LE MÉPRIS
"Sympathique", le mot a été lâché par Laurent Fabius,
ministre de l'Economie et des Finances, pour qualifier le sentiment que lui inspire la
profession de restaurateur. Gageons que notre grand argentier, surtout en période
électorale, trouve tout aussi "sympathique" les cordonniers, les
coiffeurs, les assistantes sociales, les cheminots ou les gardiens de musée. Autant dire
que le mouvement de 'grève' de la TVA n'inspire guère les services de Bercy, dont le
patron a dénoncé l'initiative en déclarant qu'elle est non seulement illégale (on s'en
serait douté), mais également coûteuse pour les finances publiques.
Et Monsieur Fabius d'en rajouter en précisant : "Réduire la TVA sur la
restauration à 5,5 % entraînerait un manque à gagner de 3 milliards d'euros, qui
seraient alors à la charge de l'ensemble du contribuable." Ce bel élan de
solidarité est nouveau chez nos gouvernants : lors de la calamiteuse mise en place des 35
heures dans l'improvisation la plus totale, lors des concessions salariales accordées aux
médecins hospitaliers, aux gendarmes et autres catégories mécontentes, il ne semble pas
qu'on ait beaucoup évoqué les conséquences financières pourtant redoutables des
mesures adoptées.
L'Umih a le courage de poser un problème auquel la profession se heurte depuis des
années sans obtenir de réponse satisfaisante, ne serait-ce qu'un début de solution. Ce
n'est jamais le moment, expliquent les politiques quand ils sont aux affaires, alors
qu'ils ne sont pas avares de promesses au moment de séduire l'électeur. Le mouvement de
révolte fiscale qui se dessine aujourd'hui se fonde autant sur le sentiment de mépris
ressenti par toute une profession excédée que sur des considérations de pure technique
comptable : après tout, c'est le client final qui règle cette fameuse TVA devenue
symbole de toutes les frustrations.
Mais il est temps pour les politiques, qu'ils soient en charge des affaires ou aspirent à
le devenir, de prendre véritablement leurs responsabilités et de dire enfin la vérité
sur ce dossier qui prend une nouvelle dimension. La révolte contre l'impôt est plus que
le signe d'une impatience corporatiste : c'est le cri de ceux qui ne supportent plus
l'arrogance et le mépris.
Autant l'écouter avant qu'il ne soit trop tard.
L.H. zzz80 |