Pour l'économiste Michel Godet , nos dirigeants, tous bords politiques confondus, doivent cesser de « regarder la France à la jumelle ». Selon lui, le découpage proposé est « incohérent » et ne jouera pas en faveur du développement touristique. Constat paradoxal alors que le tourisme a été décrété 'cause nationale' par le Président de la République. Le projet de loi sur la réforme territoriale prévoit 13 régions. « On ne diminue pas le millefeuille, on l'agrandit. Il faut une réforme, mais elle doit prendre en considération les aspects historiques, géographiques, les pôles d'intérêt, elle doit faire l'objet de discussions, de concertations… ». Le projet qui est actuellement en discussion oublierait donc l'essentiel, que tout part des territoires et des départements. C'est en tout cas ce qu'il ressort en grande partie du débat national sur la réforme territoriale et l'organisation du tourisme en France lancé par l'Institut français du tourisme et qui s'est déroulé jeudi 11 décembre au lycée Jean Drouant, à Paris. Michel Godet, qui participait début décembre au congrès national de l'Umih à Nancy, insiste également sur le « long terme », il estime qu'il faut arrêter de parler « croissance immédiate ». Si le tourisme est bien un levier économique, il s'inscrit dans une « logique humaine ». La qualité de vie et de l'accueil sont des notions impératives, mais ces pôles de compétitivité demandent une « vraie » volonté politique locale. Selon lui, toute dynamique ne peut venir que de la base. C'est-à-dire des départements. Ce sont eux qui sont les plus à même d'expliquer les besoins, de jauger des ressources. L'homme est aussi foncièrement contre les mégalopoles qui « vont totalement à l'encontre de la qualité de vie des individus ». En parallèle, 'sa' liste des tendances est intéressante à analyser : les gens vont en vacances malgré la crise, ils choisissent le prix au détriment de la destination, les courts séjours dominent, la France pêche par le non accueil (problème des langues en majorité), l'insécurité des déplacements dans certains pays favorise les destinations européennes, dont la France et de nouveaux marchés apparaissent comme (santé, circuits-courts…). Jean-Jacques Hyest, sénateur de Seine-et-Marne et ancien président de la commission des lois du Sénat, travaille actuellement sur les amendements déposés. Il ne s'agit pas ici d'une « troisième décentralisation » mais d'un projet qui effectivement « fait à la va-vite » et qui voudrait qu'en France « tout soit organisé partout de la même manière ». Et c'est là que le bat blesse. « Certains départements auraient pu et dû changer de régions et quand bien même le principe est prévu dans la loi, il est beaucoup trop compliqué à mettre en oeuvre. (…). Il faut impérativement redéfinir les périmètres et consulter les territoires » ajoute à son tour l'élu qui évoque également une découpage « incohérent ». « Nous sommes rentrés dans un système qui enlève les compétences, les unes après les autres, aux départements. Retirer le tourisme aux départements, c'est-à-dire aux territoires, est une grave erreur et c'est mal connaître un pays. » Ce qu'il faudrait, c'est « regrouper les territoires par bassin de vie et non au travers de quotas chiffrés qui ne veulent rien dire. Quant à la région, sa seule compétence concernant le tourisme devrait se situer au niveau d'un schéma directeur ou stratégique uniquement. Ce n'est pas au niveau d'une région qu'on fait du tourisme opérationnel ».
Pour mémoire : Jeudi 27 novembre, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif "délimitation des régions et élections régionales et départementales" n'est pas parvenue à un accord. Mardi 9 décembre, l'Assemblée nationale a adopté le texte en nouvelle lecture. Le Sénat examine le projet de loi en nouvelle lecture aujourd'hui, lundi 15 décembre. Il propose une carte de 15 régions.
Publié par Sylvie SOUBES