de juin 2003 |
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Le Brésil, premier producteur mondial de café, est aussi aujourd'hui le principal fournisseur du torréfacteur italien illy. Un partenariat en faveur de la qualité, couronné depuis 12 ans par les illycaffé Awards. Gros plan.
Sylvie Soubes
Cent, peut-être deux cents invités sont déjà là. La salle de réception du club Monte Libano de São Paulo peut en accueillir 3 fois plus, et elle affichera complet tout à l'heure. Un par un, en couple, ou par petits groupes, tenue de gala de rigueur, ils avancent vers Ernesto Illy - el Doctore - dans une procession quasi solennelle. Poignées de mains, gestes de salut, sourires complices ou protocolaires se mêlent aux compliments et remerciements. Des mots échangés tantôt en portugais, tantôt en italien, tantôt en anglais, parfois même en français. Les 12e illycaffé Awards rassemblent tout le gotha du café au Brésil, les producteurs en lice, des dignitaires de circonstance, des hôtes venus d'Europe. Ce beau monde attend les résultats. Les plus fébriles sont bien sûr les propriétaires de fazendas. Le premier à s'être distingué s'est mis sur son trente et un. Complet noir et chemise blanche. Sa production, deux années de suite sur la plus haute marche du podium, est à nouveau parmi les 50 meilleures retenues, à l'aveugle, par le très sévère laboratoire Assicafé, pour qui seule la qualité, c'est-à-dire l'absence de défauts, compte. Il s'appelle Ernesto Fornano. Une moustache fournie barre un visage cuit par le soleil. Il promène une grande et solide carcasse, le verbe fort et fier, bouillonnant comme un gamin devant un cadeau. S'il remporte le titre, la reconnaissance est totale. "Non seulement aux yeux d'illy, mais aussi au regard de toute la profession", s'exclame-t-il. Il empochera aussi 30 000 dollars. Autre possibilité, pour lui, être dans le top 10. Parmi les 'winners' également récompensés, également acclamés. Quel que soit le rang obtenu, il répète à qui veut l'entendre sa joie d'avoir été sélectionné. Sa manière à lui d'exorciser les dernières minutes qui le séparent du résultat.
Contrairement aux pratiques françaises, les noms des finalistes sont dévoilés avant le repas. Un océan de tables rondes, dressées avec soin, sous un flot de lumières et de drapeaux aux couleurs du torréfacteur italien. illy fait les choses en grand. Sur l'estrade, Ernesto Illy s'adresse à la salle. Le 'café pour patrie', il évoque le marché international puis le rôle essentiel du Brésil et son attachement, enfin, aux petits cultivateurs, à leur travail, à leur coopération. Il est heureux d'être là, heureux de leur fidélité, heureux d'être leur ambassadeur... Applaudissements nourris. Les uns après les autres, les winners sont ensuite appelés. Rui Barbosa Heringer, Walter César Dutra, Cid da Cunha Fernandes, Sebatio Wencelau Rodrigues... La palme 2003 revient à Paulo Takano, dont la ferme à Patrocinio se situe dans le Minas Gerais.
Remise du trophée 2003 à Paulo Takano, en présence de 'el Doctore' illy.
Minas Gerais
La province rafle aussi la mise : 9 producteurs sur les 10 en sont issus. Autre salve
d'applaudissements avant la fête. Au Brésil, chaque événement se termine dans la danse
et les chants. Les 12e illycaffé Awards n'échapperont pas à la samba, tard dans la
nuit.
Le Minas Gerais, au sud-est du territoire, est source de richesse. Au XVIIIe siècle, la
région a produit 1 000 tonnes d'or et 3 millions de carats de diamants. Au XIXe siècle,
le café prend la relève. Les plus grosses plantations se concentrent d'abord autour de
Rio de Janeiro. "Là où il était facile de trouver des esclaves."
L'abolition de l'esclavage et 'l'immigration européenne' vont favoriser ensuite "le
déplacement de la culture du café en direction du Sud". Là où les trois
conditions essentielles au bon développement du caféier sont réunies : sol, climat et
altitude.
Gigi Micheli, l'acheteur de café vert pour illy, l'homme de toutes les négociations
depuis 30 ans, de toutes les situations, de toutes les discussions avec les producteurs,
commente : "Savez-vous que le Brésil est aujourd'hui le premier producteur de
café au monde et que le Minas Gerais représente 50 % de la production ? Les cultivateurs
ont profondément évolué ces dernières décennies. Qu'ils soient du Minas Gerais ou des
autres régions. Ils misent de plus en plus sur la qualité et nous entretenons avec eux
un véritable partenariat. illy place la barre très haut, avec un cahier des charges
rigoureux visant au zéro défaut. Ils sont encouragés par cette politique de qualité,
car ils bénéficient en échange d'une reconnaissance réelle, nationale, voire
internationale. Leurs efforts sont récompensés. On ne le sait pas assez, mais la culture
du café est délicate, complexe. La cueillette des cerises à maturité réclame
plusieurs passages sur une période qui s'étale de mai à septembre. Il faut ensuite
extraire le grain, le nettoyer, protéger les huiles qui garantiront une partie des
arômes..."
Gigi Micheli (à gauche) et les responsables du laboratoire Assicafé ont
accueilli l'équipe commerciale entrepositaire d'illycaffè France. Au centre, Luiggi
Tommasini, p.-d.g. de la filiale française.
100 millions d'hectares potentiels
Le Brésil, poumon de la planète, couvre presque la moitié du continent sud-américain.
La surface de production du café s'étendait l'an dernier à 2,66 millions d'hectares.
Ses limites sont pourtant loin d'être atteintes. On estime en effet à plus de 100
millions d'hectares les terres appropriées à la caféiculture. La modernisation des
techniques a également boosté les rendements. "Les rendements moyens qui ne
dépassaient pas 8 à 9 sacs/ha dans la décennie 1980, tournent désormais à 20 sacs/ha
(dans des conditions climatiques exceptionnelles, comme en 2001)", constatent
deux autres experts. "Dans le passé, le Brésil se satisfaisait d'une politique
qualitative minimaliste. Dans les années 1990, un changement profond s'est opéré. Les
producteurs se sont préoccupé des exigences des consommateurs. (...) Tout récemment, le
Brésil est entré dans la catégorie des fournisseurs de 'cafés spéciaux', comme cela
est le cas en Italie avec la société illy. Dans les pays consommateurs les plus
exigeants en termes de qualité, le Brésil est devenu le principal fournisseur."
Si Ernesto Fornano n'a pas rejoint en 2003 le top 10 des winners, celui-ci n'en n'est pas
moins un exemple de collaboration réussi entre les acteurs de la filière. Augmentation
de la surface de plantation (de 170 à 250 hectares), présence de chercheurs triestins,
adaptation des techniques et des outils, sélections d'arabicas : catuai amarello, boubon
et mundo novo principalement, 10 ans de fourniture ininterrompue avec illy... illy,
fondateur de deux universités du café, l'une à São Paulo, l'autre au siège du groupe,
à Trieste. Marque incontournable de l'univers de l'espresso, présente dans quelque 40
000 restaurants et bars dans le monde, et dont il se boit 5 millions de tasses par jour ! n zzz46n
La surface de production du café au Brésil s'étendait l'an dernier à 2,66
millions d'hectares. Mais les limites sont loin d'être atteintes.
Laboratoire Assicafé, São PauloC'est ici que s'effectuent les premiers tests de qualité du café vert. Passage
obligé et incontournable depuis une dizaine d'années.
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L'Hôtellerie Restauration n° 2824 Magazine 5 Juin 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE