C'est aux affaires sociales du SGIH (devenu plus tard SFH), voici 26 ans, qu'Alain-Philippe Feutré est entré 'en syndicalisme' patronal. A la présidence du syndicat depuis 14 ans, il décide en cette fin d'année de passer le flambeau. C'est un hôtelier parisien, Christian Gatien, qui devrait le remplacer.
Alain-Philippe Feutré restera à la disposition du SFH, pour les dossiers sur lesquels
il a une expertise spécifique.
L'Hôtellerie : Le 19 décembre prochain, vous allez
remettre votre démission alors que rien ne vous y oblige, pourquoi une telle décision
alors que l'accord RTT que vous avez négocié au nom du SFH devrait être étendu ?
Alain-Philippe Feutré : Rien ne m'y oblige, c'est
vrai, mais je n'ai plus d'hôtel depuis 2 ans maintenant, trop de responsables syndicaux
sont déconnectés des réalités économiques et sociales parce qu'ils n'ont plus
d'affaires, je ne veux pas être de ceux-là, c'est la raison pour laquelle depuis un peu
plus d'un an, je demandais à être remplacé. Aujourd'hui, au sein du conseil
d'administration, nous avons trouvé un candidat à la présidence, je donnerai donc ma
démission pour lui permettre de reprendre le flambeau. Je refuse tout poste honorifique,
mais je reste à la disposition du SFH pour les dossiers sur lesquels j'ai une expertise
spécifique, rien de plus.
L'Hôtellerie : Vous tournez la page en matière de
syndicalisme patronal. Doit-on y voir une déception ?
Alain-Philippe Feutré : Il est exact que je suis
déçu de la manière dont fonctionne le dialogue patronal aujourd'hui. J'ai toujours eu
l'idée qu'il fallait au-delà de la simple défense des entreprises, que le patronat soit
à même de faire des propositions, pour construire, pour que les entreprises se
projettent dans l'avenir. Malheureusement, nous ne sommes capables que de nous opposer...
C'est un peu court... Qui plus est, la plupart du temps, à travers les discours que
tiennent les uns et les autres, nous trompons nos adhérents en leur faisant croire que le
débat est national alors qu'il est de plus en plus européen. 70 % des textes actuels
émanent de Bruxelles. Et là, en dehors de ce que fait l'Hotrec, personne ne s'implique.
Aujourd'hui, je me sens mieux au niveau de l'IH&RA (N.D.L.R. : où il occupe le poste
de directeur) où, intellectuellement, je trouve plus de satisfaction parce que je
travaille réellement pour l'avenir de l'hôtellerie-restauration sur des sujets concrets.
J'ai davantage l'impression d'être utile, de construire.
L'Hôtellerie : Vous avez signé l'accord RTT à 35
heures, on attend son extension d'un jour à l'autre, ne pensez-vous pas que réduire le
temps de travail à 35 heures dans l'hôtellerie-restauration ne mette en danger certaines
entreprises ?
Alain-Philippe Feutré : Que les choses soient claires
: nous avons signé l'accord, mais ce n'est pas nous qui avons décidé de cette loi ! Je
ne serai jamais allé proposer de limiter le temps de travail à 35 heures ! C'est
justement pour éviter que la loi ne soit trop assassine pour les entreprises que nous
avons tout fait pour négocier son application. Mais ce que nous constatons c'est que, une
fois la loi votée, il était de notre responsabilité d'en négocier des modalités
d'application, nous avons obtenu un échéancier, des assouplissements, des indemnités.
Pour de simples raisons démographiques, de moins en moins de jeunes entrent chaque année
sur le marché du travail. Dans le monde du tourisme, toutes les entreprises vont être à
35 heures. Comment allions-nous, dans les CHR, attirer demain encore des jeunes avec une
telle concurrence si nous restions en marge en matière de temps de travail ? Ce n'est
qu'une question de bon sens.
L'Hôtellerie : Que pensez-vous de la position de ceux
qui demandent à ce que la baisse de la TVA sur la restauration soit la contrepartie de la
réduction du temps de travail ?
Alain-Philippe Feutré : Ce n'est pas en ces termes
que l'on doit voir le débat. Bien sûr que je suis favorable à cette baisse de la TVA,
mais je voudrais que l'on m'explique en quoi elle permettra aux employés de vivre mieux,
d'être mieux payés ! Quel gouvernement croirait une telle argumentation ? Aucun syndicat
ne peut s'engager au nom des entreprises à créer des emplois, à augmenter les salaires.
La baisse de la TVA, c'est encore une décision qui doit être défendue sur le plan
européen. Un exemple de plus...
L'Hôtellerie : Avant de partir, vous avez mis en place
une logique d'union avec le SNRLH, pensez-vous que ce soit une opportunité pour renforcer
le dialogue patronal ?
Alain-Philippe Feutré : Oui, je crois. Nous avons eu
des expériences très positives avec Jacques Mathivat, et nous avons travaillé ensemble
dans de très bonnes conditions. Nous représentons, dans les deux structures, des
entreprises avec des images très fortes. Qui plus est, depuis qu'un certain nombre de
structures départementales ont quitté la CPIH pour rejoindre le SNRLH, et que l'Upac les
a également rejoints, nous avons, ensemble, une force de plus en plus représentative.
Une fusion serait donc parfaitement cohérente à mes yeux. Aux membres maintenant d'en
décider. zzz4v
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L'Hôtellerie n° 2748 Hebdo 13 Décembre 2001