de juin 2003 |
ÉTUDE |
è Très léger coup de frein dans le développement
è Activité en stagnation
è Recul de la demande sur la restauration rapide type hamburger
è Les restaurants de chaînes hôtelières continuent à peiner
è Les entrepreneurs cherchent à relancer l'activité par une refonte des concepts
Etude exclusive L'Hôtellerie-Coach Omnium
Les chaînes de restauration ont passé une année 2002 qui ne leur laissera pas forcément à toutes de bons souvenirs. Ralentissement de l'activité - surtout à partir du second semestre -, difficultés de recrutement du personnel, besoin de relance ou de modernisation de certains concepts, le tout associé à un essoufflement dans le développement du parc : tel peut être le portrait du secteur pour 2002. Tandis que les chaînes de restauration en France ont vu leur offre s'enrichir de 7 % d'unités nouvelles en 2000 et de 8 % en 2001, un très léger coup de frein marque l'année 2002 par un solde positif en nouvelles adresses de 6,7 %. En tout, 360 nouveaux points de vente sont venus s'ajouter aux enseignes présentes en France au 1er janvier 2003, selon l'étude de Coach Omnium pour L'Hôtellerie, contre 404 en 2001 et 361 en 2000.
Un développement maintenu
Ces données globales masquent des inégalités naturelles selon les segments de marché.
Ainsi, la restauration à service rapide, qui représente 46,7 % de l'offre en nombre
d'établissements, maintient sa croissance annuelle avec + 8,2 % d'unités en 2002 (+ 203
établissements) contre + 8 % en 2001. On continue à assister à une diminution sensible
dans les créations pour les formules anglo-saxonnes (+ 5,4 %), qui ont par ailleurs du
plomb dans l'aile en termes d'évolution d'activité, comparées aux formules 'à la
française' et autres (+ 11 %). La restauration à service complet (ou service à table)
n'est pas en reste cette année et annonce 149 nouveaux sites (+ 6,5 %). En cela, les plus
gros développeurs ont été les chaînes à thème 'grill/viande' (+ 42 unités). Buffalo
Grill s'est enrichi de 17 points de vente, suivi de Courtepaille (+ 14). Contre toute
attente, les chaînes hôtelières intégrées sont le segment qui a fait l'objet du plus
grand dynamisme avec 62 créations. Mais cela suit le mouvement général puisque ces
dernières ont gagné 160 hôtels en France en 2002 (dont une grande partie d'hôtels sans
restaurant), selon l'étude annuelle réalisée par Coach Omnium pour L'Hôtellerie
(magazine n° 2815 du 3 avril 2003). La chaîne hôtelière Balladins, pourtant outsider,
est en quelque sorte un des champions de la croissance avec 46 nouveaux restaurants. Cela
correspond à l'adhésion de nouveaux affiliés après la reprise l'année dernière du
réseau par le groupe RMH au Groupe Envergure.
Quant à McDonald's, il continue son développement avec un solde de 60 nouvelles adresses
françaises, proche des 62 de 2001.
Mc Donald's a ouvert 60 unités en France en 2002
Difficultés à se diversifier
Si certaines enseignes progressent tant bien que mal, d'autres font cas de remises en
cause dans leur fondement. Après sa reprise par le Groupe Flo, Bistro Romain a fermé des
sites en attendant de revoir sa copie sur le plan de son positionnement, voire de son
concept. Quick a également continué dans sa démarche d'élimination d'unités peu
rentables, tout en prenant ses distances avec la viande de buf et en proposant
d'autres produits : la crise de la vache folle a marqué les esprits. C'est ce qui a
également poussé Jackson Burger à se reprendre sous le nom de Jackson Restaurant, pour
quitter la sphère trop connotée, selon lui, du hamburger.
Léon de Bruxelles n'a plus ouvert de nouveaux restaurants pour mieux se concentrer sur
une requalification de son produit et sur sa profitabilité. Voire travailler sur une
éventuelle diversification de sa carte trop enfermée, notamment hors de Paris, dans la
formule moules-frites qui limite la fréquence d'achat par la clientèle. L'arrivée de
Michel Morin aux commandes commence en effet à se mesurer : meilleur service, meilleure
image de l'enseigne, reconquête de la clientèle et - on attend les résultats
définitifs - certainement amélioration de la situation financière.
