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ACTUALITÉ JURIDIQUE

Epilogue de l'affaire Esnault

Des restaurateurs obtiennent 344 000 e d'indemnités

C'est après 16 longues années de procédures que les époux Esnault viennent d'obtenir réparation pour une faute lourde commise par l'Etat en raison du mauvais fonctionnement de la justice, qui les a conduits au dépôt de bilan, car une décision de justice avait déclaré à tort leur établissement en ruine.

En accordant 344 000 e aux époux Esnault, La cour d'appel d'Angers dans un arrêt en date du 11 septembre 2002 a doublé le montant des dommages et intérêts accordé précédemment à ce couple de restaurateurs qui a attaqué l'Etat pour faute lourde en raison d'un mauvais fonctionnement de la justice. Pour Jacques Esnault, cette victoire a un goût amer : "Ils ont doublé l'indemnisation, tout en reconnaissant que le préjudice subi était plus important soit 688 000 e mais ils ne nous ont accordé que 344 000 e. Les magistrats ont reconnu et confirmé la faute lourde et inexcusable de L'Etat, mais ils ne nous accordent que 50 % de notre droit à réparation." S'ils sont un peu désabusés face à ce résultat, ils reconnaissent que cette décision de justice "est mieux au niveau de la considération professionnelle, car elle montre qu'un restaurateur qui travaille bien a le droit de gagner sa vie".

16 ans de batailles judiciaires
Cet arrêt de la cour d'appel d'Angers est l'épilogue d'une affaire judiciaire qui a duré 16 années. Une affaire banale au départ. Ce couple de restaurateurs reprend, en 1978, un hôtel-restaurant, le Saint-Pierre à Fougères. Après quelques années d'exploitation, ils demandent au propriétaire des murs d'effectuer certains travaux de rénovation qui lui incombent. Propriétaire qui fait la sourde oreille, et conduit naturellement Jacques et Nelly Esnault à aller devant la justice pour obliger le propriétaire à s'exécuter. Malheureusement, le premier jugement conclura que les grosses réparations invoquées concernaient des travaux de reconstruction de l'immeuble. Ils font donc appel de ce jugement. En 1986, la cour d'appel d'Angers confirmera ce jugement, mais l'aggravera en déclarant l'état de ruine de leur établissement, ce qui eut pour conséquence directe de dégager le propriétaire de tous travaux et de toute responsabilité quant à l'état de l'établissement.
A cette époque, ils n'avaient pas encore conscience que ce jugement était lourd de conséquences en déclarant que l'immeuble était en ruine (alors que ce n'était pas le cas).
En effet, en 1987 après de fortes tempêtes qui endommagent la toiture de leur établissement, ils retournent devant les tribunaux pour demander à ce que le propriétaire prenne en charge ces grosses réparations. La cour d'appel leur donnera raison.
Mais en 1993, la cour de cassation annulera cette décision au motif "de l'autorité de la chose jugée". Le jugement de 1986 ayant déclaré leur établissement en état de ruine, c'était terminé, ils ne pouvaient plus revenir sur la qualification de leur établissement et surtout ils ne pouvaient plus demander au propriétaire d'effectuer les travaux qui normalement lui incombaient. Ne pouvant plus exploiter l'hôtel, le chiffre d'affaires du restaurant commence lui aussi à chuter inexorablement avant de conduire les époux Esnault au dépôt de bilan en 1994.

Mettre en cause la responsabilité de l'Etat
En 1995, le juge Alain le Caignec, qui avait déclaré dans son arrêt de 1986 l'état de ruine du Saint-Pierre, avait reconnu dans un courrier adressé aux époux Esnault, l'erreur qu'il avait commise en raison d'une surcharge de travail.
Fort de ce courrier, auquel beaucoup ne croyaient pas ou voulaient voir disparaître, Jacques et Nelly Esnault ont assigné l'Etat français. Après des tentatives d'indemnisation à l'amiable qui échoueront toujours au dernier moment, en novembre 2000, la justice reconnaîtra enfin la faute lourde de l'Etat en raison d'un fonctionnement défectueux de la justice, mais n'accordera à l'époque que 1,2 millions de francs dommages intérêts aux époux Esnault. Ce qui a conduit une nouvelle fois le couple de restaurateurs devant les tribunaux. Où cette fois l'Etat reconnaissait son erreur, mais estimait que la somme allouée réparait largement le préjudice des époux.
La cour d'appel d'Angers a doublé le montant de cette indemnité, en la portant à 344 000 e, constituant la plus forte indemnisation de l'Etat accordée à des victimes. Las de ces batailles judiciaires, les époux Esnault souhaitent maintenant arrêter le combat, pour essayer de tourner la page.
P. Carbillet zzz22v

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L'Hôtellerie n° 2787 Hebdo 19 Septembre 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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