Insécurité - LES ENTREPRISES DES CHR SONT DE PLUS EN PLUS SOUVENT VICTIMES D'AGRESSIONS. UN PRÉJUDICE D'AUTANT PLUS GRAND QU'ELLES DOIVENT AUJOURD'HUI ADOPTER DES MESURES DE SÉCURITÉ ONÉREUSES.
Parallèlement à l'inquiétante progression du nombre de braquages en région parisienne qui affiche une hausse explosive de 21 % au premier semestre 2001 par rapport à la même période de l'année 2000, les hôtels, et plus encore les restaurants, sont de plus en plus fréquemment victimes de hold-up. Il n'est plus de rubriques de faits divers qui ne révèlent régulièrement l'attaque à main armée d'un McDonald's, d'un Quick, mais aussi d'hôtels et de restaurants indépendants ou de chaînes. Les voitures forcées dans les parkings des restaurants sont aussi monnaie courante, comme cela l'était déjà depuis longtemps en hôtellerie. Le mois de septembre affiche ainsi de manière presque routinière son lot de braquages : Buffalo Grill à Collégien, Quick à Mantes-la-Ville, Kyriad à Torcy, un restaurant grec à Mantes-la-Jolie, et même le PMU de la place Saint-Charles en plein Paris... "Les attaques contre les commerçants et les restaurateurs se font de plus en plus violentes et de façon de plus en plus spectaculaire, avec même des voitures bélier", commente un peu las José Palavoine, enquêteur de police. Du coup, l'insécurité règne avec sa caravane de peur et d'inquiétude. Les professionnels dans des zones à risques, qui avaient déjà du mal à trouver du personnel, peinent à rassurer leurs équipes.
Les établissements de banlieue plus ciblés
Point n'est besoin d'être inspecteur de police pour comprendre l'attrait nouveau que
représentent les CHR. Ils ne disposent que très rarement de systèmes de surveillance,
au contraire des autres commerces. Par ailleurs, le braquage des établissements de
catégorie économique, visiblement les plus touchés, peut s'expliquer par le fait qu'on
y paie plus facilement en espèces qu'en chèques ou, en tout cas, bien plus fréquemment
que dans le haut de gamme. Enfin, les unités de chaînes, vraisemblablement plus
convoitées que d'autres car elles traitent plus de couverts - entre 150 et 450 en
restauration à service complet, et jusqu'à 1 100 en moyenne en fast-food -, sont souvent
situées dans les zones d'activité de banlieue, c'est-à-dire isolées dès la fermeture
des bureaux. Elles représentent des cibles de choix. Si ces opérations sont loin d'être
les casses du siècle, elles ne sont pas non plus négligeables.
En juin 2000, la somme de 80 000 francs avait été soutirée dans un PMU de banlieue
parisienne. Au McDonald's de Champs-sur-Marne en région parisienne, les employés
séquestrés avaient dû livrer aux bandits la caisse dont le montant s'élevait à 19 000
francs. Plus tard, ont été dérobés 22 000 francs au Côte à Côte de Fleury-Mérogis
et 33 500 francs dans un autre restaurant-PMU parisien. Toutefois, dans la majorité des
cas, les sommes dérobées sont dérisoires, car nombre de ces pillards ne sont que des
amateurs, travaillant sans préparation. Ainsi, au Buffalo Grill de Collégien
(Seine-et-Marne), le butin s'avéra bien maigre ; les jeunes gangsters eurent la mauvaise
idée de faire leur entrée un lundi soir, à l'heure où le service ne faisait que
débuter...!
L'uvre d'amateurs
Par ailleurs, si l'on déduit les chèques et tickets-restaurant, lesquels sont
instantanément tamponnés, la caisse n'est bien souvent que très peu remplie. "Les
jeunes délinquants ont de nouveaux comportements incohérents. Ils vont tranquillement
déjeuner dans un fast-food dans lequel ils ont parfois leurs habitudes, en sortent, puis
tournent les talons en décidant soudainement de braquer la caisse", explique un
officier de police. "Le danger supplémentaire est qu'il s'agit souvent de très
jeunes qui n'ont pas le sens du danger et qui peuvent rapidement devenir très violents",
ajoute-t-il. Pour autant, les CHR ne peuvent négliger ce phénomène car, plus encore que
de sauver la caisse, il s'agit de garantir la sécurité des employés et des clients.
Les risques ne se situent pas seulement dans les braquages. Les responsables
d'exploitation, qui, la plupart du temps, ne peuvent faire appel à des convoyeurs de
fonds dont le coût leur paraît prohibitif, sont obligés à leurs risques et périls de
porter eux-mêmes, chaque jour, les recettes à leur banquier. Le directeur du Mas
d'Artigny à Saint-Paul-de-Vence a ainsi payé de sa personne une attaque à main armée,
menée par des gangsters sur le chemin de la banque.
Les professionnels s'organisent
A l'instar des banques ou des grands magasins de distribution, les restaurants et les
hôtels commencent donc à mettre en place des systèmes de sécurité. Même certains
groupes s'organisent, à l'exemple d'Envergure qui a nommé un ancien gendarme comme une
sorte de 'Monsieur Sécurité' détaché pour conseiller les exploitations. Dans les zones
à risques, les patrons, aidés par la police ou la gendarmerie, forment leur personnel à
savoir réagir face à une éventuelle agression. Généralement, la consigne est de
rester docile et de ne pas jouer les héros. Nombre d'établissements dans les CHR ont
également investi dans un équipement de télésurveillance, qui représente parfois un
sacrifice financier. Le coût du matériel est d'environ 20 000 francs pour une unité
petite ou de taille moyenne.
A cela, il faut ajouter 1 000 à 1 500 francs facturés mensuellement par le service de
contrôle. Ils sont encore peu d'hôtels et de restaurants à faire appel aux services de
vigiles, à l'exception des grandes chaînes de restauration rapide, car cette solution
reste relativement onéreuse. La protection d'un vigile coûte en effet entre 120 et 130
francs l'heure. Les établissements les emploient donc très épisodiquement, d'autant
plus que les gardiens ne veulent louer leurs services qu'à la journée, et non pas
uniquement pendant les heures de service comme le souhaiteraient les gérants. Devant le
développement de la petite délinquance, avec des voleurs de plus en plus jeunes et qui
n'ont pas peur de se lancer dans des opérations audacieuses et imprévisibles, les
hôteliers et les restaurateurs se voient confrontés à de nouvelles difficultés, qui
s'ajoutent à celles qu'ils ont déjà à surmonter.
C. Lerenard zzz20a
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L'Hôtellerie n° 2743 L'Hôtellerie Économie 8 Novembre 2001