L'année 2002 a vu la chaîne Croq'O'Pain déposer son bilan, laissant sur le carreau une
centaine d'adhérents. L'enseigne a sans doute payé là les conséquences d'un
développement trop dynamique, faussé par une insuffisance de redevances et une absence
de droits d'entrée, mais aussi par un faible contrôle du réseau de franchisés. Un
scénario déjà vu ailleurs... On a également pu deviner la disparition de Victoria Pub
et de Bistro d'Augustin (27 unités en tout) concrétisant une diversification ratée du
groupe des frères Picart, un 'détail' dans la liste des péripéties qui ont marqué
pour eux l'année 2002.
Quant à McDonald's, si le réseau tient plus ou moins bon en France, le groupe va suivre
un sérieux régime minceur, et annonce vouloir fermer environ 600 restaurants dans le
monde en 2003, après avoir liquidé 200 points de vente en 2002, jugés sous-performants.
Le leader mondial de la restauration rapide projette tout de même d'ouvrir 960
restaurants supplémentaires sur la planète, et passe donc d'une moyenne de 4 ouvertures
par jour à 'seulement' 3. Quant à Subway, l'enseigne américaine de sandwiches à façon
aux 17 500 points de vente dans le monde ouvre une unité à Lille, après Paris-Bastille
et Versailles.
Quai N°1 souhaite atteindre une quarantaine de sites d'ici 5 ans.
Peu de réseaux augmentent leur parc
D'une manière générale, si les chaînes de restauration en France paraissent soutenir
de manière quasi linéaire leurs efforts de développement, sur 95 marques recensées par
Coach Omnium, 42 n'ont pas ouvert de nouvelles unités en 2002 ou même en ont perdu. A
côté d'elles, seuls 11 réseaux se sont étoffés de 10 nouvelles adresses et plus. Or,
la règle veut qu'un réseau qui ne progresse pas recule. Augmenter son parc, notamment
par la franchise, signifie engranger de l'argent frais, se doter de moyens promotionnels,
amortir ses frais de structure, et surtout accroître sa notoriété, source de nouvelle
clientèle. La franchise demeure d'ailleurs le principal moteur de la croissance et
représente déjà 52 % de l'offre. Près de 60 % des enseignes sont des franchiseurs
auxquels il faut ajouter quelques réseaux comme Maître Kanter, Au Bureau ou Quai N° 1,
deux enseignes qui proposent des partenariats moins contraignants que la franchise régie
par la loi Doubin.
Même Courtepaille qui faisait figure 'd'exception culturelle' s'est récemment lancé
vers une ouverture plus volontariste de son réseau à des franchisés. Dans l'ensemble
des chaînes de restauration, la redevance moyenne annuelle par unité au titre de la
franchise se situe autour de 40 000 e, mais cela peut se hisser jusqu'à une moyenne de 90
000 e pour les enseignes à forte notoriété et/ou les établissements de grosse
capacité. Faire appel à la restauration concédée, un peu comme en restauration
collective, est une opportunité qui se présente de plus en plus. Des groupes de
restauration, tels Elior, Autogrill, Bertrand ou SSP-Compass, n'hésitent pas à se mettre
sur les rangs pour ouvrir et prendre en main, selon les cas, des Hippo, McDo, Brioche
Dorée, Pizza Pasta del Arte, Paul, Pizza Hut, Quick, Buffalo Grill et d'autres enseignes.
Ils savent d'ailleurs s'implanter dans des lieux de prédilection comme les aéroports,
les centres commerciaux ou les multiplexes de cinéma, là où les franchiseurs auraient
parfois du mal à s'installer tout seul.
Buffalo Grill avait une avance en activité avant l'affaire judiciaire de
décembre 2002.
Evolution des concepts
Relancer la demande, moderniser son offre, évoluer par son concept et sa politique
marketing sont les maîtres mots qui circulent dans le monde des chaînes de restauration,
en France comme ailleurs. Quand les chaînes disposent en France de près de 750 000
places assises et servent près de 771 millions de repas annuellement, il leur faut
constamment bouger. Car le premier mal qui guette les opérateurs de la restauration
organisée, comme d'ailleurs tout restaurateur, est la lassitude de la clientèle. Elle
n'hésite pas à aller goûter les plats des voisins, histoire de renouveler ses plaisirs.
Plus d'un tiers des chaînes interrogées disent travailler sur un relooking, un
toilettage en profondeur ou même un renouveau de leur concept. El Rancho mène par
exemple une réflexion sur l'identité de son bâtiment solo. La Boucherie s'intéresse à
la périphérie des villes et plus spécialement aux centres commerciaux, en installant
des solos, dont l'investissement est d'environ 1,3 Me (hors foncier), contre 600 000 à
900 000 e en centre-ville. En vrac, KFC, Comptoir du Saumon, Comfort-Primevère, Café
Leffe et d'autres disent retoucher l'intérieur de leurs unités ou testent de nouveaux
décors. McDonald's veut s'investir dans la 'restauration détente' en créant des décors
atypiques plus proches des spécificités de la région et des jeux d'ambiance par zones
pour chaque restaurant. Quick, Pizza Hut ou Comptoir de Maître Kanter inaugurent
respectivement leur nouvelle génération de restaurants. Ibis uvre dans la
recherche de thématisation. Il y a aussi des séances de rénovations comme chez
Balladins, Ikea ou Courtepaille. D'autres encore, ou parfois les mêmes, lancent de
nouvelles formules, de nouveaux thèmes promotionnels, de nouvelles cartes.
Paul veut ouvrir un millier de points de vente sur 10 à 15 ans.
Elargir la clientèle
Les chaînes de restauration n'ont de cesse de se remettre en cause ; et quand le produit
est ficelé et très normé, on joue sur l'évolution du service. C'est le cas avec, par
exemple, la mise en place du non-stop. A l'instar de la restauration à service rapide,
quelques enseignes se sont jetées dans la brèche, tels Hippopotamus, Bistro Romain ou
encore Pizza Pino, trouvant là un moyen de toucher une clientèle complémentaire,
laquelle change ses habitudes alimentaires avec la RTT. Pour cela, des réductions de prix
sont proposées, lesquelles peuvent se situer à - 30 % du tarif normal. Chez Pizza Pino,
la restauration hors service midi et soir représenterait 5,2 % du chiffre d'affaires
global. Mais d'autres assouplissements, pour plaire aux clients, se présentent comme la
généralisation de la proposition d'une variété de garnitures, servies à volonté,
comme chez Courtepaille. Là où d'autres, y compris dans quelques chaînes, appliquent
encore des suppléments pour qui demande des légumes verts à la place des frites. Enfin,
sachant que la liste des nouveautés est infinie, la restauration livrée intéresse
quelques acteurs, même si elle demeure marginale sur le chiffre d'affaires. Sauf chez
Class'Croûte, qui s'en est fait une spécialité. Cette activité de livraison de
sandwiches et de plateaux-repas à domicile et dans les entreprises correspondrait à
environ 70 % des recettes pour une unité traditionnelle. D'autres enseignes ont mis un
terme à la restauration livrée, du fait des exigences d'organisation et de productivité
que cela leur demandait.
Le poids des chaînes hôtelières
Tout comme en 2001, nous avons pu recenser 95 enseignes de chaînes de restauration,
disposant de 5 unités et plus. Comme au lancement de cette étude exclusive réalisée
pour L'Hôtellerie, les formules standardisées des chaînes hôtelières
intégrées (Campanile, Ibis, Comfort-Primevère, Kyriad, Novotel...) ont été prises en
compte. Ce sont en effet de vrais concepts qui attirent une clientèle extérieure aux
hôtels, notamment lors des déjeuners, et détiennent donc des parts de marché
significatives. Rien que chez Campanile, on sert allégrement près de 9,8 millions de
repas par an. L'enseigne du Groupe Envergure se place ainsi à la 6e place de notre
palmarès en chiffre d'affaires restauration. L'ensemble des chaînes de restauration
représente 5 756 unités en France proposant de la restauration sur place (hors points de
vente de restauration à emporter). Avec 113 000 établissements de restauration
commerciale (y compris les restaurants d'hôtels), les chaînes de restauration fédèrent
donc 5 % de l'offre en nombre d'établissements. Mais elles pèsent tout de même 29 % du
nombre total de couverts servis par le secteur et 19,7 % du volume d'affaires.
