du 13 mai 2004 |
ÉDITO |
Selon Le Monde de lundi dernier, qui ne passe pas
spécialement pour un organe inféodé aux intérêts patronaux, la France partage avec
l'Italie l'immense privilège d'être classés 24e et 25e des pays européens pour le
temps de travail hebdomadaire, avec une moyenne de 38,8 heures chez nous, la Botte faisant
légèrement mieux avec un petit 38,6. Au moins, les Italiens ont l'avantage d'être
généralement de bonne humeur, alors que chez nous...
Un esprit facétieux pourrait expliquer cette inappétence à l'ouvrage par une
culture latine héritée de la langue de Cicéron, dans laquelle le mot trabare se
traduit à la fois par 'torturer' et 'travailler', mais n'exagérons rien sur les
souvenirs scolaires de nos compatriotes.
En revanche, alors que le printemps, quoique timide cette année, se manifeste
enfin, les envies d'évasion, de 'ponts', de pauses et autres RTT se multiplient au rythme
de l'approche estivale. Et bien sûr, comme chacun sait, le printemps, c'est le temps de
la revendication, des souvenirs impérissables pour les anciens héros de 1968, les
nostalgiques de la grève générale, des défilés sur le pavé de Paname, et les manifs
en tout genre qui animent tant le parvis de la gare Montparnasse et les abords de la
République.
Trêve de plaisanterie, la France qui s'échine, qui paie rubis sur l'ongle impôts
et cotisations sociales, qui s'efforce de rester compétitive face à une concurrence de
plus en plus âpre, cette France du labeur, de l'effort et de la créativité ne pourra
longtemps supporter encore la pagaille organisée, les grèves illégales, les prises en
otages de clients (pardon, d'usagers) qui sont le lot quotidien de notre actualité
économique et sociale.
Mardi, les professionnels cannois sont descendus dans la rue pour affirmer leur
volonté de travailler et ne pas subir la démagogie des trop fameux 'intermittents du
spectacle' qui ont démontré depuis un an leur capacité à une vraie activité
permanente afin d'être payés par l'ensemble des salariés pour ne rien faire.
Car, il n'est que temps de revenir au bon sens : sans travail, pas de progrès
économique possible. Et sans compétitivité, aucune chance de faire la course en tête
des économies développées. Mais à constater le refus de cette compétition par tous
les détenteurs des emplois pudiquement baptisés 'protégés', à la SNCF (champions
toutes catégories des grèves injustifiées), à Aéroport de Paris, à EDF ou à Air
France, il y a... du travail.
D'ailleurs, il y en a un peu partout, du travail. Juste une anecdote toute récente
: le maire d'une petite commune du littoral languedocien a voulu organiser, le naïf, une
rencontre pour l'emploi, constatant que plusieurs centaines de chômeurs allocataires sont
citoyens de sa ville. Les employeurs avaient joué le jeu, puisque 140 postes étaient à
pourvoir à l'approche de la saison. Quelle ne fut pas le dépit de cet édile, ancré
dans ses convictions de gauche, de tirer le bilan de l'opération : pas un candidat ne
s'est présenté pour postuler dans les restaurants, les supermarchés, les campings ou
les entreprises artisanales à court de main-d'uvre. La fréquentation assidue du
Gaffiot, peut-être (pour la traduction de trabare)...
L. H. zzz80
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