Ils ne sont pas du métier... Et alors ? Ils ont pour eux la passion. Mathieu Grinberg et Cyril Thomas ont ouvert le r. dans les murs de l'ancien Morot-Gaudry. Un restaurant-lounge, entre art contemporain et cuisine du marché. Levée de rideau.
Sylvie Soubes
De gauche à droite : Cyril Thomas, Eric Danel, Antoine-Jacques Mery et Mathieu
Grinberg.
Le r. Difficile de faire plus
court comme nom de restaurant. Le r. R pour restaurant. R aussi pour vieux rêve devenu
réalité. Car cet établissement, inauguré le 10 mars dernier dans les murs de l'ancien
Morot-Gaudry, concrétise une ambition germée de longue date dans l'esprit de Mathieu
Grinberg et Cyril Thomas. Le premier rayonnait dans le milieu cinématographique, le
second, dans la papeterie, lorsqu'ils ont décidé de passer à l'acte... Ouvrir leur
affaire. 10 ans qu'ils en parlaient, qu'ils en avaient envie, qu'ils hésitaient. Le
déclic a eu lieu à New York, où l'un d'eux habitait. "Nous étions à un
croisement professionnel. Soit nous nous lancions, soit nous abandonnions définitivement
l'idée, confie Cyril Thomas. C'était maintenant ou jamais." Ce fut
maintenant. Paris - leur ville - fut aussi retenue.
Ceux qui ont été fidèles à Jean-Pierre Morot-Gaudry, désormais à la retraite, se
souviennent de l'accès en angle concave et de l'ascenseur qu'il faut emprunter pour
rejoindre le 8e étage du 6-8 de la rue de la Cavalerie, dans le XVe arrondissement de la
capitale. Le périple les conduit aujourd'hui dans un cadre fort éloigné de ce qu'ils
ont connu. Tout a été cassé, redessiné, revisité dans un esprit contemporain et
world. Seule la vue (imprenable), ouvrant sur les toits et la tour Eiffel, demeure. La
décoration et les plans ont été confiés au designer Christophe Pillet et à
l'architecte Bruno Huet. La salle, agrandie par le trait habile du bâtisseur, joue de
prime abord l'impétuosité des années 1970. A première vue seulement. Laissez votre
regard libre. Abandonnez-vous à l'espace, sans chercher à comprendre ou décrypter un
quelconque message. Laisser l'art agir, s'emparer de vous, vous envahir, vous entraîner.
Car il s'agit bien d'une démarche artistique, alliée - et c'est une volonté des
maîtres de cérémonie - à une cuisine de marché. Et que les sceptiques systématiques
acceptent d'être spectateurs avant de cracher leur venin. L'endroit mérite d'être
appréhendé, visité. Le choix des matériaux : alu, ardoise, bois peint... Le blanc,
utilisé comme trame conductrice... Quelques touches de couleur posées avec parcimonie...
Et ce Paris qui vous encercle. Le r. a de la gueule. On aime ou on n'aime pas. Mais il a
du chien, du talent, de l'esprit.
Toujours une vue superbe sur les toits de Paris.
10 cartes par an
Mathieu Grinberg et Cyril Thomas, novices dans le métier, sont passés de l'autre côté
de la caméra en insistant sur leur exigence de client. "Nous étions en quête
d'un établissement où le cadre soit à notre goût, où l'accueil soit fait par les
patrons, et où la table parle des produits de saison. Nous avions envie de retrouver les
saveurs traditionnelles, une cuisine enracinée. Nous ne voulions surtout pas de cuisine
fusion." Bref, ils ont fait à leur idée. Mélange de pureté et de chaleur, le
r. propose une carte qui évolue dans sa totalité ou presque tous les mois et quelques.
On en prévoit 10 par an. Au programme : 7 à 8 entrées, autant de plats et de desserts. "Notre
carte est éphémère, rythmée par le calendrier culinaire", précisent nos
hôtes, y compris sur la carte. Eric Danel, le chef, se prête volontiers aux desiderata,
aux prétentions du r. L'exercice de style a de quoi séduire. Qui dit mieux pour un
cuisinier ? S'inspirer des bases et puiser dans le panier du mois. "Aller au plus
profond du produit." "Respecter les goûts naturels." Lors de notre
passage : Petits-gris & gésier aux senteurs des bois, petit mesclun aux herbes
fraîches et vinaigre de fruits, Tournedos de canard au porto et sa tatin de navets au
romarin, Pavé de thon légumes sautés au soja, Dos de truite de mer à l'oseille et son
craquant d'épinards aux amandes, Tartelette craquante aux châtaignes et noisettes... Le
concept revient à Antoine-Jacques Mery, à la tête de la société AJM Restauration
Conseil (*). Lui et le chef ont planché un paquet d'heures sur la mentalité de la carte.
Intéressant.
A gauche de la salle, juste avant la table d'hôte cachée par des portes coulissantes, un
grand escalier mène au bar du r. Normalement, lorsque vous lirez ces lignes, celui-ci
bénéficiera de larges canapés et de tables semi-basses (ou semi-hautes, comme il vous
plaira). Objectif : lounge et restauration adaptée, avec une mise en place en fin de
journée et soirée uniquement. Le r. s'octroie en outre les services d'un DJ. Interrogés
sur leur nouveau métier, Mathieu Grinberg et Cyril Thomas esquissent un sourire
malicieux. Leurs yeux pétillent. "Nous sommes là, nous avons la chance d'être
désormais acteurs d'un des commerces sans doute parmi les plus vivants, et nous avons
pour ambition de durer dans ce projet." Qui, Messieurs, n'est plus un projet ! n zzz22v zzz26
Le r.
6/8, rue de la Cavalerie 75015 Paris Tél. : 01 45 67 06 85 |
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Fournisseurs...
France Boissons notamment. Et un clin d'il à Olivier Bertrand, ami personnel de Cyril Thomas, qui a apporté gracieusement son aide durant la gestation et l'ouverture. |
En chiffres |
Investissements Près de 650 000 e Durée des travaux 6 mois Capacité 85 places dans la salle principale et 20 places en terrasse Menu 28 e (entrée + plat ou plat + dessert avec un verre de vin et une demi-bouteille d'eau minérale) Carte Entrée entre 7 et 18 e Plat entre 16 et 27 e Effectif 19 personnes en moyenne |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2798 Magazine 5 Décembre 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE