Malgré la baisse de fréquentation de certains touristes étrangers comme les Américains et les Japonais, les professionnels de l'hôtellerie semblent avoir limité la casse. Profitant des nouvelles attitudes des voyageurs et de la mise en place de l'Euroland, ils ont séduit davantage les marchés de proximité. Une question de sécurité...
Les images du 11
septembre, tout le monde les a vues. Comme l'essentiel d'entre-nous, les professionnels de
l'hôtellerie française ne les ont pas oubliées. D'autant que certains recevaient à
l'époque un grand nombre de touristes américains. Douze mois plus tard, ces derniers ont
retrouvé la possibilité de voyager. Mais, le cur n'y est plus. La peur de voler
demeure. Le tout sur fond de conjoncture économique morose. "Depuis les mois qui
ont suivi les attentats, il y a eu en effet une restructuration des habitudes de voyages,
la préférence allant aux destinations plus proches de chez soi, mieux connues et plus
faciles d'accès avec des moyens de transport perçus comme plus sûrs", observe
l'OMT.
De nouvelles attitudes dont la France a bien sûr subi les conséquences de plein fouet.
Selon les statistiques de l'Insee et de l'Ortif, la fréquentation hôtelière des
Américains a du reste baissé de 17 % sur Paris, de janvier à avril 2002. Le CRT Riviera
Côte d'Azur évalue, lui, à 35 % la chute du nombre de vacanciers américains ayant
fréquenté les rivages de la Grande Bleue cet été. Quant aux hôteliers, ils constatent
eux aussi une forte diminution de ces visiteurs. "Globalement, nous avons
enregistré une baisse de 2 % de la clientèle en provenance des Etats-Unis",
indique ainsi Jacques-Olivier Chauvin, directeur marketing et commercial de la chaîne
Relais & Châteaux.
"Après les événements, nous avons perdu jusqu'à 45 % de nos clients
américains", précise pour sa part François Delahaye, patron de l'Hôtel Plaza
Athénée. Et Rodolphe Ermel, président de Best Western Europe, d'ajouter : "Au
terme des 8 premiers mois de l'exercice 2002, nous observons toujours un net
fléchissement de la clientèle américaine, en particulier sur le segment loisirs."
"La clientèle américaine a brutalement chuté de près de 60 %",
surenchérit Pierre Ferchaud, président directeur général du Bristol.
La prudence est de mise
En dépit de cette réduction du tourisme mondial, "les perspectives pour l'année
en cours sont dans l'ensemble positives", estime le secrétariat d'Etat au
Tourisme. Les opérateurs hôteliers français se refusent toutefois à afficher un
optimisme aussi net à l'approche de l'automne, et restent prudents quant à l'avenir.
D'autant plus que l'éventualité d'une intervention militaire en Irak aurait selon eux
des incidences énormes sur la bonne marche de leurs affaires. Ces dernières ont bel et
bien repris du poil de la bête depuis le 11 septembre 2001, mais il n'y a pas de quoi
crier victoire.
En témoignent les statistiques du cabinet PKF Hotelexperts. Le revenu par chambre
disponible (RevPar) de l'hôtellerie haut de gamme de la capitale tend à se stabiliser ne
perdant que 1,5 % à 196,66 e au terme des 8 premiers mois de l'année alors que celui de
l'hôtellerie moyenne gamme fléchit de 6,3 % à fin juillet. Le RevPar des hôtels 2
étoiles de province poursuit lui en revanche sa progression (+ 2,1 % à fin juillet)
tandis que celui des unités 3 étoiles et 4 étoiles régresse respectivement de - 1,4 %
et - 1,6 %.
Malgré tout, chacun est unanime sur un point précis : la contraction du tourisme
international semble au fil des mois disparaître progressivement. "La situation
pourrait être en effet bien pire", indique ainsi un expert du secteur. Et de
poursuivre : "Comparativement à d'autres pays, l'hôtellerie française s'en tire
plutôt pas mal."
Naissance d'un grand marché européen
Pourquoi donc ? "Parce que beaucoup d'hôteliers se sont préparés à la crise.
Ils avaient effectivement pris conscience d'une récession économique sous-jacente",
explique Philippe Gauguier de PKF Hotelexperts. "Les effets du 11 septembre n'ont
fait en réalité que cristalliser les problèmes économiques mondiaux déjà existants",
affirme à son tour Jean-Pierre Soutric, directeur marketing du Four Seasons George V à
Paris. Fort de ce constat, la plupart des professionnels de l'hôtellerie ont fait preuve
d'une grande réactivité afin de compenser la perte des flux de clientèles lointaines
qui se profilait à l'horizon.
Profitant de surcroît de la mise en place de l'euro qui favorise indiscutablement
l'attraction tarifaire des établissements hexagonaux, les professionnels ont en fait tout
entrepris pour attirer leurs voisins Britanniques (+ 14 % sur Paris fin avril 2002),
Nord-Européens, Espagnols (+ 7 % sur Paris au terme du mois d'avril) ou bien encore ceux
issus des Pays de l'Est comme la Russie, la Pologne. Reste que tout ceci a nécessité
d'importants investissements promotionnels.
Efforts de promotion
Du côté des Relais & Châteaux par exemple, le réseau a choisi d'occuper le terrain
en renforçant ses actions de promotion en Allemagne, Autriche, Benelux, Italie,
Espagne... "Nous n'avons jamais autant commercialisé l'hôtel auparavant. J'ai
même emmené mes concierges à
l'étranger pour qu'ils vantent les mérites de notre établissement", déclare
François Delahaye.
Si les marchés de proximité, dont l'approche est souvent moins coûteuse, ont été au
goût du jour, les hôteliers n'en ont pas pour autant oublié les Américains. "Il
s'agissait en effet de leur montrer les preuves de notre attachement. Raison pour laquelle
nous avons poursuivi nos démarches commerciales sur cette destination",
témoigne un professionnel parisien. "Aujourd'hui, les Américains ont envie de
voyager autrement, avec ceux qui leur sont chers. Ils veulent partager ensemble des
moments forts", commente Jean-Pierre Soutric. Autrement dit, le séjour en
famille est à l'heure actuelle à l'ordre du jour. Sans oublier l'importance grandissante
de la sécurité. L'hôtellerie n'échappe pas en effet à cette nouvelle tendance de fond
qui a d'ailleurs eu raison de la réalité économique des quelques compagnies aériennes.
Sécurité renforcée
"Il est clair que les hôtels devront proposer à l'avenir des solutions
garantissant au maximum la sécurité de leurs clients. Pour ce qui concerne Best Western,
les serrures magnétiques ou à puce seront obligatoires d'ici la fin 2003",
indique Rodolphe Ermel. Dans les palaces, on a aussi pleinement intégré cet impératif.
"Nous avons triplé le nombre de caméras dans l'hôtel depuis ma prise de
fonction", note le directeur du Plaza Athénée.
Autant de nouveaux éléments qui bénéficieront à l'image de marque, d'ores et déjà
bien établie, de l'hôtellerie française. D'ailleurs, ce n'est pas un hasard si le
palace de l'avenue Montaigne voit son chiffre d'affaires grimper de 10 % à 12 % à fin
août. Rien d'étonnant non plus à ce que la centrale des Relais & Châteaux ait
augmenté de 5 % le nombre de ses réservations sur l'exercice clos le 30 juin dernier.
C. C. zzz16 zzz70
LE WTTC ÉVALUE L'IMPACT Le World Travel & Tourism Council (WTTC, Conseil mondial des voyages et du tourisme) a dressé un bilan des conséquences des attentats dans le domaine touristique. Composé des 1 000 premières sociétés mondiales du secteur du tourisme, l'organisme a estimé que la demande avait chuté de 7,4 % en 2001 et 2002 par rapport aux prévisions de croissance pour cette période. Aux Etats-Unis, la baisse de la demande aurait atteint les 8,5 %. L'Europe n'a pas échappé à l'onde de choc terroriste. La demande dans le secteur des voyages et du tourisme aurait ainsi régressé de 4,5 % en 2001 et 3,1 % en 2002 par rapport aux prévisions de croissance. Jean-Claude Baumgarten, président du Conseil mondial des voyages et du tourisme, s'est montré optimiste : "La reprise s'amorcera dès l'année prochaine. La croissance de la demande devant atteindre le niveau record de 6 % en 2003 et générer 6,8 millions d'emplois", a ainsi affirmé l'intéressé. |
*Source : Organisation mondiale du tourisme
"Le business reste encore fragile"Le marché de la restauration a-t-il retrouvé son niveau d'activité d'avant les
événements du 11 septembre 2001 ? "Oui, la crise est digérée. Dès le mois
d'octobre, l'activité est redevenue normale", répond d'emblée Philippe Labbé,
directeur général à McDonald's France. "Dès le début décembre 2001, nous
avons retrouvé une activité normale", renchérit Christophe Caraux, de la
chaîne de restauration El Rancho. Avant d'ajouter : "Début janvier, c'est l'euro
qui a rendu les gens frileux." Si globalement, les professionnels répondent par
l'affirmative, il existe autant de réponses que de type de restauration. Développement inchangé |
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L'Hôtellerie n° 2787 Hebdo 19 Septembre 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE