Fils d'entrepositaire-grossiste, il passe très tôt de l'autre côté de la barrière. Son premier succès : le Chesterfield Café à Paris. D'autres vont suivre. Vite et bien. Olivier Bertrand excelle dans la restauration à thème. L'an dernier, il s'attaque au troisième marché. En portefeuille désormais : près de 60 établissements. A seulement 33 ans.
Sylvie Soubes
© Bertrand Samuel
Chiffre d'affaires
HT du Groupe Bertrand en 2002 (1)* : près de 130 Me. A la tête du groupe : Olivier
Bertrand. Celui-ci nous reçoit dans ses nouveaux locaux parisiens, entre Concorde et
Madeleine. La dernière fois que nous l'avions rencontré, c'était près de la gare de
l'Est. Son nouveau bureau est à l'image du précédent : sobre, meublé à l'essentiel.
Devant lui : un ordinateur, un téléphone fixe et un portable, quelques documents, des
stylos, des crayons, une gomme. Deux maquettes d'hélicoptère sont posées en évidence
sur la cheminée... L'homme cumule plusieurs centaines d'heures de vol. Une passion parmi
beaucoup d'autres. Ski alpin, ski nautique, équitation, chasse...
Olivier Bertrand est fils d'entrepositaire-grossiste. Le nom Bertrand est encore largement
présent en Ile-de-France, associé aux camions France-Boissons. A cette nuance près
qu'il s'est fait tout seul, à la force du poignet, avec, pour tout bagage, en dehors de
son nom, la soif de réussite. A 19 ans, il s'expatrie outre-Atlantique. Bagagiste,
réceptionniste, serveur, barman... Il touche à tout, volontairement. Lorsqu'il revient
en France, il intègre la banque Hervet. "J'ai très vite compris que pour monter
des affaires, il fallait de l'argent et se roder aux mécanismes administratifs."
Au bout de 2 ans, il quitte le secteur bancaire pour se lancer dans la restauration. Son
objectif.
120 % d'endettement, 4 pizzerias et la crise du Golfe pour toile de fond. "Commencer
dans les difficultés, ça vous apprend à compter", lâche-t-il, un brin
d'ironie dans la voix. Pour redresser la barre, il choisit l'observation, l'analyse.
Comment rentabiliser, optimiser, tout en répondant aux attentes de la clientèle ? Avec
assiduité, il se penche sur les réflexes de consommation. Un cheminement, une
méthodologie qui l'amène 'presque' naturellement au principe de marque. L'idée ?
S'appuyer, s'associer, se servir d'une marque comme notion de reconnaissance et
d'appartenance. Il engage également une réflexion sur les horaires d'activité. "Nous
payons des charges sur 24 heures. Pourquoi ne pas étendre les plages d'ouverture en
déclinant d'autres types d'activités ?" Ces deux axiomes identifiés, Olivier
Bertrand s'attelle à la création d'un bar-restaurant dans l'esprit 'american food' : Le
Chesterfield Café (2)*.
© Bertrand Samuel
Principe de marque
L'établissement est inauguré en décembre 1994, rue de la Boétie, à deux pas des
Champs-Elysées. 700 m2 de surface, l'américain comme 'langue officielle', une scène
destinée à accueillir des groupes de musiciens et des chanteurs made in USA. Cible : les
18-30 ans. La mayonnaise prend. Olivier Bertrand établit dès lors une logique
commerciale basée sur une thématique forte, un chiffre d'affaires réalisé entre
restauration et limonade, et un emplacement adapté à la formule retenue. En 1997,
Olivier Bertrand relooke le Sir Winston, rue de Presbourg. L'enseigne date des années
1970. "Ceux qui fréquentaient le bar Winston se souviendront des estrades et de
l'atmosphère assez lourde qui régnait parfois dans la salle du sous-sol. Fini tout cela.
Si les comptoirs ont été conservés, ainsi que les vitres gravées et quelques tables,
Sir Winston nouvelle version impose par sa dimension, son originalité (colonial, new
age) et son bon goût", lisait-on dans les colonnes de L'Hôtellerie
quelques mois après la transformation.
En septembre 1998, nouveau challenge pour l'homme d'affaires qui s'associe à la chaîne
musicale MCM. Un pari audacieux tenu boulevard de Clichy. "L'insonorisation des
lieux a nécessité la fabrication d'une coque acoustique de 350 tonnes",
précise la plaquette de présentation. 1 500 m2 de surface, 300 places en restauration, 2
bars, une régie en sous-sol, 1 plateau de télévision en vitrine. Entre-temps, le rachat
complet de la célèbre brasserie Lipp pointe son nez après 7 ans de 'galère'. Et si
c'était à refaire ? Olivier Bertrand ne souhaite pas revenir sur le dossier. Pied de nez
aux détracteurs. L'institution germano-pratine est intacte.
Diversification
1999, 2000... Son cheptel s'agrandit : Latina Café, Maoh Noodle Bar, Tsé... Des
enseignes dans l'air du temps. Facile à dire, pas si facile à faire. Sont-ce ses
origines auvergnates (terre-à-terre, pragmatiques, concrètes) qui le conduisent de
nouveau à s'interroger sur l'évolution du métier ? Ou bien l'expérience ? Sans doute
un peu les deux. L'homme d'affaires, toujours à l'affût, prend l'an dernier un virage à
180 °. Au bout de la route : le troisième marché, revu et corrigé. Haut de gamme et
bio. Bert's sandwich club. Niche ou avenir ? Un premier Bert's près de la place de l'Alma
à Paris. Un deuxième à Neuilly-sur-Seine, trois autres prévus à Boulogne-Billancourt.
Un début. Profession de foi de l'enseigne : concilier hygiène et gourmandise dans un
cadre confortable. Ingrédients : sandwiches, soupes et salades à déguster dans un
fauteuil de cuir ou à emporter. Toutes les recettes déclinées ont été élaborées
avec l'aide d'un nutritionniste. Ticket moyen : un peu moins de 7 e. Olivier Bertrand
avance un plan de développement sur 24 à 30 mois, qui pourrait atteindre "15 à
18 unités en propre". "On ne veut pas s'emballer",
affirme-t-il. Si franchise il y a, ce sera plus tard, lorsque le concept aura fait ses
preuves...
Etonnant Olivier Bertrand qui, toujours en 2001, jette son dévolu sur la province. Le
voici qui reprend le Groupe Phenix Richelieu. 26 cafétérias Eris, 14 Quick, situés
principalement en Bretagne, dans le sud de la France et en région parisienne. L'enseigne
Eris s'est développée dans les centres commerciaux. Joli produit dont il faut toutefois
améliorer l'image. "Nous allons surtout travailler le décor et l'animation.
Rapprocher la cafétéria de son public, de la région dans laquelle elle se trouve. Lui
apporter une âme, une identité. Jouer sur les valeurs de la ville, les modes de
consommation. Sans perdre de vue la cohérence générale de l'enseigne, évidemment."
La rénovation porte sur 5 ans et se fera progressivement. Démarrage du chantier à
Nîmes.
Formation
A l'heure actuelle, le Groupe Bertrand approche la soixantaine d'unités. Un imposant
édifice dont les fondations reposent en bonne partie sur "la réactivité, la
créativité et la capacité d'adaptation" des équipes. Le groupe représente 1
600 personnes. Il possède sa propre structure de formation "dédiée aux métiers
du CHR" et agréée Fafih. Il s'est aussi "doté d'une centrale d'achats"
et a renforcé son service développement "grâce à une association avec le
leader français de la transaction commerciale, Century 21 Commerce".
Interrogé sur sa politique commerciale, Olivier Bertrand avoue préférer "se
rattraper sur les volumes" que sur les prix. Des audits - clients mystères
notamment - sont régulièrement effectués dans les établissements. Les remontées
d'information sont étudiées, décryptées. Des débats qualité, auxquels il participe,
sont organisés chaque mois autour des établissements.
Olivier Bertrand ne sait pas s'arrêter. Il admet la frénésie, s'en excuse dans un
sourire. Oui, c'est un entrepreneur insatiable, un bosseur invétéré... A ces titres de
noblesse s'ajoutent une élégance naturelle, une gentillesse instinctive, une proximité.
L'homme n'oublie jamais les valeurs humaines. L'il est vif, vite complice. La
poignée de main franche. Son âge ? 33 ans. n
zzz18p
(1)* Estimation à mi-novembre 2002.
(2)* Arrivé en fin de contrat avec la marque, le Chesterfield Café a été débaptisé au profit de House of Live. Autres temps, autres murs.
Focusw Ses principaux atouts : La curiosité, la fidélité et
le bon sens. |
House of Live 124, rue de La Boëtie, dans le VIIIe. Thème : l'Amérique Lancement : 12-1994 Ticket moyen : 15 e Cible : 18/30 ans |
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Impala
Lounge 2, rue de Berri, dans le VIIIe. Thème : l'Afrique Lancement : 02-2000 Ticket moyen : 40 e Cible : 25 ans et plus |
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Sir
Winston 5, rue de Presbourg, dans le VIIIe. Thème : les colonies anglaises Lancement : 12-1997 (refait à l'identique en 2001 après un incendie) Ticket moyen : 30 e Cible : toutes générations d'adultes |
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MCM
Café 92, bd de Clichy, dans le XVIIIe. Thème : TV et concerts en live Lancement : 06-1998 Ticket moyen : 15 e Cible : 18/30 ans |
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Latina
Café 114, av. des Champs Elysées, dans le VIIIe. Thème : l'Amérique Latine et sa musique Lancement : 09-1999 Ticket moyen : 22 e Cible : 20 ans et plus |
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Maoh
Café 6, rue du Commandant Pilot, à Neuilly-sur-Seine (92) Thème : noodle bar Lancement : 09-2000 Ticket moyen : 30 e Cible : 25/45 ans |
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Bert's
4, rue du Président Wilson, dans le VIIIe. Thème : sandwicherie haut de gamme Lancement : 01-2001 Ticket moyen : 10 e Cible : 25/45 ans |
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Tsé
78, rue d'Auteuil, dans le XVIe. Thème : l'Asie Lancement : 11-2001 Ticket moyen : 45 e Cible : 25 ans et plus zzz22v zzz22t |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2798 Magazine 5 Décembre 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE