Quand avez-vous su que vous vouliez devenir cuisinier ?
Quand j’avais 15-16 ans, il fallait que je choisisse un métier. J’ai été touché par le regard bienveillant et admiratif des amis de mes parents quand ils mangeaient à la maison. Je voyais que la cuisine rendait les gens heureux et que cela pouvait faire du bien. Comme j’étais nul à l’école, je me suis dit : si je fais bien à manger, les gens me regarderont différemment. C’était mon raisonnement de garçon de 15 ans. Ensuite, il y a eu le lycée hôtelier. Puis la vraie foi en la cuisine m’est venue chez les sœurs Falgegaltier dans l’Aveyron. Les soeurs Fagegaltier font partie de ma colonne vertébrale. C’est ce qui m’a construit. Cela m’a permis d’avoir un socle solide de formation pour tout ce que j’ai construit derrière. Comme mes parents m’ont fourni le socle de l’éducation qui me sert encore aujourd’hui.
Le parcours pour devenir cuisinier, ce n’est pas aller à l’école et apprendre à faire une blanquette de veau. La formation passe par de multiples apprentissages. Il faut se former auprès des grands chefs, prendre le temps d’apprendre son métier, mesurer les contraintes et les bénéfices, se passionner. Je suis entré comme en religion dans ce métier. Il est comme un tatouage. Si tu l’aimes, il te collera à la peau toute ta vie.
J’ai eu la passion de la cuisine, du fourneau, du coup de feu, du service, de la précision, de l’adrénaline, de cette remise en question perpétuelle et de cette appartenance à ce métier. J’essaye de donner aux jeunes le sens de cette appartenance dans ce monde où tout va trop vite, un jour ici, un jour là. On a l’impression qu’il faut passer les étapes le plus vite possible pour l’expérience, la connaissance. Alors que le savoir, c’est comme la bonne cuisine, le bon service, la bonne équation, il faut du temps. Apprendre c’est une histoire de temps. Si l’on saute des étapes, l’apprentissage ne sera pas complet. Or c’est tout ce qui te manquera par la suite.
Et pâtissier ?
C’était en même temps. J’aimais la cuisine et j’aimais les gâteaux. Naturellement, le cursus après la 3ème, c’était le lycée hôtelier avec la cuisine et le service dès la première année. C’est très important. Vouloir faire seulement de la cuisine, c’est dommage. Aujourd’hui, je gère des restaurants. Mes connaissances en cuisine, salle et pâtisserie me servent toutes les trois. Comment veux-tu appréhender le métier de la restauration si tu ne sais pas regarder et comprendre ton serveur, ton directeur ? Comprendre ce qu’il ressent, sa pression ou encore le client. C’est un métier global. Pour avancer dans ce métier, il faut comprendre l’agriculture, les produits, la cuisine, mais aussi les métiers de la salle, comment on sert le vin, etc. Si tu ne l’as pas vu à l’école, comment peux-tu le savoir ? Je ne dis pas que je pourrais être directeur de restaurant mais j’ai appris les bases. Quand on est jeune, on est une éponge. Je n’ai jamais été serveur mais je comprends mes serveurs et je partage avec eux. C’est très important. Nous formons qu’une seule et même équipe.
Après mon CAP et BEP cuisine, je suis parti en apprentissage de pâtisserie. Puis je suis revenu en apprentissage en cuisine en faisant un brevet professionnel car je voulais continuer à apprendre sous ce « protectorat » de l’apprentissage. Je me disais : « je compte pour un demi et si plus tard, je compte pour un. Ce sera fantastique. » En BP, j’ai commencé aux entrées et à la pâtisserie, avant de passer à la viande et aux poissons.
Publié par Nadine LEMOINE