Enfin une bonne nouvelle : dans les restaurants, la crise de la vache folle serait terminée. Dans les établissements que nous avons interrogés, depuis janvier 2002, la vente de viande de buf est en progression.
Bernadette Gutel
Doc. Puigrenier
Depuis janvier 2002, les consommateurs retrouvent le plaisir de déguster de la viande
de buf au restaurant.
Les consommateurs aujourd'hui
ne se posent plus beaucoup de questions sur l'ESB, mais s'intéressent à la qualité de
la viande de buf, aux différentes races, et cherchent à reconnaître les morceaux.
Il suffisait de s'approcher de l'un des kiosques d'information installés courant février
dans les gares parisiennes et animés par le CIV (Centre d'information des viandes), ou de
participer à l'une des séances de dégustation de viandes, organisée également par le
CIV au Salon de l'Agriculture, pour le constater. Les participants étaient nombreux,
curieux d'en savoir plus sur les labels de qualité et sur les saveurs de la viande. Peu
de questions sur l'ESB. Les efforts déployés par la filière viande pour redonner
confiance au Français, et la politique d'information menée par le CIV, se révèlent
aujourd'hui payants. Au moment de la crise, en octobre 2000, certaines chaînes de
restaurants spécialistes de la viande ont vu leur taux de fréquentation chuter de plus
de 20 %. Les clients sont revenus dès novembre 2000, mais la baisse de fréquentation
aurait atteint 12 à 15 % en 2001 par rapport à 2000. Depuis le premier trimestre 2002,
la fréquentation est à la hausse et tend à redevenir proche d'avant la crise.
McDonald's, qui offre le produit considéré comme le plus 'suspect' au moment de la
crise, annonce même que ses ventes de steaks hachés ont progressé de 4 % en 2001 par
rapport à 2000 (il faut cependant tenir compte des ouvertures), et que les résultats
McDonald's France repassent en positif depuis le début de l'année. "En janvier
2002, nous confiait Pierre Cassagne, directeur général de la chaîne Hippopotamus à
l'époque, dans nos menus parents et nos menus enfants, les statistiques montrent que
nous avons vendu autant de viande de buf et de steaks hachés en janvier 2002 (à
0,3 % près) qu'en 2000 avant la crise. Il aura fallu 18 mois pour regagner la confiance
après la seconde crise, alors que 5 mois avaient suffi après celle de 1996. Je suis
serein pour l'avenir. La viande est maintenant un produit bien sécurisé."
Doc. McDonald's
McDonald's a expliqué à ses clients pourquoi ses steaks hachés 100 % muscles
peuvent être consommés sans crainte.
Dans les restaurants La Boucherie, Bertrand Baudaire, p.-d.g., affirme également
"avoir retrouvé les chiffres d'avant la crise. Nous avons confiance en l'avenir
car, après avoir ouvert 25 établissements en l'espace d'une dizaine d'années, nous
allons en ouvrir 6 à 8 autres prochainement, dont la mise en route a commencé en pleine
crise de la vache folle".
Les restaurateurs indépendants qui offrent une carte variée comme Le Médicis à Blois
ont noté des baisses de consommation de viande de buf de l'ordre de 20 %. "Aujourd'hui,
confie Christian Garanger, son propriétaire, je vends autant de filets de buf
qu'avant la crise, soit 16 filets pour 60 couverts." Quant à Jacques Crossard de
l'Hôtel de la Paix au Mont-d'Or, il n'a ressenti aucune baisse. "J'ai toujours
fait de la Salers, explique-t-il, filet, pavé et faux-filet. C'est la viande
préférée de la région, les gens savent comment les animaux sont élevés et ont
toujours eu confiance."
Viande de buf d'origine française, des mesures sérieuses"En 2000, explique la direction d'une importante entreprise
d'abattage et de découpe de viandes, l'ensemble des mesures prises par la filière
viande pour sécuriser la viande de buf en France a fait augmenter le prix de 0,73 e
net par kg de viande. Résultat, nous avons perdu des parts de marché importantes à
l'exportation, car les viandes allemandes ou italiennes non soumises à de telles mesures
étaient moins chères. Aujourd'hui, les viandes de buf françaises sont reconnues
saines, et les exportations ont repris car chacun sait qu'en France les contrôles sont
effectués sérieusement par des laboratoires externes indépendants, ce qui n'est pas
toujours le cas dans certains autres pays européens. Nous avons perdu 6 % de CA en 2001
par rapport à 2000 au lieu de 10 % comme nous l'avions prévu, et nous constatons une
reprise depuis janvier 2002.
