du 27 novembre 2003 |
ACTUALITÉ |
Plus de 15 000 buralistes, lundi 24 novembre, dans les rues de Paris. En tête de cortège, René Le Pape, président de la Confédération des débitants de tabac de France. Où en est le dossier des buralistes, pourquoi cette manifestation ? René Le Pape répond à nos questions.
Propos recueillis par S. Soubes
René Le
Pape.
L'Hôtellerie : Vous réclamez la suppression de
la hausse du tabac prévue en janvier prochain. Si elle était maintenue, quelle incidence
aurait-elle d'après vous ? L'aide compensatoire prévue par le gouvernement ne
devrait-elle pas normalement absorber les pertes ?
René Le Pape : On risque fort d'avoir 4 000 à 5 000
buralistes en moins. Les aides annoncées paraissent absorber la baisse des ventes de
tabac, mais le problème est plus compliqué. Il s'agit aussi du flux. Les gens ne vont
plus chez eux, et ils accusent d'importantes baisses de vente sur les produits annexes,
donc à marge. L'aide compensatoire porte uniquement sur le tabac. Vous savez, j'ai
l'exemple d'un débitant qui est prêt à aller acheter du tabac au Luxembourg et à le
revendre exactement au même tarif, simplement pour faire revenir les gens chez lui,
autour des produits bar ou presse. Tout ce qui est fait dans le plan Dutreil va dans le
bon sens, mais on ne soigne que les conséquences. Or, il faut soigner la cause, et la
cause, c'est l'augmentation du prix du tabac.
L'Hôtellerie : Dans son 'contrat d'avenir pour
les buralistes', le gouvernement évoque de nouvelles activités commerciales comme
l'implantation de points poste ou l'installation de bornes Internet. Qu'en pensez-vous ?
René Le Pape : Tout ce qu'on peut obtenir, qui puisse
faire revenir les gens chez nous est intéressant. Les points poste, c'est une démarche
qu'on a déjà depuis longtemps. Cette activité est destinée aux coins les plus
reculés, là où la poste se retire. Le débitant qui fait point postes perçoit une
indemnité forfaitaire de 130 e et il est commissionné sur les actes, mais ça ne monte
pas très haut. Les bornes Internet, qui délivreraient des documents officiels, me
paraissent une activité valable, qui permettrait en effet à une partie des gens de
revenir chez nous.
L'Hôtellerie : Le gel annoncé de la fiscalité
du tabac sur 4 ans est mal perçu par l'opinion publique. On accuse le gouvernement de
revenir sur sa politique de santé publique et d'agir en fonction d'intérêts
particuliers. Avez-vous réclamé ce moratoire ?
René Le Pape : Pas du tout et j'émets beaucoup de
réserve. Je ne sais pas comment un ministre peut s'engager sur un gel de la fiscalité
alors que le budget est voté tous les ans par les députés. Je préfère une
augmentation lissée sur 4 ans. Lorsque j'ai rencontré le ministre de la Santé, je lui
ai dit que nous voulions être des acteurs de la politique de lutte contre le cancer. On
ne va pas en 3 mois changer d'activité. Il faut nous laisser le temps de nous adapter.
L'Hôtellerie : En quoi les mesures financières
annoncées par Renaud Dutreil sont-elles "insuffisantes" ?
René Le Pape : Au Cnit, nous attendions un ballon
d'oxygène. Les mesures annoncées par Renaud Dutreil étaient alors plafonnées à 10 000
e. Le nouveau plan d'aides annoncé la semaine dernière prévoit des mesures
compensatoires adaptées au cas par cas et elles ne sont plus plafonnées. C'est une bonne
chose pour les établissements les plus touchés. J'ai demandé que cette aide leur soit
versée dès décembre afin que les établissements frontaliers puissent sortir la tête
de l'eau. Si en janvier, une nouvelle hausse survient, ça va à nouveau les faire
plonger.
L'Hôtellerie : La profession fait-elle
réellement l'objet de plus en plus d'agressions ?
René Le Pape : Quand on entend les douanes, il n'y a
pas plus de contrebande qu'avant. Mais ils n'évoquent que les grosses prises. Nous, on
met le doigt sur les trafics dits de fourmi. Nous avons des statistiques qui démontrent
une recrudescence des vols depuis le 20 octobre.
L'Hôtellerie : Quel message souhaitez-vous
faire passer au travers de cette nouvelle manifestation ?
René Le Pape : 200 cars, 4 TGV entiers, plus de 15
000 personnes dans les rues de Paris. Le message ? Dire non à la hausse des prix telle
qu'elle est pratiquée et appuyer les négociations en cours, car rien n'est encore
signé. Nous voulons dire aussi notre colère et notre désarroi. Cette manifestation se
veut aussi, paradoxalement, un message de survie. Nous voulons défendre notre identité
en tant que commerce de proximité. zzz32
Article précédent - Article suivant
Vos réactions : cliquez sur le Forum des Blogs des Experts
Rechercher un article : Cliquez ici
L'Hôtellerie Restauration n° 2849 Hebdo 27 novembre 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE