C’est un nouveau départ ou plutôt une nouvelle étape dans leur reconstruction. Arrivés en France en 2014 après avoir fui la Syrie, Bassem et Reem Ataya ont inauguré en juin dernier leur restaurant au cœur du food-court lillois Grand Scène. Le couple y propose une cuisine syrienne chargée de saveurs, de souvenirs et d’histoire. “La guerre laisse une image dégradée de la Syrie. Au travers de la nourriture, nous voulons transmettre une image positive du peuple syrien et des réfugiés en général. Le peuple syrien est un peuple gentil, accueillant et partageur”, confie Reem. À la carte de ce restaurant, qui vient compléter leur offre de service traiteur lancée en 2018, on retrouve les fondamentaux de la cuisine levantine.
Boucler la boucle
Reem et Bassem, issu d’une famille de restaurateurs à Damas, ont quitté, avec leur fille, un pays ravagé par les bombes pour atterrir en France. Sans famille ni travail, ils ont tout de même la chance de ne pas se retrouver à la rue et de loger chez une connaissance. Commence alors un casse-tête administratif qui dure près d’un an : la demande d’asile, puis la reconnaissance en tant que réfugiés politiques, avant d’obtenir des papiers français. “L’administration française n’est pas facile. Pour les papiers, heureusement que l’on nous a aidés, et pour monter notre boîte aussi. Il faut énormément de justificatifs. C’est important quand on arrive en tant que réfugié d’être bien entouré, sinon on n’arrive à rien”, insiste Reem Ataya.
Laila peut aussi en témoigner. Née à Hérat, dans l’ouest de l’Afghanistan, elle a quitté son pays en 2008 avec sa famille, pour se réfugier en France. D’abord à Paris, puis dans le Nord, à Tourcoing, où elle vit depuis douze ans. Et depuis quelques semaines, elle est la gérante d’un petit restaurant, rue de Trévise à Lille. “J’ai eu beaucoup de soucis pour créer le restaurant. J’ai demandé à plusieurs banques, qui n’ont pas accepté, malgré le soutien de mon expert-comptable. Quand, il y a quatre mois, j’ai vu ce local qui n’était pas trop cher, j’ai emprunté à mes amis autour de moi. Il m’a fallu un peu de temps pour réunir l’argent.”
Embaucher des réfugiés
Louis Jacquot et Sébastien Prunier, eux, ont décidé d’aider à de nouveaux départs. En 2016, ils ont créé leur service traiteur, Les Cuistots Migrateurs, et décidé de n’embaucher que des réfugiés. “À notre échelle, on espère permettre un changement de regard, un vent nouveau et positif sur la question de la migration”, confie Louis Jacquot, qui souhaite ainsi apporter une situation stable à ses employés. Aujourd’hui, neuf réfugiés, tous en règle, travaillent en CDI dans l’entreprise. Seul l’un d’entre eux travaillait déjà dans la restauration dans son pays d’origine.
“On ne parle jamais de diplôme. Pour sélectionner les profils, on a goûté les plats et mesuré à quel point la cuisine était une passion. Puis on a évalué le niveau de langue”, explique le cofondateur. Les Cuistots Migrateurs préparent leurs mets internationaux dans un laboratoire de 500 m2 situé à Montreuil (Seine-Saint-Denis), en banlieue parisienne. Ils viennent de lancer un site e-commerce.
Et pour aller plus loin dans leur démarche, les deux fondateurs ont développé une école de cuisine pour les réfugiés statutaires. Située dans les locaux de l’Institut culinaire de Paris, l’école propose des formations professionnalisantes gratuites de 4 mois et demi pour les réfugiés. À la sortie, les élèves stagiaires se voient diplômés d’un CQP de commis de cuisine “90% de nos élèves qui sont sortis de la formation ont trouvé un emploi stable”, se félicite Imaad Ali, le directeur de cette école.
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Publié par Pour Aletheia Press, Lolita Péron