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Communiquer sur la qualité
Pour faire face à cette chute de fréquentation et pour continuer à satisfaire leur
clientèle, les restaurateurs ont dû mettre en place des plans d'action. Les mesures
prises concernent la communication avec la clientèle, la modification de la carte et des
menus, le choix de viande de race... Ces mesures perdurent à l'heure actuelle et seront
pour la plupart maintenues dans l'avenir. "Chez McDonald's, explique Etienne
Haussedat, directeur de la communication, nous avons décidé de communiquer avec nos
clients par le biais des médias, par Internet, et en distribuant des informations dans
nos restaurants. Nous avons expliqué que notre steak haché est sain car garanti 100 %
muscles. Nous avons raconté comment les 32 abattoirs, tous situés en France et avec
lesquels nous travaillons, pratiquent pour éliminer sérieusement les MRS (Matériels à
risques spécifiés). Nous avons précisé que McDonald's, ses produits et ses
restaurants, sont soumis à des contrôles effectués à l'improviste par un organisme de
contrôle extérieur indépendant et agréé. Nous avons mis en place un numéro vert pour
expliquer à nos clients les garanties du 100 % muscles. Nous avons participé pour la
première fois au Salon de l'Agriculture en 2001, nous y sommes retournés en 2002, et
nous y retournerons chaque année. Nous voulons faire connaître notre démarche qualité
à propos de la viande et de tous les autres produits que nous proposons à nos clients.
Nous avons également lancé un CrocMcDo au jambon destiné aux enfants dont les mamans
refusaient de leur faire manger du steak haché. Et nous avons lancé en avril 2001 le
280, le plus gros sandwich de notre offre avec 150 g de buf pour montrer combien
nous avions confiance en nos steaks hachés, mais pour soutenir également la filière
viande. Nous allons continuer à communiquer sur notre politique de qualité. Il ne faut
pas s'arrêter là. Nous avons bien compris l'intérêt d'être plus proches de nos
clients."
Dans la chaîne de restaurants La Boucherie, dont la plupart sont situés en province,
Bertrand Baudaire a également choisi de communiquer sur la qualité de la viande qu'il
sert à ses clients : "Nous avons voulu regagner la confiance de nos clients en
leur faisant savoir comment nous achetons et découpons la viande. Nous leur avons garanti
que nous n'achetions que des arrières français et que nous les découpions dans notre
propre atelier. Nous leur avons aussi expliqué l'importance du temps d'affinage pour une
viande, affinage que nous réalisons dans notre propre centre d'affinage. Tout ceci
rassure nos clients plus qu'un contrat ou un cahier des charges. J'envisage d'en rédiger
un bien précis, mais il me semble que les consommateurs préfèrent un climat de
confiance plutôt que des normes." Quant à Hippopotamus pour informer ses
clients, il leur distribue un livret intitulé Les secrets de la bonne viande.
Doc. Hippopotamus
Choix multiples et races à viandes
Pour faire face à la crise, Bertrand Baudaire a également pris la décision d'ajouter à
sa carte de la volaille, du mouton, du porc, de l'andouillette. "Aujourd'hui,
commente-t-il, notre carte comprend 75 % de buf, mais nos clients en consomment
85 %. Près de 9 clients sur 10 choisissent parmi l'entrecôte, le faux-filet, l'onglet ou
le steak. Nous allons donc nous recentrer sur la viande de buf." Dès
l'automne 2000, Hubert de Rostolan, directeur général de la chaîne de restaurants Chez
Clément, a pris deux décisions. La première a été de proposer trois offres
rôtisserie au lieu d'une : l'offre de base composée de viande de buf, de poulet et
de travers de porc, et deux variantes dans lesquelles la viande de buf a été
remplacée par du canard ou du saumon. La deuxième décision a été de faire signer, par
tous les établissements de la chaîne, le Contrat de transparence proposé par la
filière viande bovine française, de le faire savoir en indiquant le logo Contrat de
transparence sur la carte, et en plaçant des affichettes explicatives sur les tables. En
été, il a supprimé le tartare de sa carte. "Nous avons constaté, analyse
Hubert de Rostolan, que notre nouvelle offre rôtisserie avait fait grimper les
quantités vendues dans cette famille de plats, et que la baisse de la consommation de
buf a été compensée par le canard et le saumon. Les consommateurs, d'une façon
générale, ne pensent plus à l'ESB. Cependant, nous avons conservé les 3 formules
rôtisserie et nous avons ajouté des grandes assiettes, des risottos... pour offrir une
solution de repli à ceux qui ne veulent pas manger de buf. Le Contrat de
transparence a bien rassuré nos clients, mais, si nous continuons de nous approvisionner
ainsi, nous allons arrêter de communiquer dessus car tout est rentré dans l'ordre. Quant
au retrait du tartare de notre carte d'été, ce fut une erreur. Nous avons dû le mettre
en plat du jour permanent, et ça marche de nouveau." Dans les restaurants
Hippopotamus, pour rassurer et retenir les clients, on a d'une part précisé la race de
la viande utilisée pour faire les steaks hachés et les tartares, et d'autre part,
inscrit à la carte des plats sans viande de buf. Suite à la deuxième crise de la
vache folle, la carte contient désormais 15 plats sans viande de buf, ce qui
représente 50 % de l'offre. Néanmoins, aujourd'hui, Hippopotamus vend autant de viande
de buf qu'avant la crise.
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La garantie de la traçabilité
Dans son restaurant gastronomique Le Médicis à Blois, Christian Granger a également
modifié sa carte. Il propose aujourd'hui 3 volailles au lieu de 2, mais seulement 2
viandes de buf au lieu de 3 (filet et joue), et cette viande est du Charolais.
"Avec la chambre d'agriculture, explique-t-il, j'ai organisé un immense
barbecue pour 130 personnes à la ferme de Motteux à Ouchamps. Notables, journalistes et
clients ont été ravis de se retrouver dans une ferme, et les retombées médiatiques et
commerciales ont été nombreuses." Bien que les consommateurs paraissent
désormais rassurés, les restaurateurs sont de plus en plus nombreux à proposer ou à
vouloir proposer de la viande de buf de qualité et de traçabilité garantie.
"Nous avons constaté cette nouvelle approche lors de notre participation au salon
Equip'Hôtel 2001, explique Frank Samoyau, directeur général des Boucheries de
l'Ile-de-France. Nous avons reçu beaucoup de professionnels très intéressés par la
traçabilité que nous assurons, et notre sélection de viandes haut de gamme (Black Angus
d'Irlande, Buf Normand...)." n
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Allemagne : Bovins
mal testés mis sur le marché "Un laboratoire qui teste
sans autorisation, d'autres qui ne déclarent pas les cas suspects, et des semaines, voire
des mois qui s'écoulent avant que l'on retrace où est partie la viande suspecte : encore
une fois, l'Allemagne se distingue par une accumulation de négligences inquiétantes en
matière de dépistage de l'épidémie de vache folle. Des dizaines de milliers de bovins
incorrectement testés ont été mises sur le marché allemand ou international ces
derniers mois - dont une partie encore non déterminée a été consommée. Au moins 18
000 demi-carcasses et quartiers de buf ont été exportés vers la France,
l'Espagne, les Pays-Bas, l'Autriche, la Grèce... Il y a de quoi s'inquiéter, sachant
qu'un certain nombre de premiers tests ont été positifs ou équivoques, et que
l'Allemagne en est à 151 cas déclarés de vache folle. C'est aussi un manquement majeur
à la règle européenne de dépistage systématique imposée depuis janvier 2001 à tous
les bovins de plus de 30 mois." (d'après Lorraine Millot - Libération du
14 février 2002). |
Restauration scolaire et viande de bufD'après une étude réalisée par Sylab-Ypsis en décembre 2001, 1 commune* sur 5 n'a toujours pas réintroduit la viande de buf dans les restaurants scolaires. C'est la raison pour laquelle 11 % des élèves ne consomment pas de viande de buf à l'heure du déjeuner. Les freins viennent surtout des parents d'élèves vivant en ville ; ils connaissent mal les conditions d'élevage des bovins et restent interrogatifs sur la réintroduction de la viande dans le scolaire. Les garanties apportées par la traçabilité ont été le moteur déterminant de la réintroduction de la viande dans les autres établissements. *Communes de + de 20 000 habitants. |
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L'Hôtellerie n° 2767 Magazine 2 Mai 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE