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du 19 août 2004
RESTAURATION
Pâtisserie et Amérique

ROLAND MESNIER QUITTE LA TABLE DE LA MAISON BLANCHE

Le pâtissier français des présidents américains prend sa retraite après 25 ans de service à Washington. Il publie un livre de pâtisserie.

En 25 ans de Maison Blanche, Roland Mesnier est devenu très américain.

Voilà 4 ans que je m'y prépare. A 60 ans, j'ai beaucoup de temps perdu à rattraper. J'étais très tenu. 70 à 80 heures par semaine, ce n'était pas rare. Peu de congés. Toujours sur la brèche, les voyages du président annoncés, puis annulés. Je veux garder de l'énergie pour faire autre chose. J'ai préparé un livre de pâtisserie qui sera dédié à l'automne, et je voyagerai pour le présenter."
Roland Mesnier n'aura pas besoin, lui, de se présenter aux Etats-Unis. Le New York Times a annoncé son départ à la retraite aux lecteurs américains, qui le connaissent bien. Son statut de premier pâtissier de l'Amérique est solidement établi, et à juste titre. S'il juge aujourd'hui en avoir assez fait pour s'être libéré le 30 juillet dernier, c'est qu'il a exercé son métier dans un total investissement personnel, tout à sa passion.
Roland Mesnier est entré à la Maison Blanche en 1979, choisi par Mme Carter. Il avait été repéré dans un établissement de luxe en Virginie, le Homesteat, où il travaillait après avoir œuvré dans un autre palace, le Greenbrier. Le pâtissier avait fait ses classes à Besançon, d'où il est originaire, auprès de Paul Maurivard, puis de Belligat. Une période qu'il n'oublie jamais, citant ses maîtres à toute occasion. Il s'est perfectionné au George V, puis au Vivarois, enfin en Allemagne et au Savoy de Londres. Avant le grand saut sur l'Atlantique pour entrer dans la chaîne Princess aux Bermudes, où il restera 9 ans. A Washington, il ouvrait une académie de cuisine, tenue aujourd'hui par François Dionot, un Bisontin également.

"Comment tuer un président"
En 25 ans de Maison Blanche, le chef franc-comtois est devenu très américain. Un travail forcené et une totale abnégation pour ses patrons successifs, Bush père après Carter, puis Reagan, Clinton et George W. Bush. "Je l'avais connu plus jeune, quand il venait voir son père. Il avait la quarantaine. Quand il est revenu à la Maison Blanche, c'était comme ma famille, on s'est tous embrassés ! Il aimerait bien que je reste. Il a beaucoup d'humour. Quand je lui ai dit que je partais vendre mon livre, il m'a suggéré un titre : Comment tuer un président." Car la tâche du pâtissier, c'est de trouver l'équilibre entre la qualité et la saveur des gâteaux, et le souci des convives de garder la ligne. "Il faut toujours se battre avec les calories." Quand il ne mange pas des bretzels, le président Bush aime les choses toutes simples, gâteaux au chocolat, tartes aux fruits avec une boule de glace. "Il n'aime pas rester à table et évite les banquets. Pour lui, 10 minutes, c'est déjà trop." En revanche, dans les grands dîners, il vaut mieux ne pas se louper. "Il n'y a jamais eu d'incident. Sinon, je n'y serais plus. Il n'y a pas de marge pour l'erreur, tout doit être parfait. Un jour, je prévoyais un soufflé chaud à la framboise pour 150 personnes. Il y a eu un problème avec les blancs. On a recassé deux caisses d'oeufs, et j'ai changé la recette pour gagner du temps. En priant pour que ça marche."

Le pique-nique du 11 septembre
Inutile de préciser que le 11 septembre 2001 est gravé dans la mémoire de Roland Mesnier. "On préparait un pique-nique pour 3 000 invités. On n'a pas prêté attention à l'annonce du premier avion. Au deuxième, l'évacuation a été ordonnée, puis, en voyant passer l'avion du Pentagone au-dessus de la Maison Blanche, ce qui est interdit, on a su que c'était grave. Maintenant, les visites sont très réduites. Il y a eu des travaux de sécurité importants." Son pays, il le retrouve régulièrement, venant passer des vacances en Franche-Comté. En 1998, il acceptait de parrainer une promotion d'élèves du lycée hôtelier d'Arbois. Invités à visiter la Maison Blanche, ils étaient aimablement accueillis par Mme Clinton. Ils ont également visité quelques-uns des plus grands établissements de cuisine française. Ils ont fait des démonstrations de quelques recettes comtoises à base de comté et de vin du Jura. Souvenir inoubliable.
D. Robert zzz18p

"Un cours de A à Z"
Roland Mesnier met la dernière main à son livre de pâtisserie, qu'il entreprendra de diffuser dès qu'il sera en retraite. "J'aurai tout de suite quelque chose à faire." Il y dit tout ce qu'il faut pour devenir un chef accompli. A commencer par le marché ou le supermarché. "Des produits trouvables couramment. Je donne les justes quantités pour qu'il n'y ait pas de pertes. Je veux aussi qu'il soit pratique, avec des astuces pour l'utilisation du congélateur. Je parle même du nettoyage."
Des recettes simples, "de ménage", des goûts naturels et peu de mélanges : pas plus de 3 à 4 ingrédients pour certaines recettes.
Le livre, dédicacé par les cinq premières dames que le chef a servies, est en France pour la traduction. Il faut aussi adapter le système de mesure. "Il contient des anecdotes. Il sera intéressant à lire." L'ouvrage pourrait sortir pour Noël.

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