Thibaut Ruggieri : "C'est étrange ! Ce n'était pas une surprise, car c'est la tradition que le vainqueur du concours devienne le président du jury international de l'édition suivante. Je ne suis pas arrivé la boule au ventre comme il y a deux ans mais avec une appréhension certaine parce que j'ai parfaitement conscience de ce que les candidats vivent. C'est très dur, on s'investit à 200% pendant un an et demi, deux ans parfois. Se retrouver dans la position de celui qui juge sachant le parcours qu'ils ont en amont, cela n'est pas évident".
Comment l'avez-vous vécu ?
"C'est une grosse responsabilité parce qu'il y a beaucoup de travail engagé, mais cela reste un concours et il faut déterminer le meilleur. Chacun des 24 méritent de la considération. Pour moi, c'est déjà une victoire que d'être à la finale. Je leur tire mon chapeau à chacun.
En tant que président, on goûte tous les plats, les 24 plats poisson et les 24 plats viande. Tester le résultat, l'aboutissement, cela nous est apporté sur un plateau et c'est passionnant. Mais en même temps, c'est très dur physiquement. Il y a 24 plats à goûter par jour et il faut faire vite tout en restant lucide pour juger à sa bonne valeur le travail mis dans chaque assiette. Il n'est pas question de bacler une appréciation parce qu'on en a mangé suffisamment au préalable, donc il faut trouver des ressources pour rester le plus juste possible sans dénigrer leur travail".
Est-ce que cette expérience de juge vous a appris quelque chose ?
"Justement, j'étais en train d'en parler avec Arnaud Lallement. En tant que candidat, vous vous imaginez que sur votre plat les trois petites déco que vous allez mettre vont faire mouche sur le jury et que ça va faire carton plein, alors que quand vous êtes jury, la première chose que vous faites, c'est de toucher l'assiette. Si elle est froide, il y a 50% des points qui sautent. C'est comme ça, parce qu'une assiette froide en cuisine, ce n'est pas bon. Si c'est bien chaud, bien cuit, bien assaisonné et si par-dessus ça c'est beau, tant mieux ! Mais la base, c'est ça, il ne faut pas se tromper de cible. Le goût avant le design et le visuel. Le Bocuse d'or est un concours artistique avec beaucoup de concepts, mais il faut toujours revenir au goût. C'est intéressant d'être dans la position du juge parce qu'on voit ce qui fait vraiment gagner des points".
Publié par Propos recueillis par Nadine Lemoine