Une activité globalement décevante
L'année 2002 avait mieux commencé pour les chaînes de restauration organisée qu'elle
n'a terminé. Les premiers toussotements dans la fréquentation des restaurants ont eu
lieu à partir de juillet, avec ensuite un réel effondrement à compter de novembre.
Depuis, les restaurateurs n'ont pas vu la courbe de fréquentation se relever de façon
significative. Taux de chômage en hausse, baisse du moral des ménages, essoufflement de
l'économie, il n'en a pas fallu davantage pour que les clients poussent moins souvent la
porte des restaurants. Si l'on ajoute la pression du travail dans les entreprises et les
conséquences des 35 heures qui vident les restaurants les lundis et les vendredis midi,
le panorama sera complet. Du coup, à périmètre comparable et toutes chaînes
confondues, le chiffre d'affaires 2002 est au global en quasi stagnation de 0,3 % par
rapport à 2001. Mais il y a une forte distinction entre les segments de restauration.
Ainsi, si la restauration à service complet voit une hausse insoupçonnée de ses
recettes (+ 8,8 %), c'est le sale temps pour la restauration à service rapide qui peine
avec - 6,9 % de chiffre d'affaires, sans la prise en compte des ouvertures. Chez ces
derniers, on continue d'assister à un important recul de la demande. Les formules
anglo-saxonnes sont la principale victime d'une réduction de la fréquentation, tandis
que les autres formules à la française montrent une petite progression de quelques
points. S'agit-il d'une lassitude des clients ? Plus que d'autres causes, c'est
probablement le premier des motifs de ce 'désengagement' de la clientèle, selon
plusieurs enquêtes de Coach Omnium. Pourtant, tout était là pour promettre à la
restauration rapide d'aller bien, dont les effets de la RTT qui poussent les gens à
prendre plus souvent leurs repas sur le pouce. Mais la lassitude semble avoir été la
plus forte, en tout cas sur les hamburgers restaurants. Pourtant, malgré cette baisse de
leur chiffre d'affaires, les chaînes de restauration rapide caracolent dans la
stratosphère en volume de repas servis par unité et en chiffre d'affaires. Les
restaurants de chaînes avec service à table ont été exceptionnellement gâtés en
2002. Ils ont profité d'une amélioration de leur ticket moyen (+ 3,4 %), soit mieux que
l'inflation (+ 2,3 %), et d'une belle progression du nombre de couverts servis. Ils s'en
sont globalement mieux sortis que la restauration commerciale indépendante qui a perdu
3,5 % de couverts en 2002 par rapport à 2001, mais qui a bénéficié d'une nette
amélioration de ses tickets moyens (+ 7,3 %), grâce au passage à l'euro. Un autre
facteur favorable à la restauration de chaînes est la tendance par les indépendants à
augmenter la durée de leur fermeture hebdomadaire, par manque de personnel ou à cause de
la réduction du temps de travail, tandis que les réseaux restent ouverts 7j/7. Un
opérateur comme Buffalo Grill avait tellement engrangé de couverts servis additionnels
durant le premier semestre notamment, que la perte d'activité de décembre de près de 40
%, suite à l'affaire judiciaire qui l'a bousculé, a été purement et simplement
absorbée et ne se voit pas dans le volume d'affaires annuel. Ce sont en revanche les
restaurants de chaînes hôtelières qui ont encore perdu en activité, soit - 6,4 % de
couverts servis ; c'est un phénomène qui se répète depuis au moins 4 ans maintenant.
Au total, les chaînes de restauration commerciale en France ont réalisé près de 7
milliards d'euros de volume d'affaires TTC en 2002, dont 44,7 % reviennent à la
restauration rapide. Une belle performance générale qu'il faut sans doute savoir saluer.
Donner un coup de neuf à leurs offres, garantir la qualité de leurs prestations et
surtout régler leurs problèmes de personnel sera sans doute le grand chantier qui sera
poursuivi par les chaînes de restauration en 2003. n
Columbus Café se présente comme la première chaîne française d'Espresso Bars.
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L'Hôtellerie Restauration n° 2824 Magazine 5 Juin 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE