de juin 2003 |
STRATÉGIE |
L'eau en bouteille innove, change de format et de look. De nouveaux marchés se créent. En CHR, l'eau ordinaire a pourtant la vie dure. A tort ? A raison ? Au fil de l'eau...
Sylvie Soubes
Si vous n'utilisez pas de verres siglés, ne négligez pas pour autant le verre de
service. L'Estacuade, à Bordeaux, a choisi la sobre élégance d'un verre type tumbler.
En France, la consommation moyenne d'eau en bouteille a augmenté de 30 % durant la dernière décennie. Elle est en moyenne de 100 litres par an et par personne. En 2000, une enquête, demandée par l'Institut français de l'environnement et les Agences de l'eau, faisait ressortir que 39 % des Français et 43 % de femmes buvaient exclusivement de l'eau en bouteille à table. L'eau minérale comme l'eau de source ont la cote. Elles garantissent une qualité, un produit non pollué et sont plus agréables au goût que la plupart des eaux du robinet. Paradoxalement, en restauration, la carafe d'eau demeure un problème récurrent. Surtout un débat, dont la redite porte essentiellement sur l'intérêt commercial. Une étude L'Hôtellerie/Coach Omnium révèle que 51 % des Français consomment régulièrement de l'eau minérale au déjeuner et 39 % au dîner. Mais 59,7 % des interrogés pointent du doigt les tarifs pratiqués par les restaurateurs. L'eau en bouteille, trop cher au restaurant ? Vaste débat, surtout quand on sait que le prix de référence, dans le circuit CHR, pour la plupart des opérateurs, est celui du coca-cola. Tout dépend, en fait, des prestations déclinées par l'établissement.
Sur le web Connaissance de l'eau, découverte des nouveaux produits, des animations, des tendances. Plusieurs sites sont mis en ligne par les grandes marques. Quelques adresses incontournables www.evian.com, www.institut-eau.com 2 adresses ont également retenu notre attention pour leur ouverture, notamment, sur les eaux étrangères : www.sooaf.com et www.aquamania.net |
Autre approche de la traçabilité de l'eau, celle défendue par la société Ice
Rocks qui propose de l'eau de source conditionnée en glaçons prêts à être congelés.
Les bacs à glace sont hermétiques, jetables et facilement ouvrables. Web : www.icerocks.fr
Produit d'appel
Aujourd'hui, les formules du midi incluent souvent la boisson avec, au choix,
généralement, un quart de vin, un demi de bière ou une PBC d'eau minérale. L'approche
concerne davantage les établissements de chaînes que les indépendants, qui ne
considèrent pas, dans l'ensemble, l'eau minérale comme un produit d'appel. "Je
ne peux pas réduire mes marges au minimum sur tout, explique un professionnel
parisien. Vous savez, la concurrence est rude et le client exigeant. La qualité dans
l'assiette est essentielle et je préfère me rattraper sur d'autres produits. Je suis
dans l'obligation de faire un choix, au risque de fermer boutique." Se "rattraper"
sur l'eau minérale est un réflexe assez fréquent. Un bar à vins girondin s'inscrit
dans la même logique. "Je fais peu de marges sur le vin. C'est volontaire. C'est
ma façon de faire plaisir à ma clientèle. Les ventes d'eau minérale me permettent de
rééquilibrer les chiffres", commente le propriétaire. Ces constats reflètent
assez bien à eux deux la réalité du marché.
2 acteurs majeurs, plus 1 Le
marché français de l'eau embouteillée est dominé par les groupes Danone et Nestlé
Waters. A eux deux, ils détiennent les trois quarts du marché de l'eau embouteillée. Principales marques par groupe Les ventes d'eau en bouteille en CHR seraient égales à un peu plus de 20 % du marché total, toutes eaux confondues. |
Certaines eaux revendiquent leur respect des mets et des vins. C'est le cas de
Bru, une eau belge, baptisée l'Eau Perlée. "Cette eau ne ressemble ni à l'eau
plate, ni à l'eau gazeuse, et elle est si faiblement minéralisée qu'elle respecte
parfaitement les vins et les mets les plus fins", argumente-t-on au pays de
Tintin.
Habitude
La carafe à discrétion a été instaurée avec l'arrêté du 8 juin 1967, qui
prévoyait, dans son article 4, que le pain, les épices et l'eau ordinaire devaient être
mis à la disposition du client à l'occasion des repas. Cette loi a toutefois été
modifiée en partie en 1990, et le principe de la mise à disposition gracieuse de l'eau
est abrogé implicitement selon les services de la concurrence et des fraudes (lire L'Hôtellerie
n° 2730 et n° 2818, rubrique Courrier des lecteurs). Le restaurateur n'est plus
aujourd'hui dans l'obligation de fournir gratuitement une carafe d'eau. Il peut la faire
payer ou refuser d'en servir, dès lors qu'il l'affiche clairement.
D'un point de vue commercial, faire payer l'eau ordinaire ou s'abstenir de la servir est
assez mal vécu par le consommateur. Ce même consommateur qui, comme on vient de le voir,
est pourtant grand buveur d'eau embouteillée chez lui. Le paradoxe tient donc à la fois
de l'habitude et du coût. L'habitude qu'on lui serve une carafe d'eau gratuite et le
montant à ses yeux excessif de l'eau embouteillée au restaurant.
