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En 1890, François Bise quitte la métairie familiale pour l'hôtel d'Angleterre à Annecy. La propriétaire lui confie la cuisine de la Compagnie des Bateaux dont elle a la gérance l'été. Parce qu'en Haute-Savoie, les bateaux vapeur sont alors les meilleurs moyens de locomotion, François s'arrête de port en port et rencontre, à Talloires, Marie Fontaine, la fille du pontonnier. Il n'y résistera pas. De cette union naîtront deux fils, Marius et Georges. Ainsi débute l'histoire des Bise.
m Fleur Tari
Les établissements de la famille Bise sont mitoyens à Talloires.
C'est le début d'une saga familiale qui attirera
à Talloires les grands de ce monde, séduits par le cadre, mais surtout par les talents
culinaires des femmes et des hommes de la famille.
Marius, le premier fils, épouse Marguerite, cuisinière à l'autre bout du lac. Ensemble,
ils reprennent en 1929 l'hôtel-restaurant qui deviendra l'Auberge du Père Bise.
Marguerite se fait connaître par une cuisine exceptionnelle. Marius accueille les clients
avec son fils. L'établissement obtient 3 étoiles au Michelin en 1948. François
seconde sa mère en cuisine puis reprend l'établissement avec sa femme Charline et
maintient les étoiles. A sa mort, sa fille Sophie lui succède et tient toujours
l'Auberge du Père Bise.
Parallèlement, moins connu, mais tout aussi étonnant, le parcours de Georges et de son
fils Fernand marquera fortement la petite commune de Talloires.
Le rendez-vous de la haute société
dans les années 30
Cette figure de l'hôtellerie haute-savoyarde sait faire venir chez elle les grands de ce
monde. Proche de Genève, l'hôtel-restaurant Le Cottage attire la Société des Nations
qui en fait sa cantine dans les années 30. Les bords du lacs sont encombrés tout l'été
par ces hauts fonctionnaires qui "se passent la bonne adresse" de bouche
à oreille. Pour accueillir cette belle clientèle, Georges agrandit peu à peu la
propriété et rachète d'un seul tenant 1 hectare et demi au bord du lac, juste en
prolongement de l'auberge de son frère Le Père Bise. Cette situation foncière
inestimable permettrait à ses descendants de vivre sur ce patrimoine, mais la vocation
est là : Fernand souhaite reprendre l'affaire. Très doué pour les études, il passe un
bac scientifique et le double d'un bac littéraire... pour faire plaisir à son père. Au
grand désespoir de ce dernier, il abandonne la voie royale de l'école hôtelière de
Paris pour l'apprentissage chez les plus grands. Point, puis le Claridge, le Savoy à
Londres, Taillevent, le Carlton... Enfin, il rejoint l'affaire familiale où, pendant 11
ans, il va apprendre avec son épouse Céline ce qu'est l'hôtellerie à la manière des
Bise.
Fernand Bise reprend l'affaire
Le 23 avril 1968, Georges meurt. Fernand s'installe alors aux fourneaux et maintient les 2
macarons de son père. Le jeune couple souhaite donner une nouvelle dynamique à
l'établissement. L'hôtel est agrandi et transformé. Fernand, polyglotte, familiarisé
avec une clientèle de luxe, attire au bord du lac les têtes couronnées et les grandes
familles industrielles. Rainier et Grace de Monaco, Dupont de Nemours, John Rockefeller et
toute sa famille, deviennent des habitués. Le Duc de Bedford organise des week-ends
secrets avec celle qui deviendra la duchesse de Bedford, et Talloires est envahie de
journalistes.
Chaque génération apporte sa marque
La très romantique baie de Talloires est connue dans le monde entier, mais ce qui attire
le client chez Fernand, c'est une autre idée de l'hôtellerie. Il sait accueillir et
mettre à l'aise les plus grands. "Il ne faut pas en faire trop ni trop peu."
Son fils, Jean-Claude, a repris l'affaire depuis 1994 avec son épouse Christine. "Nous
voulons garder un état d'esprit de grande maison familiale. Nous privilégions le contact
simple et convivial avec nos clients. Cependant, j'ai imposé une gestion informatique, un
autre regard sur la direction d'un hôtel." La gestion des hommes est aussi
importante que la gestion comptable. Jean-Claude a entrepris de grands travaux et agrandi
la terrasse. Les chambres sont rénovées. Les salons de séminaire adaptés aux nouvelles
technologies. "De nombreuses multinationales américaines continuent à tenir
leurs séminaires chez nous car nous leur offrons une ambiance et un cadre très
français, mais des conditions de travail à l'américaine." Le 25 mai, Fernand
recevait les insignes de chevalier de la Légion d'honneur, entouré de ses parents et
amis. Trois fois par semaine, il se charge des approvisionnements au marché paysan.
Malgré ses 73 ans bien sonnés, il reste présent dans l'établissement. Son plus grand
espoir : voir un de ses petits-enfants reprendre le flambeau pour la 4e génération. n zzz18p
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Nombre de couverts | 90 |
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Nombre de chambres | 35 |
Effectif (en saison) | de 20 à 32 personnes |
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L'Hôtellerie n° 2735 Magazine 13 Septembre 2001