Quand il a racheté l'hôtel Rohan il y a deux ans, Christophe Tailleur n'était pas un inconnu des Strasbourgeois, sans être natif de la ville. Sa réputation avait été acquise avec l'ouverture de son restaurant concept, le Petit Ours, devenu le rendez-vous incontournable en centre-ville. Fort de ce succès il s'était même agrandi en rachetant successivement trois autres restaurants de centre-ville. De la restauration à l'hôtellerie, il n'y a qu'un pas, que Christophe Tailleur franchit allègrement après un tour du monde financé grâce à la vente de ses quatre restaurants en 2010.
Pour cet homme formé à la distribution, entrepreneur à succès dans la restauration, l'hôtellerie peut être l'occasion de diversifier ses activités dans un secteur plus calme tout en conservant cette énergie entrepreneuriale. "L'hôtel Rohan était une véritable opportunité. Vieillissant, avec un taux d'occupation très faible, mal positionné sur le net, mais avec un emplacement remarquable, il était évident que cet hôtel avait de réelles potentialités", déclare le propriétaire.
Une rénovation personnelle et réalisée par étapes
Car pour cet autodidacte, dont la vente est le métier, l'adaptation des techniques de la distribution à l'hôtellerie ne pose aucun problème, à condition toutefois que l'outil de travail soit suffisamment séduisant pour attirer la clientèle. Le démarrage des travaux démarre donc en 2011. "Je les ai réalisés par étapes car je ne voulais pas fermer l'hôtel", déclare-t-il. Il aménage d'abord le sous-sol "car un hôtel ne peut pas tenir sans s'appuyer sur des fondations solides", ajoute-t-il. Il crée les cuisines, l'épicerie, la blanchisserie, la salle de repos pour le personnel, puis il s'attaque à une première série de chambres.
Viennent ensuite dans l'ordre, les parties communes, la VMC (ventilation mécanique contrôlée) et les ascenseurs, et enfin la dernière tranche des chambres. "Pour celles-ci, j'ai conçu une décoration légère, facilement interchangeable, qui évite les phénomènes de mode", précise-t-il. Il choisit ainsi tout seul les éléments de décoration, chinant dans les salles de vente ou piochant dans les catalogues de Maison et Objet. Seul élément sur lequel il ne transige pas, la salle de bains "qui doit être fonctionnelle et durable", dit-il.
Bien que l'ambiance de l'hôtel soit très personnalisée, elle plaît immédiatement aux touristes qui représentent même la majorité de sa clientèle (60 % environ) avec un engouement qu'il sait parfaitement exploiter grâce à son nouveau site internet conçu par Apicius bientôt complété par une nouvelle application. Enfin, si l'homme est original, il n'en reste pas moins un manager d'équipe et un homme de chiffres formé à la CCI de Clermont-Ferrand, la seule à accepter des adultes en formation en CAP et bac pro dans l'hôtellerie-restauration.
Un chiffre d'affaires multiplié par deux en un an
"Nous travaillons avec différents OLTA [N.D.L.R : agences de voyage en ligne], mais différemment et en fonction des périodes. La seule chose que je respecte est la parité tarifaire", souligne-t-il. Les résultats ne se font donc pas attendre : "En un an, nous avons doublé le chiffre d'affaires de l'hôtel l'an dernier et nous sommes passés de 35 % de TO avec un prix moyen par mois de 100 € à 68 % de TO et 120 € de prix moyen". Classé désormais 4 étoiles, l'hôtel Rohan se définit comme une "alternative aux hôtels 4 étoiles que sont, entre autres, la Cour du Corbeau ou le Regent Petite France à Strasbourg. Nous avons un positionnement de niche qui repose sur trois atouts majeurs : l'originalité, le décor et le service".
Aujourd'hui, avec une clientèle très présente, l'hôtel Rohan estime avoir un nouveau défi à relever, faire venir les Strasbourgeois au restaurant. Et ce ne sont pas les idées qui lui manquent : soirées privées événementielles, club de dégustation. "Nous ne sommes pas au maximum de nos possibilités", précise-t-il. Il pense d'ailleurs déjà à créer un club d'habitués et à adhérer pour les étrangers à un réseau international dont il préfère taire le nom "pour le moment", dit-il. Avec sa rénovation atypique, l'hôtel Rohan aurait-il donné à la petite hôtellerie strasbourgeoise l'envie de monter en gamme ? "C'est une nécessité pour la ville", déclare Christophe Tailleur, qui ajoute aussitôt : "Même si nous ne sommes pas à Paris." Mais à bientôt 1 h 30 de Paris, Strasbourg pourrait bien avoir une nouvelle carte à jouer.
Publié par X. S.