Dirigé par un Français, Antoine Lecas, le Juvia, restaurant ouvert depuis février 2012 est devenu l'endroit à la mode de Miami. Y obtenir une table relève de la gageure. Juvia a nécessité de lourds investissements puisqu'un investisseur privé, Jonas Millan, a déboursé une somme conséquente pour permettre à cet établissement de 168 places assises de voir le jour.
Avec 65 salariés en salle et 45 en cuisine, la tâche d'Antoine Lecas a demandé une préparation minutieuse. "Nous avons loué durant deux mois, avant l'ouverture du Juvia, un autre restaurant pour entraîner le personnel de salle, ce qui a entraîné un écrémage au niveau du personnel de salle de l'ordre de 10 %, explique-t-il. Ensuite, nous avons procédé à trois pré-ouvertures avec nos familles, nos amis afin que le 'grand soir' se déroule sans fausse note, car les Américains pardonnent rarement les erreurs quant à leurs attentes."
"Une énorme machine à faire tourner"
La journée, le restaurant offre une vue imprenable sur l'ensemble de la ville, permettant de saisir d'un coup d'oeil la baie de Biscayne et, une fois la nuit tombée, la ville scintillant de toutes ses lumières. Afin d'apporter une certaine fraîcheur au climat tropical de la plus cubaine des villes américaines, la cuisine du restaurant emprunte autant aux gastronomies asiatiques que sud-américaines. Bref, une cuisine 'fusion', mariant avec bonheur poissons, fruits de mers, mais également des viandes, produits piochés eux aussi le long d'une diagonale qui irait de Valparaiso à Bangkok. Le tout, évidemment, avec des produits frais.
"Nous effectuons deux services par repas, avec un ticket moyen oscillant entre 100 $ et 120 $ [76 et 91 € environ, NDLR]. L'approximation tant en cuisine qu'en salle est impossible, la gastronomie fusion implique d'avoir une solide équipe. Or le chef, Sunny Oh officiait auparavant dans les cuisines d'un des restaurants Nobu [chantre de la cuisine fusion, NDLR] de New York. Il est secondé par un français prometteur, Laurent Cantineaux ancien de l'école Ferrandi. Le pâtissier, Gregory Gourreau, est également français, puisque nous revenons aux fondamentaux de la gastronomie avec nos pâtisseries françaises à la fin du repas." La madeleine de Proust de ces Français expatriés ? Malgré le sourire et la bonne humeur, un détail révèle le travail quotidien acharné de ce professionnel : l'absence de bronzage. " Le métier de 'general manager' consiste à veiller à ce que tout soit parfait. C'est une énorme machine à faire tourner, entre 200 et 300 couverts par service."
Le décorateur Patrick Blanc a créé pour cet établissement un mur végétal rafraîchissant, tandis qu'une fontaine vient apporter une note de calme bienvenue face au tumulte de la ville. Une atmosphère apaisée dans laquelle se fond l'uniforme du personnel : décontracté et chic à la fois, celui-ci se compose d'un jean beige et d'une chemise blanche de marque spécialement dessiné pour le restaurant. "Le personnel peut ainsi travailler à son aise tout en étant reconnaissable par les clients."
"Les Américains ont la culture du cocktail"
Le Juvia est également un bar à cocktails. La star du moment étant le Purple Rain, élixir contenant de la chicha morada, une boisson non alcoolisée à base de maïs pourpre originaire du Pérou. "En France, si vous demandez la carte des cocktails dans n'importe quel bar, vous trouverez invariablement les mêmes cocktails partout. Ici, aux États-Unis, les gens aiment découvrir des nouveautés. En France, la clientèle boude un peu ce type de produit. C'est dommage car c'est un moyen de découvrir des produits méconnus, susceptibles d'être réemployés dans des recettes", continue Antoine Lecas. Le bar du Juvia propose ainsi plus d'une quinzaine de créations originales de cocktails, parfois en déclinant des cocktails existants avec d'autres ingrédients.
"Nous avons pour objectif d'atteindre les 10 M$ [environ 7,6 M€, NDLR] de chiffres d'affaires la première année. Après un mois d'ouverture, si nous continuons ainsi nous espérons dépasser même ce prévisionnel", conclut Antoine Lecas.
Du haut du 9e étage du 1111 Lincoln Road, le Juvia étonne et séduit. Et ce jusque dans la carte des vins où parmi les 200 étiquettes, vous trouverez toujours un petit coin de France, comme le bordelais, dignement représenté par du pessac-léognan.
Publié par A.J.A