Janvier, un mois où les résolutions nouvellement prises sont mises à l'épreuve, où les excès des fêtes cèdent la place à la volonté de vivre plus sainement. C'est également le Dry January – un mouvement mondial incitant les gens à renoncer à l'alcool pendant 31 jours. Dans ce contexte, l'industrie de la restauration a connu une évolution significative, cherchant à répondre à une demande croissante pour des expériences gastronomiques sans alcool. Au-delà de simplement suivre une tendance qui tend vers une diminution de la consommation d’alcool, l'introduction d'une offre sans alcool représente une opportunité pour les établissements de restauration de s'adapter aux besoins changeants des consommateurs.
Un accord complet sans alcool
"Les clients qui ne boivent pas d’alcool sont un peu oubliés. Ils finissement souvent par boire de l’eau." Chez Nectar, le restaurant de l’hôtel Maison-Mère (Paris, IXe), la mixologue Alix Duchaud est allée jusqu’à créer un accord entièrement pensé sans alcool. Une innovation qui lui permet aussi de vendre à ceux qui ne consomment pas d’alcool ne serait-ce que pour accompagner ceux qui prennent un accord avec alcool : "Environ 10 % de nos clients prennent cet accord. Ça plait beaucoup à la clientèle, ils le trouvent original", explique-t-elle. Il offre un "côté expérientiel pour tout le monde", y compris pour les familles avec enfants. On retrouve par exemple, sur l'entrée, pour l'accord avec alcool : un cocktail vieille prune, xérès, citron, sirop shiso, noix de la saint-jean et, pour le sans alcool, un cockail également confectionné à partir de JNPR1 infusion figue et noix, sirop shiso et citron. Les deux servis dans des coupettes.
Même chose chez Chocho (Paris, Xe). Le chef Thomas Chisholm et son adjoint Rodolphe Despagne proposent, depuis cet été, un accord entièrement sans alcool, principalement constitué de kombucha, une boisson fermentée que l’on peut faire soi-même et aromatiser selon ses goûts. Le duo partage cette appétence pour la fermentation, que ce soit dans les assiettes ou dans les verres, comme le font les pays nordiques. Ils ont ainsi commencé en proposant du kombucha en bouteille mais le prix était trop élevé et la boisson "décevante". "J’avais un scoby [la souche de kombucha] à kombucha pendant le confinement. Je l’ai ramené à Chocho en me disant qu’on pouvait faire quelque chose de super sympa", explique Rodolphe Despagne. Néanmoins, pas question de faire ça de manière approximative : "Nous essayons d’avoir une technique différente dans chaque verre : citronnade à la rose, kombucha au kiwi et à la tagette, ginger beer à la fève de tonka, kombucha orange pour se rapprocher d’un muscat, tonic à la gentiane et des koso, des sirops maison travaillés à partir de fruits et de sucre. Enfin, en dessert, nous proposons du lait ribot assaisonné à la cardamome et à la banane par exemple."
Comment fixer ses prix
Chez Nectar, l’accord sans alcool, sur le menu cinq services, est à 28 €. "Ce n’est pas évident de justifier le même prix pour du sans alcool que pour une boisson avec alcool. Pourtant, la bouteille de spiritueux sans alcool se paye parfois le même prix que celle avec alcool", explique Alix Duchaud. Parmi les astuces de la jeune mixologue : ne pas utiliser que des spiritueux sans alcool mais proposer aussi des jus concentrés, des sirops fait maison. "Cela prend du temps mais ça baisse les coûts et c’est plus frais. Ça permet aussi de s’amuser et d’être plus créatif."
Pour la construction d’un accord : même logique. "On peut se lâcher, mais pas sur tout et il faut faire attention aux quantités". Ce n’est pas parce que c’est du sans alcool que les clients ont besoin de beaucoup de liquide. Il faut adapter les quantités et privilégier, quand c’est possible, des boissons chères en fin de repas, car les doses plus petites seront appréciées.
Chez Chocho, le prix de l'accord sur le menu cinq temps a été fixé à 24 €. Ici, les boissons sont faites maison, ce qui coûte moins cher et permet des marges plus importantes. Mais cela prend du temps. "On ne tient pas à dénigrer tout le travail réalisé en fixant un prix trop bas", justifie Thomas Chisholm.
Le choix des verres
Chez Chocho, les boissons sont servies dans des verres à vin : “Cela permet de n’exclure personne, tout le monde peut trinquer, c'est une vraie immersion.” Chez Nectar, un travail sur le choix des verres a également été fait : tiny bev, tasse en grès, verre à vin, bolée … tout a été pensé.
Publié par Romy CARRERE