Fondée en 1968 et construite sur un ancien relais de poste, l’Auberge du relais de Coustoubi vient de trouver sa relève. Odette et Jean-Pierre Viguier ont eu le plaisir, en avril 2023, de passer la main à leur cadet après plus de 37 années aux commandes. Si leurs deux fils sont diplômés de l’école hôtelière, chacun a tracé sa route et aucun ne semblait prêt pour la reprise. “Avec le confinement et un autre rythme, nous avons pris conscience que nous avions fait notre temps et que l’on ne pouvait plus continuer au même rythme. Comme Bertrand avait fondé avec ses cousins Les Coultades de Coustoubi afin de vendre le vin qu’ils produisent ensemble et qu’il appréciait par ailleurs son poste de caviste, nous n’y croyions plus”, affirme Odette Viguier. Pourtant, en silence, Bertrand Viguier n’a jamais perdu de vue la transmission mais le lieu reculé, les hivers calmes et son implication dans la viticulture le faisaient réfléchir. “Il me fallait trouver un équilibre”, précise ce dernier.
Une affaire rondement menée
Cela s’est donc fait par étapes et en s’adaptant : “Je pensais prendre un chef cuisinier, je n’avais pas envisagé d’être seul en salle et en cuisine mais je n’ai jamais trouvé personne.” Et Jean-Pierre Viguier de renchérir : “Nos amis Bras et Régis Saint-Geniez, leur second depuis trente ans, ont conseillé à Bertrand de se charger de la cuisine lui-même pour ne pas perdre en qualité.” Seul, il a fallu réduire la voilure. Alors que ses parents géraient huit chambres d’hôtel, le nouveau dirigeant est passé en chambres d’hôtes avec seulement cinq chambres et une législation moins contraignante. “Grâce à l’aide du notaire et du comptable avec qui nous travaillions déjà, j’ai mis un mois pour créer ma société. J’ai choisi la forme juridique Sasu [Société par action simplifiée unipersonnelle] qui me permet de percevoir un salaire.” Les choses s’avérèrent plus complexes avec la banque pour le rachat du fonds de commerce : “Trois mois d’attente pour obtenir une réponse alors que j’avais vendu un appartement pour leur offrir un apport suffisant.” Le jeune créateur a ensuite loué les murs de l’auberge à ses parents grâce à un bail commercial. Il a également fait le choix de refaire une formation pour demander son permis d’exploitation et conserver sa licence IV. L’auberge continuera d’offrir aux habitants un relais du Crédit agricole permettant de pallier l’absence de distributeurs alentour mais renonce à sa fonction de bar-tabac.
Travail en famille
Si, officiellement, le seul maitre à bord est à présent leur fils, en coulisses, les parents reconnaissent qu’il n’est pas si simple de laisser la place et de laisser faire. “Mais bon maintenant, je suis heureux d’être dehors pour m’occuper du potager et des poules, et je prends toujours autant plaisir à raconter l’histoire des gorges de la Truyère aux clients !”, confie Jean-Pierre Viguier, qui continue donc à jouer les guides touristiques et ne se prive pas d’interpréter quelques morceaux d’accordéon comme il aimait le faire en lâchant son piano, quand Odette prépare toujours sa fouace et ses confitures maison. Et le fils de rétorquer : “Je n’ai pas changé grand-chose. J’ai gardé le menu unique. Je propose toujours de la cuisine aveyronnaise.” Il faut dire que les enfants de la famille sont allés à bonne école. “ Dans les restaurants, les enfants viennent toujours donner un coup de main pendant les vacances. Ils apprennent avec nous en définitive. Et puis notre fils est réputé pour savoir faire un festin avec rien durant les vendanges. Comme on sait faire à la campagne.”
Bertrand Viguier imprime sa marque tranquillement. Déjà ce vigneron a lancé ses premières soirées dégustations. Il propose les vins des Coultades de Coustoubi sur la carte et à la vente. Ses soirées pizzas rencontrent un grand succès. “Les gens du village sont revenus dès qu’il a ouvert sa table à tout le monde. Nous, à la fin, nous ne cuisinions plus que pour les clients de l’hôtel. Or les clients de passage apprécient la présence des locaux. Pour l’instant, le bouche à oreille suffit”, conclut Odette Viguier.
Publié par Céline CAMMARATA