Mathis Molinié est une star montante des réseaux sociaux, avec près de 600 000 followers sur TikTok et 500 000 sur Instagram. Voilà sept ans que le jeune chef a rejoint son père, Philippe, en cuisine. Ce dernier œuvre depuis plus de trente ans, rue aux Ours à Rouen (Seine-Maritime). Un agrandissement de salle (passant de 38 à 70 couverts), l’obtention d’une terrasse, un relooking, et voilà Mathis aux commandes, sous le regard bienveillant (mais critique) de son père. Et si tout se joue en cuisine, la vie numérique de Mathis n’en est pas moins débridée.
Des shorts et des lives
Il publie régulièrement de courtes vidéos qui résument, en une minute, deux heures de travail en cuisine. Le téléphone est simplement posé et tout est filmé brut, sans mise en scène ni commentaires. “J’avais déjà vu beaucoup de chefs présenter des recettes, explique-t-il. J’ai voulu faire différemment et je me suis inspiré de ce que faisait un chef brésilien.” Les montages, il les réalise, après le service, directement sur son téléphone en 30 à 60 minutes. “Je prends un réel plaisir à faire mes montages”, sourit-il, même s’il admet avoir parfois besoin de déconnecter un peu. “À la base, je suis parti sur une vidéo par semaine, pour créer l’habitude d’être vu régulièrement. Mais cela fait quelques jours que je n’ai rien posté. Ce n’est pas bien, car, on le sait, tout va très vite sur les réseaux.”
La formule séduit et le nombre de followers ne cesse de grimper. Mathis Molinié décide alors de compléter ses posts par un live TikTok tous les samedis soir. Le service est filmé dans son entièreté, sans interaction avec les followers qui, cependant, commentent et discutent entre eux. “C’est étonnant, on passe en cinq minutes de 4 ou 5 personnes qui suivent le live à 1 000 ou 1 200. Le mieux que j’ai fait, c’est 75 000 followers en simultané.”
Avancer prudemment
Cette notoriété commence un peu à se ressentir en salle. Parisiens ou étrangers, des touristes viennent spécialement Chez Philippe parce qu’ils l’ont vu sur les réseaux. Mais surtout, cette célébrité attire d’autres professionnels. Le chef est ainsi sollicité pour réaliser des placements de produits. Des opportunités qu’il regarde avec du recul. Heureux de constater que la loi encadre un peu mieux l’activité d’influenceur, il avance prudemment. Chacune de ses publications, même la plus anodine, comporte la mention ‘publicité’. Rien d’obligatoire, puisqu’elle doit normalement accompagner un post ayant suscité une rémunération (en argent ou en nature). Mais le restaurateur y voit une forme de transparence avec sa communauté, un filet de sécurité pour éviter tout problème.
“Cela s’arrêtera tout seul”
Parfois pris dans le tourbillon de la notoriété, Mathis Molinié garde les pieds sur terre, et n’oublie pas que son métier, c’est en cuisine qu’il se joue. D’autant que le restaurant attire plutôt une clientèle d’affaires, de quartier. Les réseaux, “cela me prend tout le reste de mon temps, admet e jeune chef. Mais c’est une forme de reconnaissance qui est agréable. C’est de la publicité gratuite et cela ouvre des opportunités. Pour l’instant, ce n’est que du positif. Mais cela s’arrêtera tout seul. En attendant, je prends ce que j’ai à prendre.
Publié par Pour Aletheia Press, Benoit Delabre