du 5 juin 2003 |
FOCUS |
La notion de service prend une résonance particulière pour les professionnels installés en zone rurale. Diversifier l'activité y est bien souvent une nécessité.
L'Hôtel de la Poste de Saint-Martin-en-Vigouroux (15) dont Michel Duriol est
propriétaire.
"Nous exerçons une véritable mission de service public", avance fièrement le propriétaire de l'Hôtel de la Poste de Saint-Martin-en-Vigouroux (15). Installé dans cette petite commune de 288 habitants depuis 1964, Michel Duriol n'a pas eu d'autres choix que de s'adapter à la donne locale. "La population du village est en diminution constante depuis 30 ans, ce qui aurait pu conduire à la désagrégation du tissu social. Pour éviter la mort du village, il a donc fallu faire évoluer notre commerce en jouant le jeu de l'intérêt général et du service", explique l'hôtelier. Agence bancaire et postale, épicerie, point fax, photocopieur, l'établissement de Michel Duriol constitue pour beaucoup d'habitants le seul lien avec l'extérieur et le centre névralgique du village. "Nous sommes la 4e génération à exercer ici, rappelle Michel Duriol. La grand-mère de mon épouse tenait déjà le bureau de poste au début du siècle dernier. Un service que nous avons, bien entendu, continué à assumer tout en nous diversifiant. En plus du restaurant et du bar, l'hôtel propose un rayon alimentation pour les produits de base, une librairie, un distributeur de billets et l'accès à Internet. Nous servons également de centre administratif pour la délivrance des cartes de chasse ou de pêche, et de relais pour certaines formalités administratives (pièces d'identité). Et si le chiffre d'affaires de ces différentes activités reste marginal, je me vois mal les supprimer du jour au lendemain." Des services accessibles tous les jours de l'année, et ce, sans interruption depuis près de 40 ans. Disponibilité oblige, Michel Duriol a en effet mis un point d'honneur à ne jamais fermer les portes de son établissement, ouvert de 7 heures du matin à minuit.
Richard Vannier : "Les gens du cru acceptent mal de payer un menu à plus de 15
e même si la qualité est là."
Disponibilité et proximité
Une diversification de l'activité qui s'est aussi manifestée par l'aménagement de la
partie hôtellerie. "La baisse du nombre d'habitants ayant fait inexorablement
chuter le chiffre d'affaires du bar, il a fallu réagir en investissant dans la création
de 7 chambres d'hôtel. Des efforts payants, puisqu'en 10 ans, nous avons réussi à
remonter la pente et à compenser la perte de notre clientèle grâce au tourisme. Et
même si cette activité est marquée par une très forte saisonnalité, elle représente
un vrai ballon d'oxygène pour maintenir la rentabilité de l'affaire", poursuit
l'hôtelier. Une dynamique confortée par la création d'un pôle touristique somme toute
modeste (campings, aires de jeu et d'animation), mais qui a permis de fidéliser quelques
habitués dans cette région isolée du Cantal. "Quant à l'activité
restauration, elle varie elle aussi en fonction des périodes. D'une dizaine de couverts
certains jours d'hiver, la fréquentation peut dépasser la centaine à la belle saison.
Mais nous pouvons aussi compter sur les habitants du village pour les baptêmes, les
communions ou les mariages", précise encore Michel Duriol. Une position centrale
dans la vie de Saint-Martin-en-Vigouroux qui a permis à l'hôtelier d'être élu maire
pour la première fois en 1977. "Une fonction que je n'ai plus quittée depuis
cette date et que j'exerce toujours avec le même enthousiasme."
La peur de l'étranger...
A quelques centaines de kilomètres de là, dans l'Aveyron, le parcours de Richard Vannier
témoigne lui aussi des difficultés auxquelles doivent faire face les professionnels. 3
ans après avoir repris un hôtel-restaurant situé à Viviez, l'hôtelier âgé de 34 ans
est quelque peu désabusé. "Outre des problèmes de recrutement, c'est l'absence
de dynamique de cette zone géographique qui pénalise les résultats. Sans véritable
politique de développement touristique et sans réelle synergie entre l'ensemble des
professionnels qui y sont installés, l'activité reste limitée. Et si nous affichons
complet de juin à fin août, le reste de l'année pose de sérieux problèmes de
rentabilité. Nous avons donc fait le pari de la qualité et de l'originalité au niveau
de l'offre restauration, ce qui nous permet de réaliser une moyenne de 50 couverts par
jour sur l'année. Malheureusement, nous nous heurtons toujours à la défiance d'une
partie des habitants qui voient d'un mauvais il les 'étrangers' que nous
sommes", poursuit l'hôtelier originaire de la région parisienne. "Des
pesanteurs qui pourraient nous conduire à la revente de l'affaire. Avec le temps,
j'estime en effet ne pas être à ma place", avoue encore cet ancien manager de
la chaîne Buffalo Grill. Une situation d'autant plus problématique que le propriétaire
des murs lui a dénié le droit d'exploiter un débit de tabac moins de 6 mois après son
rachat. "De fait, j'ai l'impression que tout est fait pour nous mettre des bâtons
dans les roues et nous décourager", constate Richard Vannier avant de faire
état de marges réduites à la portion congrue : "L'achat de marchandises revient
cher, et les gens du cru acceptent mal de payer un menu à plus de 15 e même si la
qualité est là." Des difficultés que les hôteliers de 'campagne' sont de plus
en plus nombreux à évoquer, alors que le nombre d'établissements à la vente n'a jamais
été aussi élevé.
Les motifs sont toujours les mêmes : population âgée, manque d'infrastructures
touristiques, absence de dynamique, rejet de la population. zzz36v
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L'Hôtellerie Restauration n° 2824 Hebdo 5 Juin 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE