“En 43 ans à la tête de mon établissement, je n’ai jamais eu la moindre assignation devant les prud’hommes”, clame avec une certaine émotion Antoine Stoeckel, patron de l’hôtel et spa Le Clos des sources, à Thennekirch (Haut-Rhin). “En février 2020, nous avons embauché un chef de rang avec de bonnes références. Il nous a mis en relation avec une autre personne que nous avons aussi recrutée comme serveuse et qui était en réalité sa compagne”,se souvient Anaïs Stoeckel, la fille d’Antoine, qui a mené l’entretien d’embauche. “Le couple devait débuter, le 18 mars 2020, un contrat de neuf mois. Mais cette date a aussi été celle du premier jour du confinement. Nous avons suivi les recommandations de notre cabinet comptable. La mise en chômage partiel n’a pu être faite à temps et le couple ne nous a plus donné de nouvelles”, affirme le restaurateur. “Il faut bien se remettre dans le contexte de flou administratif de l’époque. Les mesures de chômage partiel n’étaient pas encore clairement définies, il fallait prendre des décisions sans possibilité de retour en arrière, de correction ou de régularisation”, justifie Anaïs Stoeckel.
Condamné à payer 9 mois de salaires à chacun des plaignants
“En juin, j’ai recontacté le couple pour qu’ils intègrent l’entreprise le 15, puisque nous étions autorisés à rouvrir. L’accueil a été glacial. Ils ne voulaient plus travailler chez nous. Je suis passé à autre chose. Mais le 20 juillet, nous avons reçu une assignation aux prud’hommes. L’avocat nous reprochait d’avoir abandonné le couple à son sort, sans revenus, au point qu’ils aient dû vivre dans la rue. Il réclamait les salaires des 9 mois, sans qu’ils n’aient travaillé une minute pour nous, plus les charges, des dommages et intérêts et l’article 700 [relatif aux “frais non compris dans les dépens”, NDLR] pour un total de 54 000 €. Nous étions de bonne foi et dans un contexte de force majeur, j’ai fourni à notre avocat les échanges par SMS avec le chef de rang qui, plutôt qu’être à notre décharge puisque je proposais leur réintégration, va fonder notre condamnation. Les juges ont en effet estimé que ces échanges établissaient la poursuite d’un contrat moral entre les parties”, s’insurge Antoine Stoeckel qui considère que le couple a, en réalité, su profiter de la situation.
Ainsi, sans n’avoir dressé la moindre table, ils ont eu gain de cause devant le tribunal. Pour autant, le Clos des sources a obtenu réparation d’une partie de la somme auprès de l’assurance de son cabinet comptable, qui l’avait mal conseillé. “Outre la franchise de 1 500 € et les frais d’avocats, cette aventure nous aura coûté presque 6 000 €. Nos contrats de travail font désormais 12 pages ! », regrette l’entrepreneur, échaudé par cette mésaventure.
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Publié par Francois PONT