de juin 2003 |
SAVOIR VENDRE |
La qualité des vins en France, et à l'étranger, ne cesse de s'améliorer. Côté consommateur, le vin est un centre d'intérêt pour un public chaque jour plus passionné. Les restaurateurs ne peuvent pas rester en marge de cette évolution. Ils se doivent d'aller plus loin en matière de service pour mieux répondre à une clientèle exigeante, et mieux informée.
Paul Brunet
Nombre de nos vignerons ont compris qu'il fallait proposer des produits originaux, authentiques et d'une qualité irréprochable. Mais élaborer de bons vins ne suffit pas, encore faut-il qu'ils soient servis correctement. Ce qui malheureusement n'est pas toujours le cas dans les restaurants. Alors comment s'y prendre pour faire progresser le chiffre d'affaires du poste boissons ? Offrir aux clients une prestation de qualité n'implique pas forcément des investissements insurmontables. Il s'agit souvent moins d'une question de temps, qu'une prise de conscience et d'une réelle volonté.
Trop d'erreurs
Dernier maillon de la chaîne, la personne qui assure le service des vins (sommelier,
restaurateur, maître d'hôtel, chef de rang) doit impérativement respecter certaines
règles, pour ne pas annihiler en quelques instants les efforts de ceux qui, viticulteurs,
nologues, n'ont pas ménagé leur peine pour offrir au client un produit de
qualité.
Capsules mal coupées, verres inadaptés, voire ébréchés, main sur l'étiquette, vins
servis à température trop élevée, vins épuisés qui figurent encore sur la carte,
millésime non conforme à celui annoncé... sont autant de désagréments pour le client.
Eu égard aux prix pratiqués, si ces erreurs persistent le client prendra l'habitude de
boire la bonne bouteille à la maison. Ce qui serait fort regrettable pour le
restaurateur.
© Phovoir
Un minimum d'informations
Trop souvent l'approche du service des vins se limite à l'ouverture de la bouteille et au
service du vin dans le verre. C'est primordial, mais trop restrictif. Pour quantité de
raisons, la plupart des établissements n'ont pas de sommelier. Certains le pourraient,
mais n'ont pas encore franchi le pas ! En revanche, dans tous les restaurants, quel que
soit le type d'établissement, le personnel doit être en mesure de répondre à des
questions simples concernant les vins qui figurent à la carte. Cela paraît évident et
pourtant...
On ne demande pas au restaurateur d'être un nologue. Mais, il doit tout de même
s'y intéresser, il y a aujourd'hui suffisamment de livres de qualité sur le sujet pour
qu'il connaisse la base. Plus simplement, la personne qui servira le vin, même si elle
n'est pas sommelière, doit être capable d'expliquer pourquoi il y a parfois quelques
petits cristaux au fond de la bouteille, pourquoi certains vins 'perlent' légèrement au
moment du débouchage, quelle est la différence entre un beaujolais nouveau et un
beaujolais primeur, entre un beaujolais et un beaujolais villages ? Etre en mesure de
faire la différence entre l'amertume et l'astringence. Eviter de dire au client que le
vin "râpe un peu", qu'il est acide, etc.
En tant que client, quel commentaire préférez-vous : "C'est un vin avec une
couleur sombre, il sent bon, les arômes sont bien perceptibles au nez. En bouche, il
râpe un peu, mais dans le fond ce n'est pas désagréable", ou : "Ce vin
a une robe soutenue, un nez agréable et une bonne intensité aromatique. En bouche, on
perçoit une petite pointe d'astringence de bon aloi." Ce langage n'est pas
l'apanage des seuls sommeliers professionnels. S'il est souhaitable d'éviter l'inflation
du vocabulaire pour décrire les arômes présents (ou supposés) dans un vin, il existe
une quinzaine de termes de dégustation qu'il faut connaître et utiliser à bon escient.
Un effort qui n'a rien d'insurmontable... Les apprendre n'est pas une question de temps ou
d'aptitude particulière, mais de volonté.
Ne dites pas : "C'est un vin avec une couleur sombre, il sent bon, les arômes sont bien perceptibles au nez. En bouche, il râpe un peu, mais dans le fond ce n'est pas désagréable." Dites
: |
Servir les vins dans de bonnes conditions
Chacun pense à la température, au choix des verres, bravo, mais
servir un vin dans de bonnes conditions ne se limite pas à ces deux critères, certes,
très importants. Encore faut-il que le vin n'arrive pas trop tard, lorsque le client a
déjà mangé une partie de son plat. C'est encore une erreur trop fréquente.
L'expérience prouve que ce n'est pas une question de temps, mais de volonté. Gagne-t-on
du temps en coupant la capsule au mauvais endroit et en masquant l'étiquette ? Même au
moment du coup de feu, les règles essentielles doivent être impérativement respectées.
Il en va de la renommée de l'établissement et de l'image de nos vins. Pour de nombreux
étrangers, la France reste le pays de l'excellence. Mais quelle déception lorsque le
service du vin n'est pas à la hauteur de la réputation de notre table.
Le client attend du restaurateur une part de rêve. De plus en plus nombreux sont les
restaurateurs qui répondent à cette attente. Ils proposent des vins de régions encore
peu connues. Mais sortir des sentiers battus c'est aussi proposer des demi-verres de vins
différents sur un même plat. C'est servir un vin à l'aveugle, sans demander au client
de l'identifier, (car cela est bien connu, même les meilleurs professionnels du vin
peuvent se tromper lourdement), et simplement lui demander son avis sur ce vin ou sur
l'accord proposé.
Innover, c'est aussi faire découvrir un vin étranger, autre que ceux qui se rencontrent
de plus en plus dans certains établissements (Chianti, Rioja...). Bien sûr, nous avons
assez de bons vins en France ! Alors pour vous donner bonne conscience, servez un vin
étranger élaboré par des Français. Vous n'avez que l'embarras du choix...
Sortir des sentiers battus, c'est aussi tenir compte de l'évolution de la consommation :
il devient de plus en plus difficile de vendre des boissons alcoolisées en restauration.
Les récentes mesures pour la sécurité routière ne font qu'amplifier le phénomène.
Actuellement la plupart des clients refusent l'apéritif, car ils doivent reprendre la
route. Il suffit peut-être de faire preuve d'imagination et de leur proposer un vin avec
un faible degré d'alcool et de mettre cette particularité en évidence. Ces vins
existent, par exemple dans la région du Bugey... Malgré les nombreuses réticences qu'il
a suscitées, en France, pendant très longtemps, le service du vin au verre se rencontre
de plus en plus souvent, innover c'est peut-être proposer deux centilitrages
différents...
Le vin passionne, c'est un sujet à la mode. Partout en France, des cours sont organisés,
les non-professionnels s'y précipitent et y travaillent sérieusement. Il y a, et il y
aura de plus en plus de clients qui souhaiteront parler vins avec vous. Ne les décevez
pas ! Faites en sorte qu'ils prennent plaisir à venir et revenir chez vous, pour parler
du vin et pour le déguster... n
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A ne pas
faire : è Les capsules mal coupées. |
A faire
: è Proposer des vins de régions
inconnues. |
Quelles sont les attentes de la clientèle
? w Obtenir un minimum d'information sur le
vin qui lui est proposé. |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2824 Magazine 5 Juin 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE