Alsace
Le Conseil interprofessionnel des vins d'Alsace (Civa) et le CRT veulent dynamiser et diversifier le tourisme vitivinicole. Etat des lieux des premières réflexions qui intéressent les hôteliers-restaurateurs.
© Zvardon
Le vignoble alsacien
véhiculerait-il auprès des touristes l'image d'une carte postale plutôt que celle d'un
lieu de vie et de bonne chère ? C'est, en caricaturant à peine, le constat rapide que
l'on pourrait tirer du diagnostic réalisé sur la route des vins d'Alsace par le cabinet
TMO Régions à la demande de l'Association départementale du tourisme du Haut-Rhin, en
complément de l'enquête sur le tourisme vitivinicole en France commandée par l'Afit.
"Le centrage du tourisme vitivinicole sur le patrimoine architectural et
historique de la route des vins, associé à une faible notoriété des activités
encadrées de découverte du vignoble (sentier, jardin des vignes...), se révèle
insuffisant pour augmenter la durée moyenne de séjour des touristes dans le vignoble et
fidéliser cette clientèle, ce qui paraît indispensable", soulignent les
experts. La durée moyenne de séjour - 6,5 nuits - est inférieure à celle de l'ensemble
des 10 autres régions viticoles (8,4 nuits), mais supérieure à la moyenne régionale
(4,6 nuits). Conséquence logique : les touristes dépensent généralement moins en vin
- 114,49 e en moyenne contre 136,44 e au niveau national -, et sans doute aussi, moins au
restaurant. Or, cette clientèle dispose d'un pouvoir d'achat intéressant. Et l'Alsace
bénéficie, avec la route des vins, d'un atout majeur, internationalement reconnu.
"Difficile de mobiliser les énergies"
Fort de ce constat, et relayant ainsi la récente création d'un club de développement
des produits touristiques autour du vignoble par Maison de la France, le Civa et le CRT
ont initié 3 chantiers de réflexion centrés sur le vin : vin et culture, vin et loisirs
actifs, vin et gastronomie. Animatrice de ce dernier atelier, Isabelle Sipp, viticultrice
de Niedermorschwihr (Haut-Rhin), garde les pieds sur terre : "Nous allons d'abord
faire le point sur les offres existantes et voir si l'on peut en améliorer la cohérence."
Une tâche ardue ! Certes, les initiatives sont là : "Mais leur notoriété
dépasse rarement le cadre local", remarque Christophe Guillo, directeur du
groupement des hôteliers-restaurateurs du Haut-Rhin, en citant l'exemple de Vignoble
Gourmet qui associe cuisiniers et viticulteurs de la région de Guebwiller (Haut-Rhin)
dans la promotion des vins locaux. "La vraie difficulté consiste à mobiliser les
énergies", affirme-t-il. "L'activité est presque trop facile en Alsace
où la saison dure de Pâques à la Toussaint", tente d'expliquer Lucas De Jong,
hôtelier-restaurateur à Husseren-les-Châteaux, 405 âmes et 20 viticulteurs. D'origine
néerlandaise, il collabore depuis longtemps avec les exploitants locaux : "L'été,
j'organise pour mes clients une petite promenade dans les vignes puis une visite de cave
accompagnée d'une dégustation. Cela fonctionne très bien. C'est un investissement à
long terme : en hiver, le client boit le vin et repense à Husseren." En mars,
Lucas De Jong a même emmené une partie des vignerons locaux pour un salon itinérant au
Danemark. "Les restaurateurs privilégient leurs réseaux personnels pour créer
des repas à thème qui correspondent, il est vrai, à une véritable demande",
remarque Daniel Zenner, formateur auprès des restaurateurs et également membre de
l'atelier de réflexion. Lui-même a monté une série d'animations transversales
originales avec des cuisiniers souvent réputés. Exemple : lors d'une "dégustation
de foin", les clients apprennent à reconnaître les différents foins et suivent
un petit cours sur l'histoire de l'agriculture locale avant de déguster du cochon de lait
cuit au foin avec un bon verre de vin de paille...
Objectif qualité
Alors que les viticulteurs indépendants et les cavistes ont répondu présents aux
premières réunions du Civa et du CRT, les représentants de l'hôtellerie-restauration
se sont faits assez discrets. "Ils ont autant besoin de nous que nous d'eux. Tel
est le message qu'il faut leur faire passer", souligne Yvelise Sciard, en charge
des relations publiques du Civa. Isabelle Sipp reste prudente : ce travail préparatoire
vise à créer "un ou deux produits", comme un 'package' comprenant une
ou plusieurs nuitées à l'hôtel, la visite d'une cave et la dégustation de vins, et des
cours de cuisine. Prenant exemple sur "le centre de vinothérapie du Bordelais",
le CRT souhaite que ce type de produits "s'intègre dans un objectif de tourisme
de qualité". En filigrane, conclut un observateur, l'intention est de couper
l'herbe sous le pied des 'margoulins' qui profitent "du touriste pour faire du
chiffre".
P. Lawless zzz46v
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L'Hôtellerie n° 2763 Hebdo 4 Avril 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE