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enquête |
L'hôtel-restaurant de La Châtre dans l'Indre a signé un accord sur la réduction du temps de travail en fin d'année 2000. Il était l'un des premiers dans la région.
A La Châtre, dans l'extrême
sud-est de l'Indre, en plein cur du pays de George Sand, le Lion d'Argent est un
établissement qui aime prendre les devants. Dans la même famille depuis 1939,
l'hôtel-restaurant (34 chambres 2 étoiles et une centaine de couverts) a déjà obtenu
son 'habilitation tourisme' qui permet au gérant, Pierre-Marie Audebert, de monter et de
commercialiser des circuits dans la région. Il vient à nouveau de prendre l'initiative
dans le domaine social avec un accord sur la réduction du temps de travail à 39 heures.
"On ne pourra pas échapper à cette loi, explique Pierre-Marie Audebert, on
n'a pas le choix, il fallait donc s'engager, et cela d'autant plus que des aides nous sont
proposées." La discussion a duré plusieurs mois avec, au préalable, la
désignation de Nicole Proust, salariée mandatée par la CFDT et une expertise des
comptes. Un expert, payé par l'Etat, a ainsi décortiqué durant 4 jours les comptes de
l'entreprise pour étudier les incidences de la réduction du temps de travail. Cette
étude a montré que le Lion d'Argent pouvait s'engager dans cette voie. L'accord a donc
été signé fin décembre 2000. Pour la cuisine et le restaurant, le temps de travail
hebdomadaire est désormais bloqué à 45 heures avec, en contrepartie, 7 semaines
supplémentaires de congé (5 semaines pour les 39 heures et 2 semaines de récupération
des heures supplémentaires). Le rythme de travail (3 semaines de service, 1 semaine de
congé) est considéré par Nicole Proust comme "un rythme novateur qui donne
envie aux gens de revenir travailler dans la profession". En cuisine et en salle,
des équipes de 3 postes de travail ont été constituées avec 4 salariés, ce qui permet
à l'établissement de fonctionner en permanence, 365 jours par an, avec le même
effectif. En revanche, pour les femmes de ménage, la plonge et la comptabilité, la
réduction est quotidienne avec une base hebdomadaire de 38 h 50 et une journée de
récupération tous les 15 jours.
Cet accord a été approuvé par les salariés, la CFDT et les pouvoirs publics avec la
validation du sous-préfet de La Châtre, Charles-Edouard Tollu. L'accord prévoit
également la création de deux emplois (l'effectif atteint désormais 17 salariés) et le
blocage des salaires pendant 2 ans, mais avec possibilité de réexamen en cours de route.
En adoptant les 39 heures avant le 1er janvier 2002, le Lion d'Argent va bénéficier d'un
bonus avec environ 200 000 francs par an d'aides supplémentaires (6 000 francs par
salarié la première année, puis 5 000 francs durant 4 ans et un allégement de charges
sociales à hauteur de 17 500 francs par salarié jusqu'à 1,8 fois le Smic).
Pas de risques inconsidérés
Avec ces aides et avec une très légère augmentation de ses prix (environ 5 %),
Pierre-Marie Audebert espère limiter la hausse de la masse salariale à 5 % : "On
pense ce qu'on veut de la loi Aubry, explique-t-il, mais il faut y aller. Les
chaînes ne se posent pas la question. Alors que l'on va vers le plein-emploi, notre
profession doit redevenir attractive." Pour autant, Pierre-Marie Audebert se veut
vigilant : "Nous allons suivre scrupuleusement l'application de cet accord pour
éviter les dérapages financiers. La restauration connaît une rentabilité difficile,
tout juste équilibrée. Il n'est pas question de prendre des risques inconsidérés."
Seul établissement indépendant de la région à avoir signé un tel accord, le Lion
d'Argent servira-t-il de modèle ? Pierre-Marie Audebert le souhaite : "L'hôtellerie
traditionnelle n'a de l'avenir que si elle innove. Nous ne devons pas être les derniers
de la classe. Il ne sert à rien de se lancer dans des combats perdus d'avance, comme
celui de la TVA, alors qu'il faut se battre au contraire pour la baisse des charges
sociales sur les bas salaires, contre la redevance, pour des prêts bonifiés."
Pierre-Marie Audebert tire un autre bilan de la réduction du temps de travail : "Le
climat social est plus sain, plus clair, mais surtout la nouvelle organisation du travail
permet de mieux gérer : tout est planifié d'avance, on a plus de visibilité et de marge
de manuvre." n zzz60t zzz22v
Le Lion d'Argent à La Châtre. Pierre-Marie Audebert, Nicole Proust,
Charles-Edouard Tollu (sous-préfet) et les signataires de l'accord.
L'accord |
w Horaire bloqué à 45 heures
hebdomadaire w 7 semaines de congé annuel supplémentaires w 3 semaines de travail w 1 semaine de congé w Création de 2 postes w Blocage des salaires pendant 2 ans w 200 000 francs d'aides par an |
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L'Hôtellerie n° 2740 Hebdo 18 Octobre 2001