Le marché de l'eau, en particulier dans le circuit alimentaire, a considérablement
évolué ces dernières années. Les linéaires s'étoffent. Les eaux ont des goûts
différents, des caractéristiques adaptées à des besoins précis, elles font
référence à des modes de vie, à des aspects culturels. A chaque eau ses plaisirs. Hors
foyer, cette tendance se précise. Les cartes des eaux entrent dans cette logique. "Lorsque
je fais des semaines à thème, je mets aussi l'accent sur l'eau", témoigne un
professionnel du sud de la France qui se fournit alors chez Metro. "Les
entrepositaires ont des offres plus réduites. Ce n'est pas toujours facile de se procurer
certaines eaux, notamment étrangères", regrette-t-il. Localement, des
restaurateurs s'appuient aussi sur les eaux régionales. Plancoët en Bretagne, Carola
dans l'est de la France. "C'est une manière d'affirmer son appartenance au
terroir, notamment lorsqu'on a, comme moi, une clientèle étrangère importante",
estime un professionnel breton.
Les eaux ont leur créneau. D'après une étude scientifique, Saint-Yorre
améliore l'hydratation et diminue la fatigue après un exercice intense. Une constatation
qui lui ouvre les portes des clubs house notamment.
L'eau 'nomade' et l'eau 'aromatisée' sont des concepts récents. Le premier porte sur un format facilement transportable. Des marques comme Vittel, Perrier ou Evian ont ouvert le marché avec succès. Vittel en initiant le 'bouchon sport', Perrier en réussissant à enfermer ses bulles dans une bouteille en plastique, Evian déclinant un système qui permet d'accrocher la bouteille sur un sac de voyage. Ces bouteilles sont principalement commercialisées dans le 3e marché et en GMS. Dans le circuit traditionnel, ces formats représentent une vente additionnelle. Le concept des eaux aromatisées trouve, lui aussi, preneur en restauration. La gamme Ligne et Beauté et Ligne et Tonus de Contrex a fait ses débuts dans les salons de thé et les établissements thermaux. Un moyen aussi pour les grandes marques de pénétrer le marché des soft drinks, en s'appuyant sur l'hygiène alimentaire et la forme. Perrier Fluo, en PBC, et en place chez les entrepositaires depuis avril, en est un bon exemple. Dans la restauration étoilée, l'eau de Louis XIV fait de plus en plus d'adeptes. Chateldon, distribuée par Neptune (groupe Castel), est une eau naturellement gazeuse dont la production ne dépasse pas 600 000 cols/an. Sa rareté, son prestigieux passé à la cour de Versailles et ses fines bulles sont des atouts incontestables aux yeux des sommeliers. Wattwiller, née au cur du Parc naturel des Ballons des Vosges, s'inscrit dans cette logique, mettant en avant sa pureté (zéro nitrate, zéro nitrite), sa richesse en calcium, sa faible teneur en sodium... Les restaurateurs appréciant également le design original de la bouteille. "L'eau en bouteille est un outil commercial important, confie un sommelier d'une grande maison. La fragmentation du marché ouvre des niches. Il faut saisir toutes les opportunités, d'autant plus que les consommateurs sont ouverts aux nouveaux produits, aux produits différents. Les professionnels ont encore du chemin à faire. Regardez, peu de professionnels savent faire la différence entre une Thonon et une Evian. Nous devons nous y mettre. A l'heure de la traçabilité et du produit vrai, les eaux embouteillées devraient être davantage valorisées dans nos établissements." Ce ne sont pas les minéraliers qui viendront contredire cet avis. n zzz46e
Evian Nomade a été 'Elu produit de l'année' 2001. Ce prix lui a été décerné
en début d'année à Paris.
Du bon service de
l'eau... è L'eau
en bouteille doit être servie fraîche, jamais glacée (autour de 15 °C pour une eau
plate et de 8 à 12 °C pour une eau pétillante). |
FocusPerrier Fluo aussi en PBC
Perrier Fluo, commercialisé
au printemps 2002 en PET, a connu rapidement un énorme succès dans les circuits de vente
à emporter, allant de la cafétéria à la station-service. Clientèle ciblée : les
adolescents et les jeunes adultes, jusqu'à 30/35 ans. Perrier Fluo constitue une
alternative entre l'eau et le soft drink. C'est une boisson "fraîche et
désaltérante", "peu sucrée" qui décline 3 parfums
contemporains : cerise-gingembre, menthe poivrée et citron-genièvre. Elle était
accompagnée, pour son lancement, d'une publicité 'décalée', dans un registre aussi
coloré que souriant. Un site Web a également été créé, multipliant effets
graphiques, jeux et audaces. Cette année, Nestlé Waters France vient de passer la
vitesse supérieure en diffusant la boisson en CHR, conditionnée en bouteille de verre
consignée de 33 cl. "Le circuit traditionnel demeure la vitrine incontournable de
nos marques, rappelle Hervé Bour'chis, président de Nestlé Waters France. Il
était légitime de leur offrir le conditionnement adapté." Perrier Fluo, c'est... |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2824 Magazine 5 Juin 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE