Fuites et indiscrétions oblige, c'est de plus en plus tôt, par rapport à son calendrier de sortie du guide, que Michelin se voit dans l'obligation de divulguer la liste des promus de son édition 2003.
Il faudra attendre encore quelques semaines pour le trouver en librairie. Le point sur les nouveautés.
Derek Brown, directeur du Guide Rouge
"En France, la cuisine tient le cap""Je n'ai
pas eu le temps de parler avec certains professionnels, et nous nous sommes trouvés
placés en porte-à-faux à cause d'une information incomplète qui a contrarié notre
démarche de mise en place." |
Propos recueillis par Jean-François Mesplède
L'Hôtellerie : Quelles nouveautés vont découvrir les
lecteurs du Guide Rouge 2003 ?
Derek Brown : Les changements intervenus au niveau des
étoilés que nous venons de rendre public, mais aussi le symbole du Bib Hôtel concernant
les bonnes nuits à petits prix. C'est le pendant du Bib Gourmand et cela va dans le même
sens. Ce ne sont pas forcément des établissements de caractère, mais de petites
adresses parmi les autres. Les lecteurs constateront une certaine stabilité chez les
étoilés dont le nombre n'est qu'en légère diminution. L'exigence demandée par la
clientèle se retrouve dans la sélection.
L'Hôtellerie : Quelles sont les grandes tendances chez
les étoilés ?
Derek Brown : Ce qui m'intéresse, c'est de voir que
la cuisine tient le cap en France malgré les difficultés, une conjoncture défavorable
et quelques incertitudes quant à l'avenir. Avoir trouvé deux 3 étoiles et trois 2
étoiles, ce n'est pas rien et c'est important. Il y a d'intéressantes promotions, des
nouveaux, des jeunes qui progressent, et ce renouvellement dans un tel contexte est
enrichissant pour la clientèle. Enfin certains retraits d'étoiles ne sont pas dus à la
qualité de la cuisine mais à des changements divers, des ventes ou des départs.
L'Hôtellerie : Alors que quelques médias annonçaient
deux établissements sur la sellette, il n'y a cette année aucune perte au niveau des 3
étoiles...
Derek Brown : C'est bien la preuve que, malgré
certaines difficultés, la profession n'a pas baissé les bras ! Nous n'avons cependant
pas tenu compte de la conjoncture ou de certaines difficultés économiques. Nous
raisonnons toujours de la même manière : a-t-on ou non un dossier solide, vérifiable
qui nous permet de prendre les décisions ? Si nous ne l'avons pas, on ne prend pas de
décisions. Pour le reste, je laisse faire les spéculations. Je ne dévoile jamais les
discussions que je peux avoir en confiance avec tel ou tel, sinon je perdrais toute
crédibilité. Dès lors, ce qui peut être écrit l'est sous l'entière responsabilité
de ceux qui l'écrivent.
L'Hôtellerie : Chez Michelin, on a souvent parlé de
donner 3 étoiles à un établissement modeste. Or cette année encore, vous couronnez la
cuisine de deux palaces. Cette idée exprimée relève-t-elle du fantasme ?
Derek Brown : Pas du tout. Nous voulons simplement
attribuer les 3 étoiles où elles se trouvent ! Cette année, ce sont de grandes maisons,
mais on peut aussi imaginer les donner ailleurs. Si nous trouvions un petit restaurant
modeste avec une cuisine fabuleuse, nous n'aurions aucune raison de ne pas le faire. Mais
cela suppose aussi un certain professionnalisme, un service qui met la cuisine en valeur.
Ce n'est pas le grand luxe ou le grand confort qui sont déterminants, mais il faut un
lieu bien adapté à la cuisine. Pourquoi pas un petit bistrot ? Mais nous ne l'avons pas
trouvé...
L'Hôtellerie : Cette année Philippe Legendre est
couronné au Cinq. Et qui d'Alain Ducasse ou de Franck Cerutti est promu au Louis XV ?
Derek Brown : Les 3 étoiles sont pour la cuisine que
l'on trouve, à un moment donné, dans un restaurant avec tout ce qui va avec pour
permettre au cuisinier de grand talent de s'exprimer. Ce n'est pas seulement un homme ou
une femme. Si un cuisinier s'en va et qu'un autre, aussi talentueux, le remplace et fait
ses preuves, il n'y a pas de raison de changer. Chaque cas est différent et il n'y a
aucun automatisme. Si Franck Cerutti s'en va cet automne, on ne va pas forcément
supprimer cette troisième étoile. Pour moi, c'est le restaurant qui a 3 étoiles car
l'on sait bien que ce n'est pas un seul homme qui fait tout ça. Ce sont plusieurs
morceaux d'un puzzle dont toutes les pièces doivent être cohérentes. Si la cuisine vaut
3 étoiles, tout le monde y contribue.
L'Hôtellerie : Beaucoup évoquent encore les 'oubliés'
de Michelin au plus haut niveau. Olivier Roellinger par exemple...
Derek Brown : 3 étoiles, c'est une cuisine de très
haut niveau à chaque plat, chaque jour et pour chaque client. Notre but n'est pas de
cacher à nos lecteurs un restaurant qui les mériteraient. Les clients recherchent
aujourd'hui la meilleure cuisine dans le monde. Nous voulons rester fidèles à notre
clientèle : si nous trouvons un restaurant valant 3 étoiles, nous les donnerons. Il n'y
a ni quota, ni favoritisme et je n'ai aucun préjugé culturel. Je ne joue pas la
polémique et ne fais pas de coup de marketing. Je suis un peu déçu que certains
puissent penser cela de notre guide.
L'Hôtellerie : Une question plus personnelle : certains
imaginent Derek Brown menacé à la tête du Guide Rouge. Qu'en pensez-vous ?
Derek Brown : (Sourire) Je n'ai pas entendu cela
venant de mon chef, et si quelqu'un possède une information à ce sujet, je serais
heureux qu'il me la communique ! C'est vrai, je vais partir en retraite... un jour, et je
ne sais pas encore quand. J'ai 58 ans et je ne suis pas pressé. (Songeur) Menacé ? Je ne
pense pas. zzz22i
Guide Rouge 2003 * Mise en vente le 28 février (22,50 e) |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2808 Hebdo 13 Février 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE