du 12 février 2004 |
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< TVA : LA POIRE EN DEUX...
Pour faire face au refus de l'Europe de baisser la TVA, Jean-Pierre Raffarin a annoncé mardi 10 février à l'Assemblée Nationale qu'il débloquait une somme de 1,5 milliard d'euros pour alléger les charges des restaurateurs dans les 18 prochains mois.
Du
côté de l'Europe, pas de grande surprise, l'Allemagne s'oppose toujours à la baisse de
TVA pour les restaurateurs français. A l'issue de la rencontre informelle à Genshagen
près de Berlin entre le chancelier allemand Gerhard Schröder et Jacques Chirac, ce
dernier a déclaré : "Pour des raisons que nous comprenons parfaitement dans le
cadre des priorités du redressement économique et social engagé par le gouvernement
allemand, cette mesure n'est pas prioritaire pour l'Allemagne. Et si nos partenaires
allemands comprennent très bien la position française, nous comprenons parfaitement la
position allemande. Par conséquent, nous avons décidé de poursuivre la discussion en
fonction de l'évolution économique, dans les années qui viennent, dans ce secteur.
Naturellement, la France maintient sa position."
Difficile alors pour le ministre de l'Economie et des Finances, Francis Mer,
d'évoquer devant ses homologues européens réunis mardi 10 février à Bruxelles dans le
cadre d'Ecofin, une évolution positive de la position allemande pour convaincre les
autres pays opposés à une telle mesure comme le Danemark et la Suède.
Daguin : colère et déception
André Daguin, président de l'Umih ne décolère pas : "Il s'agit d'un
blocage total du dossier. La réaction des syndicats patronaux unis sur ce dossier ne se
fera pas attendre et sera forte. Je rappelle que la baisse de TVA pour la restauration
faisait partie du programme politique de tous les candidats. Cet engagement a été
renouvelé par le Premier ministre ainsi que par nos ministres de tutelle, Renaud Dutreil
et Léon Bertrand, lors de notre congrès. Nous avions engagé des discussions avec les
partenaires sociaux pour conduire ce métier vers la modernité, et on nous supprime la
seule mesure qui pouvait nous donner les moyens de le faire. Ce n'est pas possible d'être
suspendu au veto de l'Europe."
Jacques Mathivat, président du Synhorcat, lui, reste très perplexe face à cette
proposition du gouvernement de remplacer la baisse de TVA par la baisse des charges : "On
ne peut être que favorable à une baisse des charges, même si on n'en connaît pas la
nature. Il est vrai qu'une baisse de TVA ne concernerait qu'une partie de la profession,
c'est-à-dire les restaurateurs mais pas les hôteliers. Mais les derniers événements me
laissent malgré tout perplexe. En effet, on se retrouve à nous faire une promesse juste
avant une échéance électorale. A six semaines des élections régionales, on nous
promet une baisse des charges, et après le Conseil d'Etat risque de nous annuler la
mesure sous prétexte qu'il s'agit d'une mesure sectorielle. Dans cette nouvelle piste, le
gouvernement n'est pas non plus le seul juge à l'instar de ce qui se passe pour le
dossier TVA." Même s'il reconnaît les efforts accomplis par le gouvernement
pour défendre le dossier devant les instances européennes.
La solution franco-française
C'est à l'Assemblée Nationale, lors de la séance des questions au gouvernement,
que Thierry Mariani, député UMP du Vaucluse, a demandé au gouvernement où il en était
sur le dossier ainsi que le calendrier de la baisse de TVA pour la restauration.
Jean-Pierre Raffarin a aussitôt répondu "J'ai le plaisir de vous annoncer
que le gouvernement a décidé de débloquer 1,5 milliard d'euros en 18 mois en faveur de
la restauration qui bénéficiera d'un plan d'allègement massif de ses charges, dans
l'attente d'obtenir la baisse de la TVA. La commission défend la position française, et
nous avons donc quelques chances d'obtenir satisfaction." A une question
d'un député sur la forme de cette mesure, le Premier ministre a déclaré : "J'ai
informé M. Daguin de cette décision, et je le recevrai jeudi pour fixer avec lui les
modalités d'application de ce plan.
Cette décision de Jean-Pierre Raffarin répond au souhait de l'intersyndicale Unihr
composé de la CPIH et de la Fagiht, qui lui avait adressé un courrier afin de lui
demander une baisse des charges dans l'attente de la baisse de TVA et dans lequel il
précisait que : "Cette réduction des charges sociales patronales, constamment
réclamée par nos syndicats nationaux comme une priorité, soulagerait la trésorerie de
nos entreprises tout en favorisant une relance de l'embauche. Elle permettrait à nos
ressortissants de mieux supporter l'attente de la réduction fondamentale du taux de TVA,
sans perdre confiance et en donnant le temps au gouvernement français de surmonter les
obstacles rencontrés au niveau européen."zzz66f
P. Carbillet
"Dans les
années qui viennent..." Ça peut servir, d'avoir fait l'ENA. Ainsi, la déclaration de Jacques Chirac au terme de sa rencontre de lundi avec le chancelier allemand est un modèle de cette langue de bois qui imprègne l'enseignement de notre supposée élite. Tout est dit en trois mots : "Dans les années qui viennent", l'art d'enterrer un dossier avec cette fausse élégance des hauts fonctionnaires à court d'arguments. Il eut été honnête de nous parler de déficits budgétaires, de politique fiscale, de contraintes financières, de réglementation européenne, d'équilibre ou d'égalité de traitement. On aurait fait un effort pour comprendre. Alors qu'aujourd'hui, ce ne sont pas les compensations que ce bon M. Raffarin a le 'plaisir' d'annoncer à l'Assemblée qui effaceront le pénible sentiment d'avoir été 'promené' plus que de raison. La baisse de TVA, ce fut longtemps "En attendant Godot" qui n'est bien évidemment pas venu ; aujourd'hui, et surtout demain, ça risque d'être "Au-dessous du volcan". C.B. zzz66f |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2859 Hebdo 12 Février 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE