel.
Dans les médias, on voit surtout les grands chefs, mais il faut savoir que 80 % des
professionnels ont un ticket moyen inférieur à 100 francs.
Jean-François Girault :
Ne nous trompons pas de combat, McDo a sa place, il a ses propres clients. S'il y a une
baisse de TVA, il en profitera comme nous. En outre, beaucoup de mariage se font dans les
salles polyvalentes, un restaurateur qui organise cette manifestation se verra taxé à
19,6 % alors qu'un traiteur ne sera taxé qu'à 5,5 %, ce qui génère beaucoup de travail
au noir.
Jean-Pierre Chevènement :
Bercy ne veut pas comprendre.
Francis Attrazic :
Bercy fait un mauvais calcul. Ce problème de TVA existe depuis longtemps, mais
aujourd'hui, nos marges de manuvres sont réduites et sont devenues très faibles
rendant cette revendication plus cruciale.
Jean-Pierre Chevènement :
Argument d'équité qui ne figure pas dans notre projet de loi dans l'exposé des motifs,
mais qui est très intéressant en soi.
Francis Attrazic :
En l'espèce, nous ne revendiquons que l'équité.
Jean-Pierre Chevènement :
Pourquoi n'êtes-vous pas sur la liste des secteurs à forte main-d'uvre ?
Francis Attrazic :
Car la restauration est considérée comme un luxe et non comme une nécessité alors que
80 % des repas sont vendus à moins de 100 francs. Il y a quelques années, la
restauration pouvait être inscrite dans la liste H (taux réduit) de l'Europe.
Georges Sarre :
Il faut savoir que les gouvernements sont tous sur la même ligne de conduite, à savoir
que baisser la TVA serait une erreur car ils pensent que cette baisse ne sera pas
répercutée sur les prix et que cela ne créerait pas d'emplois.
Jean-Pierre Chevènement :
J'admire le courage qu'il faut pour tenir un restaurant, ma cantine à Belfort est le
Pot-au-feu qui est tenu uniquement par des femmes. Je suis en admiration devant la
pugnacité de ces professionnels qui font honneur à la restauration.
Georges Sarre :
La période est nouvelle, la croissance est ralentie, il est donc important pour le
gouvernement de voir comment nourrir cette croissance.
Jean-Pierre Chevènement :
Je m'insurge contre la règle qui empêche à chaque pays de taxer différemment leur
activité de restauration. Il n'y a pas de concurrence à craindre entre un restaurant à
Paris et un autre au Luxembourg. Il s'agit d'une position dogmatique. Je dénonce cette
bureaucratie qui refuse la diversité, la gastronomie fait partie de la culture. Cette
volonté d'uniformisation européenne est absurde. La concurrence pour ce secteur
d'activité ne joue pas au niveau européen.
Jean-Pierre Chevènement :
Une bonne manière de traiter le problème est de le traiter globalement. Il faut lier la
baisse de TVA à la RTT dans vos professions. Il faut montrer à Bercy en quoi la baisse
de TVA peut avoir une dynamique sur l'emploi.
Alain Frouard :
Nous pensons que si l'extension de l'accord sur les 35 heures n'a pas lieu, nous n'aurons
pas droit aux allégements de charges et nous serons tous perdants. Qu'en pensez-vous ?
Georges Sarre :
Vous avez raison, le gouvernement ne pourra pas faire autrement que de sortir un décret,
mais sans exonération de charges.
Jean-Pierre Chevènement :
Objectivement la loi sur les 35 heures n'a pas eu d'impact négatif dans une première
phase, mais dans un monde dominé par la compétitivité internationale, il faut y aller
mollo.
Il était bientôt minuit du côté de la place de la Bastille, il fallait clore ce débat
au sein duquel tous avaient pu très librement exposer leurs arguments. C'est à Jean-
Pierre Chevènement que revenait le mot de la fin : "Le groupe RCV a déposé ce
projet de loi qui est une revendication tout à fait juste, tant en matière d'équité
mais aussi car il s'agit d'un secteur moteur qui entraîne l'agriculture, la viticulture
et le tourisme."
P. Carbillet zzz16 zzz22v zzz74v
C'est de façon informelle et conviviale que Jean-François Girault et Francis
Attrazic ont débattu de la baisse de la TVA pour la restauration avec Jean-Pierre
Chevènement.
Georges Sarre : Les gouvernements ont tous la même position : le refus de baisser
la TVA.
Proposition de loi déposée par le groupe RCV le 16 mai 2001Article 1er : A compter du 1er janvier 2002, le début de l'article 279 du Code
général des impôts est ainsi rédigé : "Prestations de vente à consommer sur
place de produits alimentaires et de boissons non-alcoolisées ainsi que les recettes
provenant de la fourniture des repas dans En contrepartie de cette baisse de recettes pour l'Etat, il est proposé, dans l'article 2, que cela soit compensé par le relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du Code général des impôts, c'est-à-dire en fait ils demandent que le prix des tabacs soit relevé pour compenser cette perte. |
PROPOSITION DE LOI
(Renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du plan, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
MM. Bernard CHARLES, Gérard CHARASSE, Jean-Pierre DEFONTAINE, Paul DHAILLE, Roger FRANZONI, Robert HONDE, Jean-Paul NUNZI, Jean PONTIER, Jacques REBILLARD, Jean RIGAL, Mme Chantal ROBIN-RODRIGO, MM. Alain TOURRET, Émile VERNAUDON, Aloyse WARHOUVER et Mme Marie-HélÈne AUBERT, MM. Jean-Michel MARCHAND, Jean-Pierre CHEVÈNEMENT, Jacques DESALLANGRE, Guy LENGAGNE, Georges SARRE, Gérard SAUMADE, Michel SUCHOD, Jean-Pierre ABELIN, Henry CHABERT, Exposé des motifs L'évolution des modes de vie, la déconnexion entre lieu de travail et
d'habitation ont contribué, au cours des dernières décennies, à un important
développement des services de restauration. Ainsi, selon le cabinet d'études Girasic,
plus de 13 % des repas principaux consommés par les Français se font hors du
domicile. Le marché représente en 2000 près de 7 milliards de prestations contre
1,8 milliard en 1970.
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L'Hôtellerie n° 2728 Hebdo 26 Juillet 2001